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le jour où la France a reculé son horloge d’une heure pour la première fois

Dans la nuit de ce samedi 26 octobre au dimanche 27 octobre 2024, l’heure d’été a passé le flambeau à l’heure d’hiver. Donc à 3 heures du matin il était… 14 heures. Bonne nouvelle pour les Français qui ont « mérité » une heure de sommeil supplémentaire ! Pour ce petit bonheur, c’est à l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing qu’ils peuvent dire merci.

« L’heure Giscard »

Historiquement, la France avait adopté l’heure d’été en 1917 avant de l’abandonner en 1945. En 1975, après le choc pétrolier de 1973, l’heure est à la chasse aux déchets et aux économies d’énergie. azimuts. D’où l’idée du président Valéry Giscard d’Estaing, avec d’autres dirigeants européens, de coller le plus possible au rythme du soleil pour limiter la facture énergétique liée à l’éclairage artificiel, avec la mise en place, en 1976, du changement d’heure.

Lancé dans une France qui « n’a pas de pétrole » mais qui « a des idées », et donc forcément baptisée « l’heure Giscard », le passage à l’heure d’été, alors parée de toutes les vertus écologiques, représente en même temps un retour à l’heure d’été. l’heure allemande de la sinistre mémoire. Imposé en 1940 par le régime nazi pendant l’Occupation pour harmoniser tous les pays du Reich, ce dernier fut abandonné après la victoire des Alliés.

« Heure, c’est le jour J ! » »

La mesure fut appliquée pour la première fois le dernier week-end de mars 1976 : il s’agissait du passage à l’heure d’été. « D’accord, alors, cette aiguille, est-ce qu’on la déplace en arrière ou en avant ? » Le vendredi 26 mars 1976, la Une de « Sud Ouest » détaillait pourtant les tenants et aboutissants de ce premier passage à l’heure d’été : « C’est donc ce soir, à minuit (mais rien n’interdit de le faire plus tôt) que les horloges doivent être avancé d’une heure. Fonctionnement très simple : il suffit de pousser la grande aiguille d’un tour complet, pour que nos horodateurs se mettent immédiatement à indiquer une heure du matin. À tel point qu’en nous levant dimanche, nous aurons dormi une heure… de moins. » Simple, non ?

« Avant l’heure, ce n’est pas l’heure, après l’heure, ce n’est pas l’heure »

Oui, mais pas pour tout le monde. A la télévision, sur TF1, Roger Gicquel s’y met. Avec une certaine gêne… Après le long monologue plus que sceptique et totalement confus du légendaire présentateur du journal télévisé de 20 heures, un reportage censé détailler les bienfaits énergétiques qui devraient découler de cette mesure, ne brûle pas non plus de conviction. .

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Vous avez dit « économies d’énergie » ?

Ultra controversée depuis sa mise en place en 1976, la mesure n’a cessé de déchirer la France, entre professionnels, en faveur des économies d’énergie et/ou des longues soirées d’été autour des apéritifs et des barbecues. , et les anti (tous les autres). D’autant que, dommage collatéral, le changement d’heure impose par la même occasion aux journalistes un nouveau « marronnier » à nourrir deux fois par an, et à l’époque, presque toutes les horloges devaient encore être réglées manuellement, montres et réveils dans la maison. .

Le 25 mars 1976, trois jours avant le premier passage à l’heure d’été qui devait avoir lieu le dimanche 28 mars, France 3 Bordeaux enquêtait sur les avantages et les inconvénients pour l’Aquitaine de ce changement d’heure un peu différent. sceptiques, économies d’énergie en électricité et en pétrole, diminution des accidents de la route… Dans une télévision trottoir, les passants estiment aussi que l’allongement de la durée du soleil favorisera les loisirs et bénéficiera au tourisme et à l’attractivité de la région. Bien vu.

«Malheurs et malheurs de «l’heure Giscard»

Avec quel résultat ? Le titre de la Une de « Sud Ouest », le vendredi 24 septembre 1976, à la veille du premier retour à l’heure d’hiver, donne le ton : le premier bilan de la mesure s’annonce plutôt mitigé. En dernière page, le journal publie les résultats de son enquête qui met en lumière la fracture entre le monde paysan et « les fonctionnaires ».


