Le gouvernement veut que les locataires les plus riches quittent leur HLM ; les associations rappellent que « le logement à vie » n’a « pas de réalité juridique »
A quelques semaines de la présentation d’un projet de loi sur le logement – qui devrait être dévoilé en mai en Conseil des ministres – le ministre chargé du Logement, Guillaume Kasbarian, a annoncé dans Les échoss, vendredi 12 avril, son intention de favoriser la sortie des logements sociaux des locataires ayant « bien dépassé les plafonds de revenus ». Il souhaite que les bailleurs sociaux procèdent à une évaluation régulière et obligatoire des « situation personnelle, financière et patrimoniale » locataires de logements sociaux.
« Quand on a 5,2 millions de logements sociaux en France et 1,8 million de ménages qui postulent légitimement pour y accéder, est-il normal qu’on les empêche d’y accéder alors qu’il y a des personnes au sein du logement social dont la situation a beaucoup changé depuis qu’on leur a attribué leur logement ? logement? », demande l’ancien président de la commission des affaires économiques à l’Assemblée. Selon Les échosGuillaume Kasbarian estime que plus de 8 % des locataires HLM ne seraient plus éligibles au logement social s’ils en faisaient la demande aujourd’hui.
« Il faut réexaminer la pertinence de continuer à occuper un logement social pour ceux qui ont largement dépassé les plafonds de revenus, ont pu hériter, possèdent parfois une résidence secondaire en leur possession et dont le patrimoine – et c’est le sens de la vie – a évolué « poursuit le ministre.
« Ne cédez pas à la démagogie »
Dans un communiqué, l’Union sociale pour l’habitat, dirigée par l’ancienne ministre écologiste Emmanuelle Cosse, appelle M. Kasbarian à « Ne cédez pas à la démagogie » soulignant que cela « la notion de « logement à vie », même si elle peut être efficace dans les médias, n’a aucune réalité juridique ».
Les locataires HLM doivent en effet déjà répondre annuellement à une « enquête sur les ressources » réalisées par les bailleurs sociaux pour attester de leur situation économique. Depuis l’adoption d’une loi en 2009, le bailleur social peut ainsi décider, si les locataires dépassent un certain plafond de ressources, d’augmenter le loyer ou de refuser de renouveler le bail. Seuls les locataires âgés de plus de 65 ans et les personnes handicapées sont exclus de ce dispositif. » Le ministre a raison de reconnaître la réalité de la file d’attente pour les demandes de logement social. Mais il est faux de considérer que c’est en précarisant les locataires des logements sociaux que l’on compensera les insuffisances de la politique du logement que l’on observe depuis 2017. »ajoute Mmoi Pod dans ce communiqué de presse.
« Il s’agit d’une attaque directe et profondément injuste contre les familles qui travaillent dans ce pays », a déploré sur son compte X la députée « insoumise » de Seine-Saint-Denis, Raquel Garrido, qui estime que « Les macronistes font tout pour que l’argent des revenus du travail aille dans les poches des plus riches ». Sur le même ton, la Confédération nationale du logement critique dans un message sur le projet gouvernemental, qui vise, selon l’association, à « dresser les classes populaires les unes contre les autres et épargner les plus riches et la spéculation immobilière ».
Examen du texte au Sénat en juin
Les dispositions annoncées par M. Kasbarian devraient être intégrées dans un projet de loi souhaité par l’exécutif comme un texte plus large favorisant le logement des classes moyennes et présenté en Conseil des ministres en mai, pour examen en première lecture au Sénat en juin.
Le texte doit aussi donner plus de pouvoir aux maires dans l’attribution des logements sociaux ou dans la décision de les vendre, a détaillé Guillaume Kasbarian. Le ministre du Logement s’est également engagé à maintenir « Objectifs cibles de 20 à 25 % de logements sociaux » dans les communes concernées par la loi SRU (solidarité et rénovation urbaine).
Le gouvernement souhaite néanmoins intégrer des logements intermédiaires, aux loyers plus élevés, dans les outils proposés aux communes manquant de nombre de résidences sociales pour compenser leur rendement. « Il y aura probablement (…) conditions qui seront fixées »M. Kasbarian a déclaré jeudi lors d’un point presse à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne), ajoutant que l’objectif du gouvernement était de« encourager les maires constructeurs », « Pas de chèque en blanc à ceux qui ne veulent pas construire ».