Le producteur Alain Sarde visé par les témoignages de neuf femmes – Libération
Dans une enquête publiée ce lundi 13 mai, à la veille de l’ouverture du Festival de Cannes, le magazine « Elle » a recueilli les témoignages de neuf femmes contre le producteur star accusé de viols, d’agressions sexuelles et de harcèlement.
De Jean-Luc Godard à Roman Polanski en passant par Bertrand Tavernier et Jacques Doillon, l’homme a permis aux plus grands réalisateurs de filmer. Agé de 72 ans, le producteur de deux cents longs métrages est aujourd’hui le principal sujet d’une enquête publiée par le magazine Elle ce lundi 13 mai. Les journalistes ont pu recueillir neuf témoignages d’actrices ou aspirantes actrices, dont certaines étaient alors mineures. Ils dénoncent des agressions sexuelles, des chantages ou des harcèlements visant la personne qui a notamment produit Le pianiste Et le locataire de Roman Polanski ou encore Mulholland Drive par David Lynch.
L’enquête débute avec le témoignage de l’actrice Annelise Hesme. En 1997, alors âgée de 20 ans, elle rencontre Alain Sarde dans les locaux de sa société de production. Agé de 45 ans à l’époque, le producteur ne lui propose pas de rôle mais plutôt « un travail d’escorte ». « J’organise des dîners avec des acteurs, des réalisateurs, des distributeurs (…) et ils aiment avoir à leur table des femmes jolies et pleines d’esprit, comme vous. Bien sûr, c’est payant, et puis si, parmi le lot, il y en a un qui vous plaît, à vous de gagner plus d’argent le soir… » lui aurait chuchoté le producteur.
Déjà mis en examen pour viol et tentative de viol en juillet 1997
Agée de 15 ans en 1985, Elsa* (prénom modifié) se souvient de cet après-midi où elle s’est rendue dans l’appartement du producteur, situé à deux pas du parc Monceau, dans le très cossu 8e arrondissement de Paris. Son espoir : décrocher un rôle dans le prochain film du réalisateur Robin Davis. Le producteur lui propose de l’aider depuis la boîte de chocolats Fauchon posée sur la table basse, avant d’entamer une visite de son appartement, « soit une chambre ouverte sur le séjour ». « J’ai tout de suite eu envie de partir… Mais, tout d’un coup, il m’a poussé sur le lit et m’a sauté dessus. Je me souviens très bien de ses lèvres, de sa bouche dégoûtante. Il était laid, malgré ses mains manucurées. C’était bestial ! Je ressens toujours la pression de son corps sur le mien. Il m’a maintenue au sol et m’a violée. dit Elsa.
Fellations forcées, agressions sexuelles, viols, les témoignages des victimes se succèdent. Informé par la rédaction deElle Dès la publication de cette enquête, Alain Sarde a choisi de répondre par la voix de son avocate Jacqueline Laffont : « Sans communiquer leur identité ni le contenu précis de leur histoire, le magazine Elle a invité Alain Sarde à répondre aux allégations de neuf femmes qui le mettraient en cause, pour la plupart une quarantaine d’années plus tard, dans le cadre d’une enquête sur des violences sexuelles en cinéma. Alain Sarde est indigné et dévasté par ces allégations, toutes fausses, qui lui prêtent des comportements qu’il désapprouve et qui lui sont totalement étrangers.
Aucune de ces neuf femmes n’a jamais témoigné contre le producteur devant le tribunal. Mais Alain Sarde avait déjà été mis en cause pour des faits similaires en 1997, dans une vaste affaire de proxénétisme de luxe. Au cours de l’enquête, deux femmes accusaient le producteur de les avoir violées lors de réunions organisées par le photographe Jean-Pierre Bourgeois qui fut finalement condamné en 1999 pour proxénétisme aggravé. Alain Sarde a été mis en examen pour viols et tentatives de viol le 8 juillet 1997. Le changement du juge d’instruction chargé de l’enquête et une ordonnance de non-lieu mettent fin aux accusations.