« Les horloges décalées de 60 minutes le dimanche matin : les fortunes et les malheurs de « l’heure Giscard » », titre la Une de « Sud Ouest » le 24 septembre.

Archives du Sud-Ouest

« S’il est encore difficile de se faire une opinion globale sur l’impact de cette décision, notamment sur les économies d’énergie, résume Sud Ouest, il semble certain que les salariés ont trouvé satisfaction en matière de loisirs. Nous publierons demain le témoignage des « responsables » mis en cause ci-dessous par les opérateurs de fruits et légumes. Ils saluent tous la disponibilité accrue qui leur permet de profiter davantage de la fin de journée. Avec quelques réserves sur le rythme des enfants : le report de l’extinction des lumières semble les avoir incités à s’endormir plus tard (comme nous l’a confirmé un directeur d’école). »

«C’est pour faire plaisir aux fonctionnaires»

Selon le quotidien, la plupart des agriculteurs « étaient hostiles aux temps nouveaux ». En calculant qu’avec l’heure d’été, ils travaillent une heure de plus, donc ils sont soulagés de revenir à l’heure d’hiver. Et si on leur demande, ils ne manquent pas non plus d’idées pour lutter autrement contre le gaspillage énergétique. « Si nous voulions faire des économies, il suffirait d’arrêter les programmes télévisés une heure plus tôt », suggère l’un d’eux, taquin (ou sincère ?). Inutile de dire qu’il n’avait (déjà) pas l’ombre d’une chance de le faire. être entendu.

« Il y aura un certain gain, mais petit »

On s’interroge aussi déjà sur les économies d’énergie promises, de 0,3% à 1% pour tous les secteurs de l’économie, soit l’équivalent de 100 000 à 30 000 tonnes de pétrole. Sont-ils réels ? « Il y aura un certain gain, mais petit », nuance dans « Sud Ouest » M. Vergniaud, chef de projet à la direction régionale Sud-Ouest d’EDF. En effet, avec un été 1976 caniculaire et particulièrement sec, « les frigos et les stations de pompage fonctionnaient à plein régime », explique-t-il. On comprend que l’électricien français se soit davantage préoccupé d’une sécheresse extraordinaire et du niveau des réserves d’eau des barrages hydroélectriques que de l’heure d’été.

Un producteur laitier, farouchement opposé à l’avancement des mains, pense que si on impose ce nouveau temps, « c’est pour faire plaisir aux fonctionnaires. En quittant les bureaux tôt, ils ont le temps d’aller se baigner ! » Bon, c’est fait. D’autres arguments concernent le sommeil des enfants. À juste titre. Avec l’heure d’été, « les enfants dorment moins », déplore M. Lafond, directeur de l’école primaire du Porge, en Gironde. Concédant toutefois que « pour nous qui sommes près de la mer, il y a un avantage égoïste : en juin, nous avons pu nager plus longtemps en fin de journée ». Avec les fonctionnaires, donc.

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Devenue culte, cette vidéo de l’INA finira-t-elle par entrer définitivement dans les archives de l’histoire ? Selon un rapport réalisé en 2017 par le Parlement européen, les économies d’énergie induites par le changement d’heure seraient en réalité minimes, alors que de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer ses effets néfastes sur la santé. « Le changement d’heure semestriel est nocif pour la santé », constatait l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV) le 22 mars 2019.

C’est pourquoi, le 27 mars 2019, le Parlement européen a voté la suppression à partir de 2021 du changement d’heure saisonnier, de plus en plus critiqué, les États membres devant choisir entre l’heure d’été et l’heure d’hiver. permanenté. Un choix non sans conséquences dans des domaines aussi variés que les transports ou la santé et qui ouvre un nouveau débat.

Les chefs d’État des membres de l’Union se sont prononcés en faveur de l’arrêt du changement d’heure, mais les élus des différents pays peinent à se mettre d’accord sur l’heure définitive à adopter. Plutôt heure d’hiver ou heure d’été ? Les avis divergent, provoquant un blocage au sein du Conseil européen, d’autant qu’avec la crise du Covid-19, le sujet a été mis de côté. Par ailleurs, la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine déclenchée par l’invasion de la Russie le 24 février 2022 a également mis au premier plan la question des économies d’énergie. Le changement d’heure est donc toujours d’actualité.

Cammile Bussière

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