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Le président Diomaye Faye en tournée parmi les putschistes maliens et burkinabés

Le président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, au palais présidentiel de Dakar, le 28 mars 2024.

Bassirou Diomaye Faye est attendu au Mali et au Burkina Faso, ce 30 mai, pour une « visite d’amitié et de travail », selon un communiqué de la présidence sénégalaise, en vue de renforcer « des liens de bon voisinage historiques ». Le nouveau chef de l’Etat sénégalais doit rencontrer pour la première fois le leader burkinabé, le capitaine Ibrahim Traoré, à Ouagadougou et le président de la transition malienne, le colonel Assimi Goïta, à Bamako, deux hommes qui ont mené un coup d’État, en rupture avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont le Sénégal est un poids lourd.

Si ces putschistes entretiennent des relations tendues avec certains de leurs homologues ouest-africains, ils partagent avec le président sénégalais la même rhétorique panafricaniste et souverainiste. Bassirou Diomaye Faye a été élu sur un programme vantant la rupture avec l’ordre néocolonial et la promesse de changement.

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Lors de son investiture le 2 avril, ses partisans ont également acclamé les responsables maliens et burkinabés qui avaient fait le déplacement. Une proximité idéologique qui n’était pas sans interroger les partenaires occidentaux du Sénégal et au sein de la Cedeao. Quel camp choisirait le successeur de Macky Sall ?

Aucun, a répondu Bassirou Diomaye Faye. Auréolé de son élection exemplaire – il l’a emporté dès le premier tour, sans contestation de ses adversaires –, il entend mettre sa popularité au service de l’Afrique de l’Ouest. « Je suis convaincu que nous devons continuer à agir de manière solidaire au sein de l’espace CEDEAO, à opérer les réformes nécessaires et à œuvrer pour dissiper les malentendus qui ne peuvent manquer de surgir »a-t-il déclaré le 7 mai à Abidjan, assurant que la CEDEAO « est un fantastique outil d’intégration (que) nous gagnerions à préserver ». Un message directement adressé aux trois pays putschistes qui ont créé l’Alliance des États du Sahel (AES), mettant en danger la survie de l’organisation régionale.

« Ramener les Sahéliens chez eux »

Outre la Côte d’Ivoire, Bassirou Diomaye Faye s’est rendu chez ses voisins directs, les La Mauritanie, la Gambie et la Guinée-Bissau, mais aussi le Nigeria, le Ghana, puis le Cap-Vert et la Guinée. Huit pays en seulement deux mois, durant lesquels cet homme discret a décidé de jouer le rôle de médiateur. Bola Tinubu, le président du Nigeria et actuel président de la CEDEAO, lui a demandé de tout essayer » rentrer à la maison » les pays sahéliens au bord du départ. En marge de son déplacement à Abuja, M. Diomaye Faye a également reçu le président de la Commission de la CEDEAO, Omar Alieu Touray.

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 » Le dossier est complexe et si quelqu’un peut s’en charger, c’est bien Diomaye Faye. Il comprend la rhétorique hostile à la France des juntes du Sahel, et apprécie les relations étroites entre son pays et ceux de la CEDEAO, comme la Côte d’Ivoire. », souligne Oumar Berté, juriste et auteur d’un ouvrage sur l’institution ouest-africaine, qui précise également que « le président sénégalais semble apprécié des citoyens maliens et burkinabè « .

Pour Oumar Berté, le jeune président sénégalais a tout intérêt à tenter de réconcilier sa région.  » Se positionner en tant que médiateur a du prestigepoursuit l’avocat. Mais il y a surtout des enjeux économiques pour le Sénégal à ne pas voir la CEDEAO craquer. La moitié de l’activité du port de Dakar repose sur des produits à destination du Mali « . Il rappelle ainsi que « Lorsque la CEDEAO a décidé des sanctions contre Bamako en 2022, l’économie sénégalaise a été affectée. »

« Mieux négocier avec les pays européens »

L’avenir de la CEDEAO et du Franc CFA, symbole de la « Françafrique » que des putschistes comme Bassirou Diomaye Faye veulent voir disparaître, mais aussi les enjeux sécuritaires dans une région en proie aux groupes terroristes armés devraient être au cœur des discussions que les Sénégalais avoir avec ses homologues de Bamako et de Ouagadougou.

Se positionner comme leader régional doit aussi lui permettre de réaliser d’autres ambitions. Un responsable du ministère des Affaires étrangères, qui a requis l’anonymat, souligne : « Ces déplacements dans la région visent aussi à mieux négocier avec les pays européens. Sur des questions comme les migrations ou les accords économiques, il a tout intérêt à faire connaître son point de vue à ses interlocuteurs. »

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Les attentes des électeurs portent sur ces sujets » qui combinent diplomatie, économie et questions intérieures », assure Sambou Ansou, membre du secrétariat national de communication du Pastef (Patrites africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) – le parti fondé par le président Bassirou Diomaye Faye et le Premier ministre Ousmane Sonko.

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Durant sa campagne, le candidat Pastef a promis de renégocier les accords de pêche signés avec l’Union européenne ainsi que les contrats gaziers et pétroliers conclus avec des opérateurs étrangers. Des thèmes qu’il a abordés avec le président du Conseil européen Charles Michel, en visite à Dakar le 23 avril, appelant à une « partenariat repensé, rénové « .

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Un responsable du ministère des Affaires étrangères, qui a requis l’anonymat, souligne la portée symbolique de la visite à Dakar, mi-mai, de Paul Kagame, le dirigeant rwandais.  » Kagame incarne la souveraineté africaine, une relation décomplexée avec l’Occident, cela parle à Diomaye Faye et contribue à sa popularité auprès de la jeunesse. »

Bassirou Diomaye Faye préparera ensuite son déplacement en France, prévu le 20 juin, au cours duquel il devrait rencontrer Emmanuel Macron.  » Dans la région et au-delà, Diomaye Faye veut accepter la rupture mais aussi assurer la continuité », conclut Mamadou Lamine Sarr, qui enseigne les sciences politiques à l’université Cheikh Hamidou Kane de Dakar.

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Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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