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Le gouvernement de Javier Milei porte atteinte à la mémoire de la dictature

« Les gens du gouvernement ne veulent pas de l’Université nationale des Mères de la Place de Mai, parce qu’ils sont des négationnistes de l’Holocauste et des défenseurs de la dernière dictature.»« C’est ce que dit, furieuse, lundi 2 septembre, Cristina Caamano, directrice de cette université de Buenos Aires. Elle vient de quitter l’établissement, après y avoir été retenue plusieurs heures par la police.

La police a bouclé l’entrée du bâtiment dans la matinée, officiellement pour des raisons de sécurité liées à l’entretien du bâtiment, avant de se retirer en fin d’après-midi face à la pression populaire, à l’appel des Mères de la Place de Mai. Fondatrice de cette université, cette association est depuis 1977 une figure de la lutte pour la mémoire des crimes de la dictature (1976-1983). Un combat plus que jamais d’actualité face à l’effort révisionniste du gouvernement de Javier Milei.

Un démantèlement orchestré des politiques de mémoire

Car, depuis son arrivée au pouvoir en décembre 2023, le président argentin s’emploie à saper les efforts des gouvernements précédents, notamment depuis Nestor Kirchner (2003-2007). Le 14 août, le gouvernement a fermé l’unité spéciale chargée d’enquêter sur les disparitions d’enfants de la Conadi (Commission nationale pour le droit à l’identité), créée en 2004. À ce jour, seuls 137 des quelque 500 bébés volés aux opposants par la dictature ont pu retrouver leur identité.

Le 11 juillet, six députés de La Libertad Avanza (LLA), le parti du président, ont provoqué un scandale après avoir rendu visite à des criminels du régime militaire enfermés dans la prison d’Ezeiza. La présidente de la Ligue argentine des droits de l’homme, Iris Pereyra de Avellaneda, 85 ans, victime de la dictature, proteste contre le fait que les autorités argentines ont ordonné la fermeture de la prison d’Ezeiza. « Les députés de La Libertad Avanza (sont allés) rendre visite aux génocidaires en prison« .

Mais ce n’est pas tout. Car le pouvoir entrave les processus de mémoire et de recherche comme jamais auparavant. « Le gouvernement avance dans le démantèlement des politiques (et sites, NDLR) de mémoire qui a fait de l’Argentine une référence mondiale en la matière »Veronica Torras, directrice de Memoria Abierta, une alliance argentine d’ONG de défense des droits de l’homme. Elle énumère, entre autres, « le démantèlement des programmes gouvernementaux et des secteurs responsables de ce problème », « le licenciement du personnel » concerné, et « obstruction à l’accès aux archives stratégiques pour les enquêtes judiciaires et historiques. »

Cinq militaires de la dictature jugés lors d’un nouveau procès

Javier Milei tente d’éviter ce sujet brûlant, qu’il considère comme étant à l’ordre du jour de sa vice-présidente, Victoria Villarruel, qui avait déclaré en mars  » voulant trouver une solution légale  » pour les prisonniers liés aux crimes de la dictature. Cet avocat de profession a fait « le combat de sa vie »comme elle l’a encore assuré le 27 août lors d’un hommage aux victimes du « terrorisme » au Sénat, préférant s’attaquer aux crimes déjà jugés par les Montoneros, une organisation péroniste prônant la lutte armée dans les années 1970.

En octobre 2023, en pleine campagne, le futur président avait jugé à la légère les crimes de la dictature, les qualifiant « d’excès »avant d’estimer « inventé » Le chiffre généralement admis de 30 000 disparus a été ramené à 30 000 le 25 mars, à l’occasion de la Journée nationale du souvenir. En attendant, la justice suit son cours. Mardi 27 août, a eu lieu la première audience du procès de cinq militaires de la dictature jugés pour crimes contre l’humanité contre 133 victimes. Iris Pereyra de Avellaneda est venue y assister. Elle sait qu’avec « Villarruel (qui) essaie de les faire sortir de prison, tout sera deux fois plus dur. »

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La mémoire à l’épreuve en Argentine

Selon les organisations de défense des droits de l’homme, la dictature argentine (1976-1983) aurait fait 30 000 victimes. Ce chiffre, basé sur des rapports et des estimations officielles mais partielles, est devenu un symbole du travail de mémoire après le retour de la démocratie en Argentine.

Depuis la reprise en 2006 des procès pour crimes commis sous la dictature – après une période d’amnistie dans les années 1990 –, 1 221 personnes ont été condamnées et quelque 660 personnes sont actuellement en détention, selon les données de la justice argentine. En outre, plusieurs dizaines de procédures sont toujours en cours.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

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