Le nouveau venu « No Place » a-t-il vraiment raison de se joindre à la course ?
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Le nouveau venu « No Place » a-t-il vraiment raison de se joindre à la course ?

Le nouveau venu « No Place » a-t-il vraiment raison de se joindre à la course ?

En 2019, le groupe Backstreet Boys revient avec un titre, Pas de placeCinq ans plus tard, l’échec cuisant de la chanson n’inquiète pas Tiffany Zhong, entrepreneuse de 27 ans qui a décidé de donner le même nom à son réseau social. Aux Etats-Unis, la malédiction est vaincue et No Place s’est hissée à la première place des applications les plus téléchargées depuis sa mise en ligne début juillet. En France, les premiers pas du réseau social sont plus timides, comme pour de nombreuses plateformes. L’occasion de se demander si la création d’un nouveau réseau social est encore légitime aujourd’hui.

En effet, quelques réseaux sociaux occupent désormais des positions dominantes et ne sont pas prêts à les abandonner. « On appelle cela des oligopoles à frange concurrentielle. Vous avez un gros acteur dominant qui prend la majeure partie du marché et derrière le reste du marché est partagé entre plusieurs petits concurrents », résume Julien Pillot, docteur en économie et enseignant-chercheur à l’INSEEC. En rachetant Instagram, Facebook – devenu Meta – en est un parfait exemple. TikTok est en passe de le devenir également.

Démarquez-vous des autres

Pour marquer son territoire dans un environnement ultra-concurrentiel et pas forcément rentable, on ne va pas créer de suspense, il faut donc « soit être sur un public extrêmement différent, soit sur une offre extrêmement différente », analyse Julien Pillot. « Ceux qui arrivent plus tard se contentent d’imiter ce qui existe en changeant deux ou trois petits détails ». BeReal a su se démarquer grâce à son immédiateté, par exemple.

C’est là aussi que No Place pourrait se démarquer, selon Marianne Lumeau, maître de conférences à l’université de Rennes. « Actuellement, les grands réseaux sociaux dominants souffrent de quelques problèmes et les consommateurs ont de moins en moins confiance. » La chercheuse fait ici référence, entre autres, au scandale Cambridge Analytica, mais aussi aux risques démontrés d’addiction aux réseaux sociaux et de lassitude vis-à-vis de la publicité et de l’influence.

Attirer les utilisateurs

En comparaison, No Place pourrait devenir un bon élève avec son graphisme simple mais coloré et ses interactions basées uniquement sur du texte. De quoi lui trouver des réminiscences de MySpace. « Un réseau social où l’algorithme semble un peu plus transparent et ne se verrouille pas peut trouver sa place. On revient à la base de ce qu’est un réseau social au sens propre, c’est-à-dire avoir son réseau de connaissances et pas forcément d’influenceurs. »

Les experts ne s’inquiètent pas outre mesure de ce lancement. Rome ne s’est pas faite en un jour, et aucun réseau social non plus. « Les réseaux sociaux qui occupent les premières places ont des effets de réseau, et ces effets de réseau les protègent de la concurrence », souligne Julien Pillot. Un réseau social avec un seul membre n’est pas un réseau du tout, et la plateforme perd de sa valeur. « Il faut qu’il y ait suffisamment de nouveaux membres pour pouvoir attirer une richesse d’utilisateurs qui rendra le réseau attractif », explique Marianne Lumeau.

La déroute des anti-X

Pourtant, depuis plusieurs mois, les nouveaux réseaux sociaux peinent à se faire une place malgré la chute vertigineuse de Twitter, que beaucoup ont tenté de remplacer. Mais pour la majorité, c’est un échec. Début 2024, Mastodon comptait à peine un million d’utilisateurs actifs, contre 1,4 million pour Bluesky. Jack Dorsey – cofondateur de Twitter – a même annoncé qu’il quittait le conseil d’administration de Bluesky. X (ex-Twitter) connaît lui aussi un coup d’arrêt brutal de sa croissance. La plateforme n’a connu qu’une hausse de 1,6 % en un an, selon les chiffres du Financial Times, contre près de 15 % les années précédant Elon Musk.

Chez Meta, les choses ne vont guère mieux. Threads, le bis de Twitter, reste à construire. Mais les résultats sont plus encourageants. « Threads compte désormais plus de 175 millions d’utilisateurs actifs chaque mois. Quelle année », a déclaré le patron de Meta, Mark Zuckerberg, sur ses réseaux sociaux. Si le réseau social se porte mieux que les alternatives grâce à la portabilité des utilisateurs via Instagram, les grands événements (comme les élections législatives ou l’Euro de football) montrent que les utilisateurs n’ont pas encore adopté le réflexe et choisissent encore de s’informer via les réseaux sociaux habituels.

Spotify se lance également

Pas de quoi décourager d’autres plateformes qui, si elles n’étaient pas considérées comme un réseau social, ont décidé de le devenir. C’est le cas de la plateforme de streaming Spotify qui a annoncé mardi le lancement d’une nouvelle fonctionnalité : les commentaires sous les podcasts.

« Pour les créateurs de podcasts qui cherchent à accroître leur audience, renforcer leurs relations avec les auditeurs et les fans est essentiel. Et pour amplifier leur présence, les créateurs ont besoin d’outils qui leur fournissent les fonctionnalités, les informations et la flexibilité dont ils ont besoin », résume un communiqué de presse. De quoi suggérer que pour mieux rivaliser, mieux vaut ne pas naître réseau social, mais le devenir.

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