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le professeur du CHRU de Tours témoigne de soigner davantage de jeunes femmes

le professeur du CHRU de Tours témoigne de soigner davantage de jeunes femmes

Profitant d’Octobre Rose, le Professeur Lobna Ouldamer a elle-même contacté le NRpour un « message de prévention ». En consultation au CHU Bretonneau de Tours, elle constate au quotidien la progression inquiétante des cancers féminins.

Comment mesurez-vous cette augmentation ?

« Lorsque j’ai commencé mon stage en 2004, on parlait d’une femme sur onze touchée par un cancer du sein au cours de sa vie. Aujourd’hui, nous sommes plus près d’une femme sur sept. Ils sont de plus en plus jeunes. Rien que lors de ma dernière semaine, j’ai reçu trois femmes âgées de 31, 32 et 43 ans qui vont débuter une chimio et certaines vont perdre un sein… Cela fait beaucoup pour une semaine ! »

On pourrait penser que les cancers sont détectés tôt et donc moins graves…

« En effet, les lésions sont plus petites. Mais on voit aussi des lésions de plus en plus agressives, même petites, et chez les jeunes femmes. Pour des lésions de 5 mm, on est parfois obligé de débuter une chimiothérapie… »

Comment s’en sont-ils rendu compte ?

« A 30 ans, il n’y a pas de dépistage organisé. Mais lorsqu’il y a des antécédents familiaux et que l’on sait qu’on a une prédisposition, il faut se faire dépister par une échographie et une IRM. Pour d’autres, il y a l’auto-examen. Quand on a des seins considérés comme petits ou moyens, c’est pertinent, il faut apprendre à se connaître. Si les seins sont plus généreux, c’est plus compliqué. Pensez également à palper les aisselles. J’ai une patiente qui a senti une grosseur lorsqu’elle a mis du déodorant. »

Comment expliquer ces cancers ?

« Habituellement, on parle de quatre cancers liés à l’alimentation : les cancers du sein, de l’endomètre, de la prostate et du côlon. Mais quand on voit une jeune femme, pas du tout obèse, qui pratique une activité physique, avec une forme grave de tumeur, ça pose question. Il faut chercher quelque chose qui a changé ces dernières années. On pense évidemment à l’environnement, aux perturbateurs endocriniens, aux pesticides ou encore à la manière de fabriquer les aliments… »

Vous évoquez le Japon, le pays où il y a le moins de cancer du sein…

« Ils consomment peu de sucre et mangent beaucoup de poisson, du bon gras. Dans les sodas, le taux de sucre est bien inférieur à ce que l’on peut trouver en France, ou pire, aux Etats-Unis. Parce que le législateur en a décidé ainsi… »

Vous êtes impliqué dans une recherche intitulée « Nutrition, Croissance et Cancer » à l’université. Concrètement, comment agir ?

« Si nous ne contrôlons pas tout ce qu’il y a dans notre assiette, nous pouvons influencer notre activité physique. Même lorsque nous sommes prédestinés par nos gènes, nous pouvons prendre soin de nous pour contracter un cancer le plus tôt possible. On peut aussi se motiver pour s’attaquer à tous ces dossiers, faire du bruit pour que les choses avancent… »

Rassurez-nous, les traitements sont plus efficaces ?

« Nous nous dirigeons de plus en plus vers une médecine personnalisée. Nous avons fait beaucoup de progrès sur les tumeurs agressives. Nous avons renforcé certains protocoles (avec la chimiothérapie et l’immunothérapie orales) et réduit l’écart de survie avec d’autres cancers, tout en augmentant la durée de survie sans récidive. »

Comment gérer l’après-cancer ?

« Nous ne sommes pas tous égaux face à la douleur. Les douleurs post-mastectomie touchent une patiente sur trois. Nous avons beaucoup de choses à offrir (kinésithérapeute, algologue, etc.). Il faut la prendre en charge dans un délai de six mois sinon les douleurs persisteront dans le temps. Mais le plus compliqué à gérer, c’est l’estime de soi et ce qu’est un traumatisme. Pour certains patients, une cicatrice est une tragédie, tandis que d’autres opérés sont simplement heureux d’être en vie. Nous ne sommes pas tous programmés de la même manière pour gérer ces situations. »

Une étude vient de montrer qu’une femme qui reçoit un diagnostic de cancer a six fois plus de risques d’en sortir qu’un homme…

« Il y a des conjoints que j’ai même dû recadrer dans mon bureau ! Elles ont la vision de la femme parfaite, c’est parfois assez choquant… C’est terrible de penser que les femmes aussi doivent composer avec ça. »

5% des patients ont moins de 40 ans

Selon les chiffres de l’Institut national du cancer, les femmes de moins de 40 ans représentent 5 % des malades, soit 3 000 nouveaux cas par an. Mais les chercheurs soulignent que le phénomène d’augmentation des cancers du sein n’est pas spécifique aux jeunes femmes : il touche l’ensemble de la population. Entre 1990 et 2018, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer du sein chez la femme a presque doublé. Le nombre de jeunes femmes a donc augmenté proportionnellement.

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