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Le gouvernement donne un coup de pouce aux employeurs

« Un projet de justice qui protège contre l’usure professionnelle. » Répétée à l’envi depuis la présentation de la réforme, la phrase figure en bonne place dans les éléments du langage macroniste. Cependant, à y regarder de plus près, il reste encore un long chemin à parcourir. Première mesure vantée par l’exécutif, le développement du compte professionnel de prévention (C2P). Créé en 2014, ce dispositif ouvre la possibilité aux salariés de prendre leur retraite plus tôt (au maximum deux ans avant l’âge légal) à condition d’avoir cumulé suffisamment de points, répartis en fonction de leur exposition à des facteurs de pénibilité (travail de nuit, travail répétitif, extrême températures, etc).

Les employeurs se sont toujours moqués du C2P, jugé trop contraignant. En 2014, le Medef évoquait une « Dispositif kafkaïen, unique en Europe », « un non-sens économique » qui allait « augmenter le chômage ». Les récriminations ne tombent pas dans l’oreille d’un sourd : dès décembre 2017, le gouvernement d’Édouard Philippe s’est empressé de donner raison aux chefs d’entreprise, en éjectant quatre critères du compte pénibilité (agents chimiques dangereux, charge de manutention manuelle, postures contraignantes et vibrations mécaniques).

Depuis le début des consultations sur les retraites, les syndicats n’ont cessé de réclamer la réintroduction de ces facteurs, en vain. Au lieu d’élargir le C2P, l’exécutif demandera aux branches professionnelles d’identifier les métiers les plus exposés aux facteurs manquants et promet un suivi médical renforcé dès 45 ans, avec adaptation du poste de travail ou reconversion professionnelle. Ce qui semble très optimiste compte tenu des réalités du terrain. De plus, les salariés les plus exposés aux métiers difficiles auront droit à une visite médicale, pour prendre leur retraite plus tôt, mais seulement à partir de… 61 ans. « Il y a déjà une visite médicale à mi-carrière, à 45 ans, qui a beaucoup de sens, se demande Marielle Dumortier, médecin du travail. En ce moment, nous pouvons faire de la prévention. Mais à 61 ans, il est bien trop tard, si ce n’est pour constater que les salariés sont brisés par le travail. »

L’exécutif refuse de réintroduire les anciens critères de pénibilité dans le C2P, mais promet un abaissement des seuils d’exposition pour le travail de nuit (de 120 à 100 nuits par an) et le travail en équipes successives alternées. Objectif : permettre à 60 000 personnes supplémentaires de bénéficier du C2P chaque année. Serge Volkoff, statisticien et ergonome, considère que cela va dans le bon sens, même s’il ne peut « ni corroborer ni contredire » estimations du gouvernement. « En revanche, la non prise en compte des quatre critères supprimés me paraît problématique », il insiste.

Trous dans l’appareil

Des millions d’employés seront laissés pour compte. Dans une étude datée d’août 2022, la Dares dresse un bilan du nombre de travailleurs exposés aux différents facteurs de pénibilité dans notre pays. Bien qu’il ne s’agisse que d’une estimation, basée sur un large échantillon d’employés, les résultats sont glaçants. Par exemple, 1,7 million de salariés sont impliqués dans la manutention de charges lourdes ; 9,9 millions par des postures douloureuses ; et 1,7 million par vibrations mécaniques. Au total, la Dares estime que 13,6 millions de personnes, soit 61% des salariés, seraient exposées à au moins un facteur de pénibilité ! Or, seuls 1,9 million de personnes sont désormais couvertes par le C2P, ce qui donne une idée de l’ampleur des trous du système… et relativise le chiffre de 60 000 bénéficiaires supplémentaires avancé par l’exécutif.

Pour marquer les esprits, ce dernier annonce le lancement d’un nouvel appareil. Un fonds d’investissement doté d’un milliard d’euros sur cinq ans (soit environ 250 millions d’euros par an) sera chargé de « financer des actions de prévention auprès des employeurs (sensibilisation, adaptation des postes de travail, reconversion, etc.) au profit des salariés » exposés aux critères de pénibilité supprimés. A priori, Serge Volkoff juge positif d’injecter de l’argent pour faire face à la pénibilité, mais il met en garde contre les effets d’annonce : « Cela dépendra des modalités d’action concrètes de ce fonds, précise-t-il. Dans les entreprises où la politique de prévention est mal suivie et mal coordonnée, cela peut conduire au financement de mesures un peu cosmétiques. Exemple : installer un convoyeur pour charges lourdes (1) ne sert à rien si l’organisation du travail et son intensité ne permettent pas aux salariés de l’utiliser dans de bonnes conditions. »

Jean-Claude Delgènes, fondateur de la firme Technologia, est tout aussi réservé : « J’ai surtout l’impression que l’exécutif cherche à construire un dispositif visant à faire accepter le recul de l’âge légal. Plutôt que d’hésiter sur un chiffre, il aurait mieux valu dresser un inventaire précis des besoins réels en matière de formation et d’adaptation des conditions de travail, pour voir ensuite comment ils sont financés… »


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Cammile Bussière

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