le « parcours du combattant » pour les jeunes sportifs handicapés pour être acceptés dans un club
Seuls 1,4% des clubs sportifs en France peuvent accueillir des personnes en situation de handicap. Si les Jeux paralympiques peuvent contribuer à changer les choses, les familles de jeunes sportifs ont du mal à les intégrer dans un club.
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Selon le Comité paralympique et sportif français (CPSF), seuls 1,4 % des clubs sportifs en France déclarent actuellement être en mesure d’accueillir des personnes en situation de handicap. Les Jeux paralympiques peuvent-ils faire la différence ? Une chose est sûre, quel que soit le handicap, l’envie de faire du sport est là.
Sur le pas de la porte, dans le couloir d’un immeuble du XVIe arrondissement de Paris, une démonstration de tir à l’arc a lieu. Mais sans les flèches. Avec Magalie, la mère, et Morgane, 20 ans, qui souffre du syndrome de Joubert, une maladie génétique rare qui peut provoquer des troubles de coordination et cognitifs. Ce qui ne l’empêche pas de danser, de monter à cheval, mais aussi de pratiquer le tir à l’arc depuis deux ans dans un club de la capitale. Le club des Trois Lys accueille cinq personnes en situation de handicap. Morgane ne lâche jamais son arc. « Cela me détend, cela me donne confiance d’être avec d’autres, des amis qui sont gentils », elle dit.
Que pense-t-elle des Jeux Paralympiques ? « C’est dur quand on est handicapé, ils sont courageux » ces athlètes, ajoute Morgane. Elle aimerait bien être aussi courageuse. Pour Magalie, voir sa fille avec cet arc dans les mains est « une certaine fierté, car cela montre son évolution, le tir à l’arc demande de la concentration, du dépassement de soi. »
« La vie est déjà pour eux un parcours du combattant. Les loisirs, le plaisir, ce sont des choses essentielles à l’équilibre. »
Magalie, la mère de Morganeà franceinfo
Il a fallu deux à trois ans à Magalie pour trouver des clubs acceptant d’accueillir sa fille, souvent par le bouche à oreille, en faisant de nombreux coups de fil ici et là. « Il fallait faire avec. À un moment donné, la plupart des parents de personnes handicapées abandonnent. »elle se lamente.
Au Club France, dans le parc de la Villette à Paris, franceinfo a pu assister à une séance de para-escalade. Avec des encouragements pour Ashanty, 15 ans, qui vit avec une paralysie cérébrale. Sur place, elle est entourée de ses amis, ses éducateurs d’un institut de Bondy, en Seine-Saint-Denis. « Nous sommes toujours très émus de les voir accomplir quelque chose comme ça »raconte l’un d’eux. L’adolescente teste un dispositif innovant, un treuil à assistance électrique qui accompagne ses mouvements et permet aux personnes handicapées, comme elle, de grimper.
Ashanty n’aurait jamais pensé qu’elle ferait un jour de l’escalade. « En fait, j’aime beaucoup le sport, c’est pour ça que je suis content d’avoir fait cette sortie, elle se réjouit. Nous avons aussi nos droits et nous pouvons faire du sport comme tout le monde. Trouver un club reste difficile. « Ma mère et moi demandons partout, mais c’est difficile. On nous dit que ce n’est pas possible pour les fauteuils roulants électriques, qu’un enfant handicapé est plus difficile à prendre en charge qu’un enfant normal. »
Mais face à cette réalité, le Comité paralympique et sportif français veut se mobiliser avec, dès fin 2022, les « clubs inclusifs ». Il s’agit d’un programme porté par le CPSF et soutenu par l’État, qui vise à former gratuitement les dirigeants et encadrants de clubs sportifs à l’accueil des personnes en situation de handicap. L’objectif est d’atteindre 3 000 clubs inclusifs d’ici fin 2024.
« Actuellement, nous avons 1 500 clubs impliqués dans le programme, rappelle Sylvain Sabatier, directeur des territoires au sein du Comité paralympique et sportif français. Nous avons encore le temps d’atteindre les 3 000. Cela reste un défi. » D’autant qu’il existe 160 000 clubs sportifs en France. « Mais en même temps, ce sont 3 000 clubs de plus et c’est nécessaire car il y a trop peu de clubs qui se déclarent capables d’accueillir des personnes en situation de handicap. »
Les Jeux Paralympiques peuvent « susciter le désir, ajoute Sylvain Sabatier. Il y a des personnes handicapées qui parfois s’autocensurent, elles vont se dire : il y a peut-être un club qui peut m’accueillir. Maintenant, c’est à nous, collectivement, de trouver des solutions pour neutraliser cette complexité d’accès à la pratique. »
La route est encore longue, mais c’est peut-être sur un mur d’escalade du Club France avec un Ashanty au sommet qu’elle commence « La révolution de l’inclusion »celle ardemment souhaitée par Andrew Parsons, président du Comité international paralympique, lors de la cérémonie d’ouverture.