EXCLUSIF – A l’occasion du Sommet des Leaders à New York, le Pacte Mondial de l’ONU dévoile son premier baromètre européen de connaissance et d’intégration des Objectifs de Développement Durable par les entreprises du Vieux Continent.
Longtemps considéré comme une contrainte, le développement durable séduit désormais. Lancés en 2015 par l’Organisation des Nations unies (ONU), les dix-sept Objectifs de développement durable (ODD) ont fait du chemin. Notamment dans le secteur privé. Au point qu’aujourd’hui, 58 % des entreprises européennes qui les ont adoptés constatent un impact positif sur leur performance économique, voire un avantage comparatif par rapport à leurs concurrents.
C’est le constat du premier baromètre européen de connaissance et d’intégration des ODD par les entreprises, réalisé par le Pacte Mondial de l’ONU et révélé en exclusivité par Le FigaroLe réseau français de cet organisme onusien – chargé d’encourager les professionnels du monde entier à adopter une attitude et des pratiques socialement responsables – s’est associé aux réseaux bulgare, espagnol, grec, irlandais, italien, serbe, suisse, turc et britannique pour réaliser cette grande étude à laquelle 1 422 entreprises de toutes tailles ont répondu.
Et les résultats sont clairs. « La connaissance des ODD – cette articulation du social, de l’environnemental et de l’économique – continue de croître »se réjouit Nils Pedersen, délégué général du Réseau France du Pacte Mondial de l’ONU, qui regroupe plus de 2 000 entreprises françaises. Mais surtout, l’opportunité que représente une trajectoire durable devient une réalité. 58 % des entreprises ayant intégré les ODD ou les principes de durabilité estiment qu’il y a eu un impact positif sur leur performance économique, et même que cette dernière a été considérablement améliorée pour 26 % d’entre elles. Seuls 1 % des répondants considèrent ces effets comme négatifs.
De plus, quatre entreprises sur cinq constatent avoir développé un avantage comparatif clair après avoir volontairement respecté ces dix-sept principes cardinaux. « Aujourd’hui, il y a une vraie volonté d’agir. Le secteur privé européen a compris qu’il ne peut pas gagner dans un monde qui perd. Pour performer, une entreprise doit se transformer durablement. »sourit Nils Pedersen.
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La fraîcheur française
En revanche, cet enthousiasme est moins partagé par les professionnels en France. Seules 13 % des entreprises françaises ont constaté une amélioration considérable de leurs performances économiques, soit deux fois moins que la moyenne européenne (26 %) et cinq fois moins que les entreprises britanniques et irlandaises (62 %). Il en va de même pour un avantage comparatif évident, 20 % des entreprises françaises l’observant, contre 42 % pour le reste du continent. De quoi faire dire aux auteurs de l’étude : « Les entreprises françaises sont plus prudentes que celles des autres pays européens quant à l’amélioration de leurs performances économiques ou de leurs avantages comparatifs grâce à l’intégration des ODD ».
Outre cet intérêt économique en fin de compteParmi les principales raisons évoquées par les entreprises pour justifier l’intégration des ODD dans leurs activités, on trouve la volonté de dynamiser la démarche RSE, de répondre aux attentes des clients, la conviction personnelle du dirigeant, le désir de se démarquer des concurrents ou encore de mieux se conformer aux réglementations. Concrètement, les entreprises européennes se concentrent principalement sur l’égalité des sexes, la croissance économique durable, l’atténuation du changement climatique, la promotion de la santé et l’éducation de qualité. En revanche, d’autres ODD sont plus délaissés et font l’objet de moins d’actions de la part des professionnels, notamment la préservation des océans, la sécurité alimentaire et les villes durables.
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Seuls 17 % des ODD sont atteints dans le monde
Alors que le Vieux Continent dans son ensemble se porte bien, avec une intégration remarquable des ODD dans 79 % des sociétés, le reste du monde est dans une situation plus défavorable. « À l’échelle mondiale, seuls 17 % des ODD ont été atteints, alors que l’échéance est 2030 »rappelle le responsable du réseau France. En outre, « Une part importante (un quart, ndlr) des entreprises européennes ne mesurent ni n’évaluent encore d’aucune façon leur contribution à la durabilité »Le baromètre le souligne. Et parmi celles qui le font, seules 18% ont déjà atteint leurs objectifs. A cela s’ajoute une dichotomie entre grands groupes et TPE sur le sol européen. Une « part significative de 21% » de ces dernières n’ont toujours pas mis en place de stratégie durable, quand 86% des grandes entreprises l’ont fait.
Une inertie que le Pacte Mondial des Nations Unies tente de surmonter depuis 2023 avec l’initiative « Avancer plus vite » (Ou « avancer plus vite » (en français), appelant les professionnels à renforcer leur engagement en menant des actions concrètes et responsables dans cinq domaines prioritaires : les salaires décents, l’égalité des sexes, le climat et l’eau et la finance durable.
Pourtant, le développement durable est une affaire courante. « Aussi exemplaire soit-il, un pays est interconnecté avec les autres. Les enjeux sociaux et climatiques ne sont pas nationaux. Si nous continuons à ignorer ce qui se passe ailleurs dans le monde, nous échouerons. Chaque acteur doit intégrer cela et le transmettre à chaque maillon de sa chaîne de valeur. »rappelle Niels Pedersen. Mais aujourd’hui, seules 11 % des entreprises interrogées déclarent avoir formé leurs fournisseurs aux questions de durabilité et aux ODD. Cela permet pourtant de minimiser les risques d’externalités négatives et les impacts globaux de leurs activités.