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le gouvernement persévère, les syndicats aiguisent leurs arguments

L’agitation ne le fera pas changer de cap sur l’essentiel : Gabriel Attal a confirmé ce jeudi 13 juin sur France Inter vouloir poursuivre sa réforme de l’assurance chômage. Alors qu’Emmanuel Macron se déclarait ouvert « aux conditions » la veille, lors de sa conférence de presse, le Premier ministre avait assuré qu’un décret « sera pris d’ici le 1er juillet pour cette réforme ».

Malgré les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, le gouvernement n’abandonne pas son projet. Celui-ci prévoit notamment de réduire la durée d’indemnisation de dix-huit à quinze mois pour les chômeurs de moins de 57 ans et de conditionner l’ouverture des droits à huit mois travaillés sur les vingt derniers, contre six sur vingt-quatre aujourd’hui.

Produire un contre-discours

De quoi agacer les syndicats, qui espéraient voir le projet suspendu jusqu’aux prochaines élections. « Le président dit s’appuyer sur le peuple avec la dissolution de l’Assemblée nationale mais maintient sa réforme par décret »a dénoncé Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, à l’issue de la conférence de presse présidentielle.

« Ces mesures visent à réaliser des économies sans précédent en réduisant uniquement les aides aux chômeurs.a pour sa part estimé Marylise Léon, la leader cédétiste. Ils interviennent surtout après plusieurs décrets ces dernières années, dont on ne peut pas encore mesurer l’impact. »

La précipitation et le manque de chiffres pour soutenir la réforme sont critiqués par l’ensemble des dirigeants syndicaux. Ensemble, ils cherchent désormais à combattre le projet sur ses mérites. Pour le président de la CFE-CGC, François Hommeril, puisqu’il est « difficile à mobiliser sur les questions de chômage, il faut opter pour une stratégie de résistance par l’intelligence ».

Des économies avant tout

Avant la dissolution surprise de l’Assemblée nationale par le président de la République, les cinq syndicats représentatifs (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC) avaient prévu de se réunir le 11 juin au Conseil économique, social et environnemental (Cese). faire entendre leurs positions et contrer « arguments d’autorité du gouvernement ».

Premièrement, l’idée selon laquelle un durcissement des règles en matière de chômage contribuerait à le réduire. Un point sur lequel tous les chercheurs présents ce jour-là étaient unanimes : « Aucune étude ne confirme que restreindre l’accès à l’assurance chômage entraîne une augmentation du volume de l’emploi. » a particulièrement souligné la sociologue du Centre d’études de l’emploi et du travail Claire Vivès, pointant le manque d’études sur les réformes antérieures.

« Moins d’un chômeur sur deux est indemnisé aujourd’hui, mais le lien entre indemnisation et difficulté à trouver un emploi n’est pas du tout évident »» confirme Bruno Coquet, économiste à l’OFCE et spécialiste du marché du travail.

De l’avis de la majorité des économistes présents, le gouvernement cherche en réalité plus à économiser de l’argent qu’à contribuer au plein emploi. Selon l’Unédic, celles-ci pourraient atteindre 5,4 milliards d’euros par an d’ici la fin de la décennie. Plus donc que l’objectif de 3,6 milliards d’euros avancé en mai par l’exécutif.

Le risque de précarité

Pour l’économiste Michael Zemmour, membre du Haut Conseil des Finances publiques, la principale conséquence de cette nouvelle réforme sera la précarité des personnes dont les indemnisations cesseront. « Chaque mois, 250 000 personnes ne bénéficieront plus de l’assurance chômage.il a calculé. Les jeunes, les seniors et les femmes seront les plus touchés. »

La consommation des ménages en sera la victime collatérale. « L’assurance chômage joue un rôle important dans la stabilité du niveau de consommation des Français »a en effet rappelé Bruno Coquet.

La question des qualifications professionnelles, très mise en avant par les syndicats, a également été soutenue par les experts. « Le risque avec des indemnisations trop faibles, c’est de pousser les chômeurs à accepter un emploi qui ne leur convient pas », exposé Bruno Coquet. Cela représente une perte considérable de capital humain. » L’économiste considère que le temps d’adaptation au poste ou le manque d’expérience appropriée sont autant d’obstacles à l’optimisation du capital humain.

Claire Vivès va encore plus loin. Selon elle, le durcissement des règles s’inscrit dans une stratégie de culpabilisation des chômeurs. « L’objectif est de délégitimer leurs revendications en termes de volume horaire, de salaire, de qualification… » Un point qui a fédéré toutes les dirigeantes syndicales et résumé par Cyril Chabanier, président de la CFTC : « Tout n’est pas mieux que le chômage. »

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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