le monde de la recherche au service du sport paralympique français
En vue des Jeux de Paris cet été, l’Irmes (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport) a mis en place un projet de recherche pour maximiser les chances des athlètes paralympiques français de monter sur le podium.
Publié
Temps de lecture : 4 min
« Il faut viser une place dans le top 8 et, pour cela, doubler le nombre de médailles d’or par rapport à Tokyo (11 au Japon). » Mi-mai, sur franceinfo : sport, la présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF), Marie-Amélie Le Fur, a précisé les attentes concernant la délégation française qui sera présente cet été à Paris lors des Jeux Paralympiques (août 28 au 8 septembre).
Pour tenter d’accompagner cette hausse des objectifs et la progression vers la haute performance des athlètes handicapés, plusieurs leviers ont été actionnés en amont de l’événement, notamment du côté de la recherche. Coordonné par l’Insep (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance) et réunissant 38 chercheurs de plusieurs laboratoires, un projet intitulé « Paraperf » était né. Cela devrait permettre d’investir le champ d’études dans 13 des 22 sports paralympiques au programme des Jeux de Paris.
Le premier des trois axes de recherche identifiés concerne l’analyse des performances, la concurrence et la mise à disposition d’outils d’aide à la décision pour les personnels français. Concrètement, il s’agit de leur fournir un maximum de données objectives selon les besoins, afin d’appuyer les stratégies des responsables des différentes disciplines.
« Une application automatisée a été créée, consultable à tout momentexplique Sandra Mauduit, directrice de la mission d’expertise au sein de la Fédération française de handball (FFH). Cet outil numérique n’a pas vocation à remplacer les entraîneurs dans leurs choix, c’est un accompagnement qui s’appuie également sur les données mises à disposition par les différentes fédérations internationales.
Responsable performance de l’équipe de France de tennis de table, Roza Soposki explique comment elle a profité de cette évolution. « Nous avons eu 14 mois de qualification pour les Jeux de Paris, et l’application m’a permis d’avoir le classement des qualifiés virtuels en temps réel, car il est mis à jour après chaque match et chaque tournoi à travers le monde. J’ai un onglet ‘parcours de qualification’ qui me donne une visibilité sur toutes les classes de handicap, un simulateur pour calculer les points des confrontations directes… Dois-je inscrire tel athlète à tel tournoi ? Dois-je plutôt le supprimer ? Cela a vraiment facilité mes choix afin de qualifier le plus d’athlètes possible pour les Jeux. »
Depuis une salle de réunion du bâtiment B de l’Insep, donnant sur la piste d’athlétisme et la Halle Joseph-Maigrot, Julien Schipman revient plus en détail sur sa thèse, relative à l’identification des facteurs de performance chez les athlètes paralympiques. . Chercheur à l’Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport (Irmes), il explique s’être penché sur plusieurs spécificités, dont la question de l’âge.
« En para-athlétisme, les athlètes en fauteuil roulant ont un pic de performance beaucoup plus tardif en raison d’une paraplégie souvent acquise au cours de la vie. Vous pouvez être champion paralympique dans une épreuve en fauteuil roulant à l’âge de 50 ans, ce que nous ne verrions jamais dans l’environnement olympique. Il faut en tenir compte dans les données que nous fournissons. »
Le problème de la classification est également central. « On a essayé de guider les athlètes qui étaient classés dans telle ou telle catégorie en leur montrant que, parfois, ça allait être compliqué de s’engager dans un projet de médaille. Nous leur avons montré que sur les trois dernières éditions des Jeux Paralympiques, aucun membre de leur catégorie n’avait atteint le podium ni même un top 8. Nous avons également mesuré l’impact des reclassements sur les handicaps dégénératifs. Parfois, si un athlète doit changer de catégorie parce que leur handicap a évolué. , il ne peut plus performer et cela aura un gros impact sur sa carrière de sportif de haut niveau… »
Le projet « Paraperf » ne s’arrête pas là puisqu’il questionne également l’amélioration du couple athlète-fauteuil à travers des ajustements, de nouveaux outils de mesure pour évaluer les sportifs, l’optimisation de l’ergonomie du fauteuil, l’identification de certaines asymétries qui pourraient mettre en danger les sportifs. .
Le dernier axe de recherche concerne les facteurs psychosociaux, juridiques et environnementaux favorables à la très haute performance. « Nous chercherons à comprendre les conditions de préparation des athlètesajoute Nicolas Fortsmann, responsable des études sur le développement de la pratique des activités physiques et sportives. Le but est d’avoir un diagnostic assez approfondi du handicap et de la manière dont ils s’entraînent : sont-ils seuls ? Quelle est leur durée de formation ? Sont-ils avec des personnes valides ou pas ? Y a-t-il une préparation mentale ? Ensuite, nous mettons en place une grille d’analyse avec le staff. »
Accompagnement scientifique, informations objectives et analyses, telles pourraient être les clés du succès du collectif français cet été. Mais à mesure que l’échéance sportive des Jeux en France se précise, une autre plane comme une ombre sur « Paraperf ». Sélectionné par le Programme de Recherche Prioritaire (PPR) en 2020, le projet n’a qu’une durée de vie de quatre ans, soit jusqu’au 31 décembre 2024. Reste donc à savoir si tous les efforts déployés pour investir dans le domaine paralympique ne disparaîtront pas une fois la page « Paris 2024 » fermée…