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le premier ministre Ousmane Sonko présente un gouvernement qui fait la part belle aux cadres de son parti

Un gouvernement de « rompre ». C’est ainsi que le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a présenté, vendredi 5 avril au soir, sa nouvelle équipe resserrée, composée de 25 ministres et cinq secrétaires d’État, dont près de la moitié sont issus des rangs de son mouvement, les Patriotes Africains du Sénégal. pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef). « C’est un gouvernement qui incarne le projet, une transformation systémique plébiscitée par le peuple sénégalais le 24 mars 2024 à travers un premier tour électoral avec 54,28% des voix » de Bassirou Diomaye Faye, a déclaré Ousmane Sonko à propos du président élu.

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La principale surprise vient de la nomination de deux militaires à des postes régaliens : le général Birame Diop, ancien chef d’état-major, a été placé à la tête des forces armées, et le général Jean-Baptiste Tine, ancien commandant en chef de la gendarmerie nationale, à l’intérieur. « Les militaires ne sont pas politiques, ils sont au-dessus de la mêlée », estime l’analyste Abdou Khadre Lô, pour qui ces nominations traduisent la volonté du nouveau pouvoir de confier les ministères clés à des personnalités incarnant une forme de neutralité politique. Comme en 2000, lorsqu’un général fut nommé au ministère de l’Intérieur pour organiser l’élection présidentielle qui déboucha sur la première alternance au Sénégal..

Lui aussi censé détenir un pouvoir souverain moins partisan que lors du dernier mandat de Macky Sall, le nouveau ministre de la Justice, Ousmane Diagne, est un ancien procureur général près la cour d’appel de Dakar, connu pour son sérieux.

« On ne partage pas vraiment le gâteau »

Outre ces nominations, une place importante est accordée aux cadres du Pastef, parti créé en 2014 qui n’a encore jamais occupé le pouvoir. Au total, treize membres du gouvernement sont issus du mouvement, dont plusieurs poids lourds. Parmi eux, Birame Souleye Diop, qui présidait depuis septembre 2022 le groupe parlementaire de la principale coalition d’opposition, Yewwi Askan Wi, a été nommé au ministère de l’Énergie, du Pétrole et des Mines. Une position stratégique alors que le Sénégal s’apprête à devenir, en 2024, un pays producteur d’hydrocarbures.

Yacine Fall, vice-président de Pastef en charge des relations internationales ayant travaillé aux Nations Unies, hérite du ministère de l’intégration africaine et des affaires étrangères. Elle est l’une des quatre femmes de ce cadre très masculin. Il y en avait entre sept et huit dans les gouvernements précédents.

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« Il n’y a pas de véritable partage du gâteau. De nombreux acteurs historiques de Pastef ne sont pas au gouvernement. Certains alliés non plus, comme l’ancienne Première ministre Aminata Touré ou le doyen Habib Sy, qui ont fait campagne en faveur de Bassirou Diomaye Faye.souligne Abdou Khadre Lô, qui considère qu’il s’agit d’un « une vraie rupture ».

Certains survivants du mandat précédent ont néanmoins trouvé leur place au sein du gouvernement, comme Serigne Guèye Diop, ministre de l’industrie et du commerce, qui fut un proche conseiller de Macky Sall. Au soir de son investiture, Bassirou Diomaye Faye a également choisi comme directrice de cabinet Mary Teuw Niane, une ancienne ministre de l’éducation entrée dans l’opposition en 2019.

Prise de risque limitée

Le secrétaire général de la présidence sous le mandat précédent, Oumar Samba Ba, a été reconduit dans ses fonctions. « Nous avons fait ce choix pour assurer la continuité de l’État. Depuis le premier président Léopold Sédar Senghor, les hauts fonctionnaires, non compris, ont toujours eu cette mission qui a assuré la stabilité de notre pays. Ils se placent au-dessus des intérêts partisans.»justifie un conseiller de Bassirou Diomaye Faye.

« Il y a cette volonté de ne pas vouloir prendre trop de risques pour ne pas frustrer les alliés ou sauter dans l’inconnu, en proposant des postes à des gens de l’ancien régime. C’est un gouvernement de prudence”estime le politologue Jean-Charles Biagui, qui note néanmoins «l’effort pour proposer de nouveaux visages»notamment à travers la nomination de techniciens comme Fatou Diouf, enseignante-chercheuse spécialisée dans les activités maritimes, nommée chef du ministère de la Pêche.

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Dans l’économie, un spécialiste des questions monétaires ayant travaillé au Fonds monétaire international (FMI), Abdourahmane Sarr, a été nommé. Une position qui sera d’autant plus scrutée que Bassirou Diomaye Faye s’engage à accélérer la sortie du franc CFA, monnaie commune à la plupart des Etats francophones d’Afrique de l’Ouest, héritée de la colonisation.

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Reste à savoir comment le président élu et son mentor – aujourd’hui Premier ministre – partageront le pouvoir. Le tandem est inédit : principal leader de l’opposition mais exclu de la présidentielle, Ousmane Sonko a désigné Bassirou Diomaye Faye comme candidat remplaçant. Cet ascendant se reflétera-t-il dans le futur fonctionnement de l’exécutif ? « Le poste de Premier ministre est un poste sujet aux conflits et éjectable »prévient Ogo Seck, professeur de sciences politiques à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, soulignant que« Il ne peut pas y avoir deux coqs dans le même poulailler. »

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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