Divertissement

le dernier rêve de l’héritier

Sur son lit de mort, elle lui avait fait promettre d’entretenir la flamme Kennedy. « Ne prends pas le mauvais chemin, mon fils chéri. Tu es le prochain président américain », lui avait murmuré Jackie, comme un testament final. Mais John-John avait d’autres ambitions. Lesquelles ? Il n’en était pas sûr. En tout cas, pas de rêve de Maison-Blanche. Plus jeune, il voulait être acteur, mais il avait été freiné dans ses premiers pas sur scène par la désapprobation de sa mère. Alors pourquoi pas un baron de la presse ?

Le milieu ne lui est pas étranger, lui qui a toujours vu la vie de sa famille, puis la sienne, sur papier glacé. Son projet, un magazine qui mêlerait politique et glamour, pop culture et enquête. Mais aucun éditeur ne prend au sérieux l’héritier de JFK, plus remarqué et remarquable pour ses pectoraux que pour sa matière grise. Seul Daniel Filipacchi – à la tête du plus grand groupe de presse français, dont Paris Match est le fleuron – se dit prêt à lui donner sa chance.

En mars 1999, John s'est blessé lors d'une activité de parachute ascensionnel. Il marchait encore avec des béquilles quelques jours avant sa mort.

En mars 1999, John s’est blessé lors d’une activité de parachute ascensionnel. Il marchait encore avec des béquilles quelques jours avant sa mort.

GETTY IMAGES / © Ron GALELLA / COLLECTION RON GALELLA

En visite dans les bureaux de Paris Match, John Jr charme tout le monde

En février 1995, John Fitzgerald Kennedy Jr. débarque à Paris, accompagné de son ami et associé, Michael Berman. A l’aéroport de Roissy, il est accueilli comme une véritable rock star. « On n’a jamais vu autant de femmes s’évanouir depuis l’arrivée des Beatles en 1964 », raconte la romancière Stéphanie des Horts dans son nouveau livre, « Carolyn et John ». Au 63, avenue des Champs-Élysées – l’adresse de Paris Match pendant plusieurs décennies -, John séduit tout le monde, de la secrétaire aux directeurs de rédaction.

John-John et Olivier Royant – qui deviendra plus tard directeur éditorial de Paris Match – lors du dîner annuel des correspondants de presse à la Maison Blanche, le 4 mai 1996.

John-John et Olivier Royant – qui deviendra plus tard directeur éditorial de Paris Match – lors du dîner annuel des correspondants de presse à la Maison Blanche, le 4 mai 1996.

© DR

Filipacchi est ravi : avec un Kennedy dans l’équation, ce magazine ne peut qu’être un succès. Il s’appellera « George » et sur la couverture du premier numéro – lancé le 7 septembre 1995 – Cindy Crawford pose en première présidente des États-Unis, avec une perruque poudrée et un ascot. Les gros titres affichent une interview du gouverneur de l’Alabama, une autre avec Madonna jouant « If I Were President… ». La rédaction de « George » déménage au quarante et unième étage du Paramount Plaza, au cœur de Broadway, où Filipacchi a établi sa filiale américaine.

Cindy Crawford pose sur la couverture du premier numéro de

Cindy Crawford pose sur la couverture du premier numéro de « George », lancé en septembre 1995.

ABACA / © TNS

John est l’attraction du bâtiment. Chaque matin, lorsqu’il arrive à vélo, béret noir enfoncé jusqu’aux oreilles, les gens se pressent dans le hall pour tenter de l’apercevoir. Les filles de « Elle » – à l’étage au-dessus – font tout pour être dans l’ascenseur avec lui. Mais John ne remarque même pas leur flirt. Son esprit est trop occupé avec « George ». Et puis il y a Carolyn Bessette, sa fiancée, omniprésente, à la maison comme au bureau. Ancienne chargée des relations publiques chez Calvin Klein, elle veut avoir le dernier mot sur la ligne artistique. Ce qui ne manque pas d’agacer Michael Berman, jaloux de l’influence de la nouvelle Mrs Kennedy.

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Pour rester en forme, John-John se rendait au journal à vélo.

Pour rester en forme, John-John se rendait au journal à vélo.

GETTY IMAGES / © Lawrence SCHWARTZWALD/SYGMA

Carolyn veut avoir le dernier mot sur la ligne artistique, ce qui ne manque pas d’agacer

Les célébrités n’hésitent pas à poser en couverture de « George » : Barbra Streisand, Harrison Ford, Demi Moore, Ben Stiller… Mais les ventes s’effondrent rapidement. Ce qui devait être la poule aux œufs d’or de Filipacchi ne fait que perdre de l’argent, à une époque où la presse magazine est à son apogée. John ne semble pas saisir l’air du temps : il refuse de se mêler des scandales, de parler de « l’affaire Monica Lewinsky » dans ses pages… Incompréhensible pour les actionnaires qui exigent alors qu’il se mette en scène avec Carolyn : « C’est toi que les lecteurs veulent voir ! » Refus catégorique, une fois de plus.

En juin 1999, à Fairfield dans le New Jersey, à bord du tout nouveau Piper Saratoga II, aux commandes duquel il disparaît en mer le 16 juillet 1999, au large de Martha's Vineyard dans le Massachusetts.

En juin 1999, à Fairfield dans le New Jersey, à bord du tout nouveau Piper Saratoga II, aux commandes duquel il disparaît en mer le 16 juillet 1999, au large de Martha’s Vineyard dans le Massachusetts.

© ABACA PRESS

Après la tragédie, Paris Match a dédié la couverture de son numéro 2618 à John F. Kennedy Jr.

Après la tragédie, Paris Match a dédié la couverture de son numéro 2618 à John F. Kennedy Jr.

© Paris Match

L’aventure éditoriale tourne court le 16 juillet 1999 : l’avion piloté par John – et à bord duquel voyageaient Carolyn et sa sœur, Lauren – s’écrase au large de Martha’s Vineyard. Les trois corps sont retrouvés quatre jours plus tard, toujours sanglés à leurs sièges, le visage marqué par la terreur. Caroline Kennedy – la sœur de John – veut garder « George » en vie, mais la plupart des collaborateurs sont inconsolables, comme des orphelins. En janvier 2001, un dernier numéro paraît, avec John-John en couverture. « ‘George’ doit tout à Filipacchi et Jean-Luc Lagardère. Moi-même, je n’aurais certainement pas pu écrire ce livre sans plonger dans les archives de Paris Match, qui m’ont été ouvertes », raconte Stéphanie des Horts. Kennedy et Match, une seule et même histoire.

La première page du

La première page du « Daily News » du 18 juillet 1999 annonçant la disparition du couple, dont les corps n’avaient pas encore été retrouvés.

GETTY IMAGES / © NY DAILY NEWS

« Carolyn et John », par Stéphanie des Horts, éd.  Albin Michel, 288 pages, 21,80 euros.

« Carolyn et John », par Stéphanie des Horts, éd. Albin Michel, 288 pages, 21,80 euros.

© DR

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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