Divertissement

Le Léopard d’or brille sur les filles bagarreuses de Saulé Bliuvaité

Avec sa 77e édition axée sur le renouveau, notamment féminin, le festival suisse a confirmé son rôle d’éclaireur. Il a couronné la Lituanienne Saulé Bliuvaitéi, pour son beau et sombre « Toxic » et décerné le Prix du public à l’Austria-Iraquien Kurdwin Ayub. Analyse des palmarès.

« Toxic », de Saulé Bliuvaité, Léopard d’or 2024, ou le portrait d’une jeunesse abandonnée et apparemment totalement blasée.

« Toxic », de Saulé Bliuvaité, Léopard d’or 2024, ou le portrait d’une jeunesse abandonnée et apparemment totalement blasée. Akis Bado

Par Frédéric Strauss

Publié le 17 août 2024 à 15h45

TuUn film de femme d’une mélancolie sombre mais d’une vitalité étonnante : c’est le choix justifié du jury du festival de Locarno, qui a décerné le Léopard d’or 2024 au film. Toxique du Lituanien Saulé Bliuvaité. On y suit des adolescentes fougueuses et difficiles qui veulent devenir top models et s’accrochent à ce rêve, sans jamais avoir l’air de rêver… Tourné dans une petite ville pour le moins particulièrement moche, Toxique montre une jeunesse abandonnée au bord du désespoir, mais qui, face à la dureté de la vie, semble totalement blasée, absolument pas impressionnée. Assez brut dans sa forme même, le film séduit, à l’image de ses héroïnes, par une énergie spontanée et une forme de courage qui consiste à montrer les choses telles qu’elles sont, sans crier au scandale, sans appeler à l’aide. Un manifeste d’autonomie qui éclaire les progrès du cinéma féminin. Et que l’on espère voir sortir en salles.

Saluée par le Prix du Jury, la réalisatrice autrichienne d’origine irakienne Kurdwin Ayub a également fait forte impression avec les portraits de jeunes femmes jordaniennes très riches et malheureuses qu’elle livre dans Monde. Un instructeur de MMA (Arts Martiaux Mixtes) légèrement déprimé vient d’Autriche pour les entraîner, embauché par le tout puissant grand frère. Les petites princesses, d’abord capricieuses et vraiment gâtées, laissent peu à peu comprendre à leur coach leur détresse de prisonnières, qu’il leur est bien sûr interdit de dénoncer. C’est aussi le courage de ces jeunes filles qui est raconté Mondemais la belle justesse du film finit étonnamment par se perdre dans un discours tout fait sur les hommes musulmans comme oppresseurs fanatiques.

Victorieux avec ToxiqueLa Lituanie repart également de Locarno avec le prix de la meilleure mise en scène et un prix collectif d’interprétation décerné à Noyade sèche de Laurynas Bareiša, un film sur la violence masculine dont nous avons souligné le style et l’intelligence. Le prix de la meilleure réalisation aurait également pu distinguer Cent mille milliards de Virgil Vernier, le joyau d’une représentation française curieusement dépouillé. La mélancolie de la jeunesse transparaît aussi, et avec un éclat particulier, dans ce film tourné à Monaco pendant la période des fêtes de Noël, décor brillant et vide où un jeune escort boy se lie d’amitié avec une petite fille riche, abandonnée par ses parents à une nounou qui veut lancer son entreprise de bien-être grâce aux pierres précieuses. Une poésie du conte se mêle à une réalité qu’on devine vaguement déprimante mais qui demeure, c’est le charme curieux du film et peut-être aussi sa faiblesse, un peu éthérée. Virgil Vernier a, en tout cas, un très beau regard, un véritable instinct de cinéaste.

« Drowning Dry » de Laurynas Bareiša a remporté le prix du meilleur réalisateur et un prix collectif d’interprétation. Production cinématographique d’Ulrich Seidl

L’impressionnant documentaire du cinéaste chinois Wang Bing, Jeunesse (Les Tourments)point d’orgue d’une compétition très inégale, n’a finalement reçu qu’une mention spéciale. Alors que l’autre grand cinéaste asiatique en lice, le Sud-Coréen Hong Sang-soo, est salué par son actrice fétiche, Kim Min-hee, pour Au bord du ruisseauun film présenté à la fin du festival et que nous n’avons pas pu voir.

Tournée vers le renouveau, notamment féminin, l’édition 2024 de Locarno a confirmé le festival suisse dans son rôle de pionnier, qui mériterait cependant d’être revendiqué avec plus d’audace et de radicalité. Confronté à de nouveaux défis économiques liés à la perte du soutien de la Direction du développement et de la coopération suisse, l’événement entre dans une période de changement qui pourrait avoir des répercussions positives, conduisant à la redéfinition d’une ligne toujours placée sous le signe de la curiosité, mais plus offensive.

LES PRIX

Léopard d’Or, Grand Prix du Festival et de la Ville de Locarno
Toxique (Akiplesa), de Saulé Bliuvaité

Prix ​​spécial du jury, villes d’Ascona et de Losone
Monde (Lune), par Kurdwin Ayub

Pardo pour la meilleure réalisation, ville et région de Locarno
Laurynas Bareiša pour Noyade sèche (Séses)

Désolé pour la meilleure performance
Gelminė Glemžaitė, Agnė Kaktaitė, Giedrius Kiela, Paulius Markevičius pour Noyade sèche (Séses) par Laurynas Bareiša

Désolé pour la meilleure performance
Kim Min-hee pour Au bord du ruisseau (Suyoocheon) par Hong Sang-soo

Mentions spéciales
Jeunesse (Les Tourments), Qing Chun (Ku)par Wang Bing
Je vous salue Marie de Mar Coll

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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