Sciences et technologies

Le dipneuste sud-américain, un « fossile vivant » au génome XXL

Le dipneuste sud-américain (Lepidosiren paradoxa) détient le record du plus grand génome animal.

Trente fois la taille du génome humain. C’est la dimension vertigineuse du génome du dipneuste sud-américain, séquencé par une équipe internationale, qui a publié ses résultats le 14 août dans la revue scientifique Nature.

Les dipneustes sont des poissons qui ont conservé des caractéristiques très proches de celles de l’ancêtre des tétrapodes, ces animaux à quatre membres dont nous faisons partie, aux côtés des amphibiens, des reptiles, des oiseaux et d’autres mammifères. Il y a environ 400 millions d’années, un poisson s’extirpait de l’eau, à l’aide de nageoires articulées, ancêtres de nos bras. Il était capable de respirer à l’air libre. En étudiant les dipneustes, les scientifiques cherchent à comprendre comment s’est déroulée cette transition de l’eau à la terre, et à l’air libre.

En 2021, la même équipe a séquencé le génome du dipneuste australien, quinze fois plus gros que celui de l’homme. Cette fois, ils se sont attaqués à celui des deux autres espèces, le dipneuste sud-américain et le dipneuste africain. Et c’est le sud-américain qui détient désormais le record du plus grand génome animal connu : 91 milliards de paires de bases. « Dix-huit de ses dix-neuf chromosomes pourraient chacun contenir l’intégralité du génome humain », « Cela reste surprenant », déclare Axel Meyer, professeur de biologie évolutive à l’Université de Constance en Allemagne et dernier auteur de l’étude. « C’est une prouesse technique »explique Hugues Roest Crollius, directeur du laboratoire Dyogen, spécialisé en génomique évolutive à l’Ecole Normale Supérieure de Paris, qui n’a pas participé à l’étude.

Le mystère de l’évolution

Ce qui fait croître les génomes des dipneustes, ce sont des transposons, des séquences d’ADN répétées qui sont mobiles et capables de se multiplier d’elles-mêmes. « Ce sont de petits morceaux d’ADN qui vont sauter d’une partie du chromosome à une autre. »explique Domitille Chalopin, co-auteure et chercheuse spécialiste des éléments transposables à l’université de Bordeaux. Comme des morceaux de phrases copiés-collés à l’infini dans le livre du génome, sans aucun lien avec la phrase dans laquelle ils se trouvent. Comme si un écrivain avait perdu le contrôle des touches copier-coller de son clavier.

« Pourquoi l’évolution n’a-t-elle pas agi contre des génomes aussi grands ?demande Axel Meyer. Ce n’est pas très clair. Chaque cellule doit fabriquer 91 milliards de paires de bases. Le noyau et la cellule elle-même doivent être très gros. Cela coûte de l’énergie à l’animal.

Normalement, des mécanismes de régulation limitent l’expansion de ces transposons. De petits ARN et des protéines spécialisées les empêchent de sauter. Mais les auteurs ont observé que ces éléments de contrôle sont moins abondants chez le dipneuste sud-américain, ce qui pourrait expliquer le gigantisme de son génome, constitué à 90 % de ces séquences répétées. Les chercheurs montrent que ces éléments transposables sont toujours actifs. « Ils sont encore capables de se multiplier, et il y a donc une accélération de l’expansion du génome », explique Domitille Chalopin.

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Jewel Beaujolie

I am a fashion designer in the past and I currently write in the fields of fashion, cosmetics, body care and women in general. I am interested in family matters and everything related to maternal, child and family health.
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