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Le Mali, le Niger et le Burkina Faso renforcent leurs liens en créant une confédération – Libération

Réunis samedi à Niamey, les trois présidents de l’Alliance des Etats du Sahel persistent dans leur rupture avec la Cedeao, et ont annoncé la création d’une organisation commune, dont le Mali prendra la présidence tournante.

Un divorce et un remariage. Alors que les régimes militaires au pouvoir au Burkina, au Mali et au Niger poursuivent leur rupture avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), annoncée en janvier, ils ont acté samedi 6 juillet la création d’une confédération entre leurs trois États, lors d’un sommet inédit organisé à Niamey. L’Alliance des États du Sahel (AES) avait été lancée officiellement en septembre dernier, mais comme une organisation à vocation militaire. Sous l’impulsion des trois présidents, réunis pour la première fois dans la capitale nigérienne, l’AES prend un tournant politique et économique.

Ce sommet permet « franchir une nouvelle étape vers une intégration plus poussée entre les États membres », Selon le communiqué final de la réunion. Outre la coopération militaire, la confédération de 72 millions d’habitants – dont le Mali assure la présidence tournante pendant un an – doit permettre la mutualisation des ressources dans des secteurs jugés stratégiques comme l’agriculture, l’eau, l’énergie ou les transports, ainsi que la création d’une banque d’investissement AES. L’organisation tripartite promet de se doter « des instruments propres pour financer notre politique économique et sociale », et de « établir des mécanismes visant à faciliter la libre circulation des personnes, des biens et des services au sein de l’espace ESA », indique le communiqué conjoint du colonel Assimi Goïta (Mali), du capitaine Ibrahim Traoré (Burkina Faso) et du général Abdourahamane Tiani (Niger), trois officiers arrivés au pouvoir par coups d’Etat dans leurs pays respectifs entre 2020 et 2023. Le règlement intérieur du Collège des chefs d’Etat de la confédération AES, dévoilé samedi, prévoit une réunion annuelle entre les dirigeants.

Plusieurs appels à renouer le dialogue

A l’ouverture du sommet de Niamey, le général Tiani a affirmé que les peuples de leurs trois pays avaient « a irrévocablement tourné le dos à la CEDEAO », Une organisation qu’ils considèrent comme manipulée par la France, ancienne puissance coloniale avec laquelle ils ont largement coupé les ponts. Les statuts de la CEDEAO prévoient un délai d’un an avant que le départ d’un État membre ne devienne effectif. Mais le Mali, le Niger et le Burkina Faso ne semblent pas prêts à reculer. Le président nigérien a présenté leur confédération comme une « une alternative à tout regroupement régional fictif en construisant une communauté souveraine de peuples, une communauté éloignée du contrôle des puissances étrangères. »

La Cédéao a imposé de lourdes sanctions économiques au Niger après le coup d’Etat de l’été dernier, et menacé d’intervenir militairement pour rétablir au pouvoir le président déchu Mohamed Bazoum. Les sanctions ont été levées en février, mais les relations entre les deux parties restent glaciales, malgré les appels de certains présidents – notamment sénégalais et mauritanien – à renouer le dialogue. Un sommet de la Cédéao s’est ouvert dimanche à Abuja, au Nigeria. La confédération AES, lancée la veille comme un camouflet, est évidemment au cœur des discussions entre dirigeants ouest-africains.

Le président de la Commission de la CEDEAO, Omar Alieu Touray, a averti que les trois pays risquaient« isolement diplomatique et politique » et la perte de millions d’euros d’investissements. « Outre les nombreuses menaces à la paix et à la sécurité ainsi que les défis de la pauvreté, notre région est également confrontée aux risques de désintégration », il était alarmé. « Nous devons tout faire pour éviter le retrait des trois pays frères de la CEDEAO. Ce serait le pire scénario et une grande atteinte au panafricanisme que nous ont légué les pères fondateurs », a-t-il ajouté. a déclaré le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, qui participait à son premier sommet de la CEDEAO depuis son élection en mars. Il a appelé à « entreprendre des réformes appropriées pour adapter la CEDEAO aux réalités de son temps ».

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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