le groupe informatique réfléchit déjà à un nouveau sauvetage
Le tribunal de commerce de Nanterre doit valider ce mardi le plan de sauvegarde du groupe de services informatiques. L’effort financier reste insuffisant alors que les comptes se dégradent. Tous les acteurs se préparent à une deuxième restructuration.
Les nouveaux propriétaires d’Atos avaient l’air sombres ce mardi au tribunal de commerce de Nanterre. Le plan de sauvetage du groupe de services informatiques doit être validé après six mois de conciliation avec les créanciers et une procédure de sauvegarde accélérée. Enfin, la Cour rendra ses délibérations fin octobre.
Dans la foulée, une vingtaine de fonds d’investissement vont convertir 2,8 milliards de dettes – sur un total de 5 milliards – en actions pour prendre le contrôle d’Atos. Ils vont parallèlement prêter 1,75 milliard d’euros au groupe pour assurer sa survie. Mais ces nouveaux crédits risquent de l’étouffer. Les actionnaires ont appliqué des taux d’intérêt très élevés à Atos, de 10 à 13 %. Selon nos informations, le poids de la dette devrait s’élever à environ 260 millions d’euros dès l’année prochaine. Un poids énorme alors que les résultats du groupe ne cessent de se dégrader.
Début septembre, Atos a révisé à la baisse ses perspectives financières. Ses marges atteindront cette année 238 millions d’euros, soit 16% de moins que ce que prévoyait le groupe quatre mois plus tôt. Et en 2025, ils seront inférieurs de 25 % à ce qui était prévu au début de la restructuration. La dette, déjà lourde à supporter, sera trois fois supérieure aux marges à partir de 2026. Un niveau insoutenable qui risque de s’aggraver.
Le secteur des services informatiques dans son ensemble souffre. Face à l’inflation et au ralentissement de l’économie mondiale, les entreprises ont resserré leurs budgets. Les leaders français Cap Gemini et Sopra Steria prévoient désormais une baisse de leur chiffre d’affaires pour 2024. Difficile d’imaginer qu’Atos fera mieux. « Cap et Sopra leur volent de gros clients », assure un ancien dirigeant du groupe.
Un milliard de dettes en trop
Dans ces conditions, de nouvelles restructurations semblent inévitables. « Il faut effacer un milliard d’euros supplémentaire de dette », assure un créancier d’Atos.
«Il manquera surtout un milliard d’euros de cash», prédit un bon expert.
Atos a besoin d’un milliard de liquidités d’ici fin 2025 et après le coût de la dette, il ne restera plus grand-chose des 1,75 milliard d’euros de nouveaux prêts.
Cash, cash, cash : les banques du groupe n’ont que ce mot à la bouche. Après avoir perdu environ 150 millions d’euros chacune, les banques françaises vont rompre leurs liens avec Atos. BNP Paribas a déjà annoncé qu’il vendrait ses actions Atos et ne participerait pas à son financement. Les autres devraient suivre.
Le PDG d’Atos, Jean-Pierre Mustier, qui cédera sa place à Philippe Salle en février, a tenté de les retenir en septembre, en vain. Il sait que sans un banc français pour tenir la barre, le bateau risque de couler. Pour l’instant, seules Barclays et Deutsche Bank continueront d’assurer sa liquidité quotidienne. « Le groupe sera déconnecté des banques », reconnaît un proche des nouveaux actionnaires qui assure qu’ils restent néanmoins « sereins ».
Le démantèlement revient sur la table
Une période de survie en apnée inédite pour un grand groupe français, anciennement du Cac 40.
« Atos ne survivra pas à 2025, prédit l’un des négociateurs les plus impliqués dans la restructuration. Le groupe n’aura d’autre choix que d’être démantelé.
C’est à cela que se préparent tous les acteurs impliqués dans le dossier. Une scission entre, d’une part, les activités d’externalisation et, d’autre part, le cloud et la cybersécurité était envisagée il y a un an, avant la restructuration d’Atos. C’est là que se sont présentés les deux candidats au rachat du groupe, Daniel Kretinsky et David Layani. Le milliardaire tchèque lorgnait sur des activités historiques de gestion de l’information lorsque le fondateur de Onepoint ciblait les activités numériques et cloud. Ce scénario pourrait revenir.
« Daniel Kretinsky a tourné la page, assure un de ses proches. Atos est désormais trop dégradé pour être sauvé. »
En revanche, David Layani reste aux aguets. « Il regarde toujours le dossier si des actifs ont été vendus », reconnaît son entourage. Il devra s’entendre avec les nouveaux actionnaires d’Atos qu’il a licenciés en juillet alors qu’il devait reprendre avec eux le groupe.