Le Pape au Congo-Kinshasa, une visite tant attendue

Quatre jours entiers. La durée du voyage du pape François en République démocratique du Congo, du 31 janvier au 3 février, marque l’importance de ce voyage emblématique et tant attendu dans un pays en guerre depuis près de 30 ans et qui constitue la plus importante communauté catholique du Afrique : 40% des 110 millions de Congolais se disent tels.
La visite du Pape est donc très attendue, d’autant plus qu’il a toujours manifesté un vif intérêt pour le continent, comme il le disait en 2016. « non seulement avoir aimé, mais adoré ». C’est son cinquième voyage en Afrique, et il se rendra au Soudan du Sud du 3 au 5 février. Deux pays meurtris par la guerre.
Car au-delà des considérations religieuses pour les fidèles concernés, cette visite revêt avant tout un caractère éminemment politique, alors que l’est de la RDC est le théâtre de conflits d’une brutalité sans précédent depuis trois décennies, qui ont déjà fait plusieurs millions de morts en toute impunité et silence international.
Un rôle de pacificateur
Le tout sur fond de pillage de certaines des ressources naturelles les plus importantes au monde : diamants, minerais et terres rares. Les 28 et 29 novembre, un nouveau massacre attribué au mouvement rebelle M23, soutenu par le Rwanda, est perpétré dans les villages de Kishishe et Bambo, au Nord-Kivu, et notamment dans l’enceinte d’une église adventiste. . Le bilan est de 131 morts, sans compter les viols et les pillages, armes de guerre habituelles dans ces conflits.
Les fidèles catholiques ont souvent été eux-mêmes en première ligne de ces massacres : en 2008, l’église d’un village de Doruma, dans le nord-est du pays, a été attaquée par des hommes armés qui ont tué à la machette une centaine de personnes – le bilan est encore imprécis aujourd’hui.
Et l’épiscopat congolais a toujours joué un rôle de pacificateur dans le pays, s’opposant souvent aux pouvoirs en place, de Mobutu à la dynastie Kabila. « Le pape vient visiter un pays en crise économique, sociale, politique, sécuritaire et sanitaire »témoigne dans La Croix Cardinal de Kinshasa Fridolin Ambongo, qui admet que Francesco « n’est pas un magicien » mais peut jouer un rôle politique notamment « avec ceux qui exercent le pouvoir ».
Fridolin Ambongo ne se dérobe pas, affirmant que l’élection du président congolais Félix Tshisekedi en 2018 était « une tromperie ». Il accuse également le Rwanda, qui « est derrière la rébellion du M23 » et « pille nos richesses à son profit ».
Une communauté internationale qui ferme les yeux
L’évêque de Goma, la capitale de la région du Kivu, attend également du souverain pontife qu’il « nous invite à gérer la richesse de ce pays équitablement et de manière à ce qu’elle profite à tous les Congolais, sans ingérence extérieure »allusions au gouvernement de Kinshasa et aux pays voisins qui pillent la région, le Rwanda et l’Ouganda.
Si les paroles traditionnelles d’un pape sur la nécessité de la paix et de la réconciliation sont donc attendues, rarement un voyage papal aura été aussi scruté. Et avec elle, qui sait, une prise de position contre la communauté internationale, qui a trop longtemps fermé les yeux.
Grb2