Le « pizzly » se propage dans l’Arctique grâce au changement climatique
De plus en plus d’ours polaires se reproduisent avec des grizzlis, dont l’aire de répartition s’étend vers le nord, multipliant les membres d’une espèce hybride appelée « Grolar » ou « Pizzly ».
Le pizzly, un ours pas comme les autres
La première observation d’hybridation entre ces deux espèces dans la nature a été enregistrée en 2006. À l’époque, un chasseur venait d’abattre ce qu’il croyait être un ours polaire dans les Territoires du Nord-Ouest de l’Arctique canadien. Cependant, en y regardant de plus près, l’animal semblait inhabituel, affichant la fourrure crème typique d’un ours polaire, mais les longues griffes, le dos bossu, la face peu profonde et les taches brunes d’un grizzly.
Plus tard, des tests ADN ont confirmé que l’animal était un hybride. Sur le plan génétique, ce « mélange » ne pose pas de réel problème. Les grizzlis et les ours polaires ont divergé il y a seulement 500 000 à 600 000 ans, les deux espèces peuvent donc produire une progéniture viable.
À partir de ce moment-là, les observations se sont multipliées à mesure que les populations d’ours polaires diminuaient.
Cette observation n’est pas surprenante. En effet, à mesure que le monde se réchauffe, les grizzlis se déplacent vers le nord et empiètent sur les territoires de leurs cousins polaires une partie de l’année. Ici, où la glace marine a rétréci d’environ 870 000 kilomètres carrés par rapport à son maximum moyen de 1981 à 2010, les grizzlis peuvent se nourrir de plusieurs sources de nourriture.
De leur côté, les ours polaires sont des chasseurs hautement spécialisés, principalement adaptés à la vie sur les plateformes de glace marine. Ils peuvent parfois se nourrir d’œufs d’oiseaux de mer ou de rennes lorsqu’ils sont à terre. ferme, mais ces calories ne compensent pas celles brûlées pour chasser et trouver de la nourriture. Ainsi, sur un même territoire, le grizzli est plus nombreux que l’ours polaire.
Une espèce hybride mieux adaptée ?
En règle générale, les espèces hybrides ne sont pas mieux adaptées à leur environnement que leurs espèces parentales. Pour le pizzly, certains ont souligné le risque de troubles physiques et comportementaux chez ces animaux qui pourraient par exemple avoir du mal à résister aux grands froids ainsi que l’ours polaire. De même, certains hybrides observés dans un zoo allemand ont montré de moins bonnes capacités de nage que leurs « cousins » polaires.
Toutefois, le « Pizzly » pourrait encore survivre, estime une équipe de chercheurs.
« D’une part, les ours polaires ont un crâne plus long, ce qui en fait des experts dans la capture de phoques dans l’eau »note Larisa DeSantis, paléontologue et professeure agrégée de sciences biologiques à l’Université du Tennessee. « D’un autre côté, leurs molaires sont plus petites que celles des ours typiques, car ils ne mangent que de la graisse toute la journée ».
« Les grizzlis, en revanche, peuvent manger ce qu’ils veulent. » poursuit le chercheur. « On ne le sait pas encore, mais ce « crâne intermédiaire du pizzly » pourrait, à terme, leur apporter un avantage biomécanique ». Si cela se confirme, « Il est donc possible que ces hybrides recherchent un plus large éventail de sources de nourriture ».
Dans quelques décennies, si la tendance se poursuit, les ours pizzly pourraient enfin complètement surpasser les ours polaires, conservant avec eux une partie de leur constitution génétique. Alors que le changement climatique perturbe les écosystèmes arctiques, cette hybridation entre grizzlis et ours polaires pourrait bien n’être que le début d’une série d’adaptations forcées parmi les espèces polaires. Alors que les ours polaires sont de plus en plus obligés de quitter la glace marine pour la terre ferme, ces hybrides pourraient être mieux préparés à survivre dans un environnement où la glace est rare. En effet, leurs caractéristiques mixtes pourraient offrir un compromis physiologique et comportemental entre le grizzli, omnivore et adaptable, et l’ours polaire, spécialisé dans la chasse sur glace. Cette hybridation peut donc être considérée comme une réponse évolutive aux pressions écologiques provoquées par le réchauffement climatique.