Le défi de Donald Trump envers les institutions des États-Unis
toiUn peu plus d’une semaine après sa nette victoire à l’élection présidentielle du 5 novembre, les premières décisions du président élu Donald Trump confirment les craintes que pourrait susciter son prochain retour à la Maison Blanche. Ramené au pouvoir par le désaveu qui a sanctionné le bilan de l’administration démocrate sortante, le Républicain interprète son succès comme un chèque en blanc.
Donald Trump a ainsi exhorté les sénateurs de son parti, redevenu majoritaire à la Haute Assemblée, à renoncer à leur pouvoir de confirmer les personnes choisies pour occuper les plus hautes fonctions de son administration. Cette initiative n’est pas seulement contestable car elle brouille le principe de séparation des pouvoirs. Habituellement exigeantes, les séances de confirmation constituent un excellent exercice démocratique et servent utilement de corde de rappel pour éviter la promotion de personnalités douteuses.
On comprend les raisons de cette demande, à la lecture de certains noms communiqués le 13 novembre par Donald Trump, pour lesquels le critère de sélection qui se dégage est l’allégeance aveugle plutôt que la compétence. C’est ainsi que Pete Hegseth, animateur de la chaîne conservatrice Fox News qui a longtemps fait de la complaisance républicaine sa seule ligne éditoriale, a été proposé au poste de secrétaire à la Défense. Ce poste prestigieux est traditionnellement occupé par de grands serviteurs des Etats-Unis auxquels cet ancien militaire ne peut se comparer.
Outrage réclamé
Le choix de l’ancien représentant démocrate Tulsi Gabbard, qui a également travaillé pour Fox News, à la tête du renseignement national, soit dix-huit agences de renseignement, suscite la même inquiétude. Le manque de qualification de cette dernière pour un domaine aussi sensible pose question, à l’image de ses déclarations passées, erratiques, aux accents de théories du complot, ou de sa bienveillance à l’égard de la Russie et de ses alliés.
La proposition du représentant de Floride Matt Gaetz au poste de procureur général des États-Unis, autrement dit ministre de la Justice, est tout aussi étonnante. Il s’agit d’un homme qui fait l’objet d’une enquête du comité d’éthique bipartite de la Chambre des représentants pour erreurs personnelles, et qui s’est surtout illustré par sa capacité à rendre la Chambre des représentants ingouvernable depuis que le Parti républicain y a obtenu la majorité. en 2022.
Le même motif, un mépris revendiqué des piliers institutionnels américains, expliquait déjà le choix de l’homme le plus riche du pays, Elon Musk, dont les entreprises bénéficient largement des contrats fédéraux, pour diriger une « commission hache » externe au cabinet pour éviter d’éventuelles L’écueil du Sénat, visant à réduire les dépenses et les règles de l’administration fédérale.
Il faut être stupide ou ignorant (ou les deux) pour se réjouir de la désignation d’un homme identifié à un réseau social devenu un puissant vecteur de désinformation, ce poison des démocraties. Il faut être tout aussi stupide et ignorant pour ne pas voir dans ces choix la tentation de Donald Trump de régler ses comptes avec les rouages du gouvernement fédéral avec lequel il a eu du mal lors de son premier mandat. La vengeance ne constitue cependant pas une feuille de route présidentielle. Il est impératif que les républicains du Sénat le lui rappellent.