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Le Japon veut manger de plus en plus de baleines

Arctic-Images / Getty Images Un juge groenlandais a prolongé mercredi 4 septembre de 28 jours la détention de Paul Watson, dont le Japon demande l’extradition pour une action sur un baleinier en 2010. (Photo d’illustration)

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Un juge groenlandais a prolongé mercredi 4 septembre de 28 jours la détention de Paul Watson, dont le Japon demande l’extradition pour une action sur un baleinier en 2010. (Photo d’illustration)

ENVIRONNEMENT – Autorités japonaises « Ils veulent m’utiliser comme exemple pour montrer que nous ne touchons pas à leur chasse à la baleine »Pour Paul Watson, fondateur de l’ONG Sea Shepherd, arrêté fin juillet au Groenland pour ses activités de protection des cétacés, la détermination du Japon à le juger s’inscrit dans une volonté de perpétuer une chasse baleinière ancestrale.

Emprisonné depuis plus d’un mois au Groenland, le militant américano-canadien de 73 ans restera encore 28 jours derrière les barreaux du centre pénitentiaire de Nuuk, a décidé mercredi 4 septembre la justice danoise. Le ministère danois de la Justice n’a pas encore commenté la demande d’extradition de Paul Watson formulée par le Japon pour une action sur un baleinier en 2010.

« Tradition » et « sécurité alimentaire »

L’arrestation de ce lanceur d’alerte, qui risque la prison à vie s’il est remis au Japon, est hautement politique. En effet, le gouvernement japonais justifie sur son site la chasse à la baleine au nom d’une tradition remontant au XIIe siècle. L’animal était tué pour sa viande mais aussi son huile, qui servait autrefois à l’éclairage, et ses os pour les outils.

Le Japon se souvient également d’une grave crise alimentaire survenue après la Seconde Guerre mondiale, que la viande de baleine lui a permis de surmonter, rappelle Ouest de la FranceDans un contexte de malnutrition et d’occupation américaine, de la viande de baleine bon marché était servie aux écoliers à la cantine, ajoute-t-il. Le mondeDes millions de Japonais ont donc grandi en consommant ce mammifère.

Autre argument avancé par les autorités japonaises : la « sécurité alimentaire »le pays ayant peu de ressources agricoles. Cet argument est incohérent, estime Nicola Beynon, responsable des campagnes de la branche australienne de la Humane Society International, une ONG de protection animale, interrogée par le magazine Marine et Océans. « Tuer des baleines qui vivent longtemps, se reproduisent lentement et sont soumises à une multitude de menaces anthropiques telles que le changement climatique et la pollution plastique ne contribuerait en rien à améliorer la sécurité alimentaire. »elle souligne.

Intensification de la chasse commerciale à la baleine

Contrairement à ce qu’affirme le gouvernement japonais, la viande de baleine est de moins en moins consommée par la population. Après un pic de 233 000 tonnes en 1962, les Japonais n’en consomment plus que 2 000 tonnes par an. Cela représente une quantité annuelle de 23,7 grammes par personne, selon l’association japonaise Ikan. Pour répondre à ce besoin, la « Les baleiniers japonais capturent désormais environ 250 à 300 individus par an et Tokyo achète également des baleines à l’Islande », note Vincent Ridoux, professeur de biologie et de communication scientifique à l’Université de La Rochelle, avec le HuffPost.

Malgré le manque évident d’appétit pour la viande de ce cétacé, le Japon est convaincu qu’il peut « pour redonner aux Japonais le goût de manger de la baleine », poursuit le spécialiste des mammifères marins. C’est pourquoi le Japon a lancé en mai 2024 un nouveau navire-usine, le Kangei MaruConçu pour la chasse intensive et lointaine. C’est ce bateau, parti en mission avec le triste objectif de tuer 200 cétacés en huit mois, que le capitaine Paul Watson voulait intercepter dans le Pacifique Nord, où se trouvent des sanctuaires de baleines. Il fut stoppé avant de l’atteindre.

Pour rentabiliser l’investissement d’un tel navire, coûtant 44 millions d’euros et très coûteux en carburant, « Des quotas de pêche importants sont nécessaires pour équilibrer les coûts d’exploitation »inquiète Vincent Ridoux. Pour gagner plus, le Japon a donc élargi les espèces pêchées en y ajoutant les rorquals communs, classés « vulnérable » par l’UICN. La liste des cétacés qui peuvent être chassés par ses baleiniers comprend également le rorqual boréal, une autre baleine « menacé ».

S’affranchir du droit international

La chasse intensive à la baleine paraît totalement incongrue au XXIe siècle. Elle fait l’objet depuis 1986 d’un moratoire adopté par la Commission baleinière internationale (CBI), visant à suspendre la chasse commerciale à la baleine pour permettre à l’espèce de se reconstituer.

« Jusqu’en 2018, le Japon faisait partie de la Commission baleinière internationale et utilisait l’argument de la pêche scientifique pour continuer à chasser les baleines »explique à la HuffPost Sophie Gambardella, spécialiste en droit de l’environnement au CNRS. Le pays va bel et bien détourner l’article 8 de la Convention baleinière pendant des décennies « capturer jusqu’à 1 300 baleines par an sous couvert de programmes scientifiques dans l’Antarctique et le Pacifique Nord. En réalité, ces baleines étaient ensuite commercialisées au Japon »ajoute Vincent Ridoux, également responsable scientifique de la délégation française à la CBI.

Cette chasse déguisée a duré 30 ans, jusqu’à ce que la Cour internationale de justice déclare qu’elle était illégale. « chasse scientifique »  » en 2014. Le Japon a d’abord tenté de redéfinir ses programmes de recherche avant de quitter définitivement la CBI en 2019.

Si le moratoire « a eu un effet bénéfique général » Parmi les populations les plus menacées, les baleines ne sont pas encore hors de danger, selon Vincent Ridoux. Toutes ne se portent pas bien, comme les « baleine bleue ou rorqual commun qui n’ont fait qu’un court voyage vers leur reconstitution »Si certaines populations ne parviennent pas à reconstituer leurs effectifs, comme la baleine noire, c’est aussi à cause d’autres menaces, comme « collisions avec des bateaux, pollution sonore »ou encore le changement climatique qui contribue à la raréfaction du phytoplancton, leur principale source de nourriture. Bref, tous les problèmes des baleines sont liés à l’homme et à ses activités commerciales.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

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