le conseil d’administration choisit l’offre de Onepoint plutôt que Kretinsky
Le verdict est enfin tombé pour Atos: le conseil d’administration du groupe informatique français très endetté a choisi mardi l’offre de rachat du consortium mené par Onepoint, son principal actionnaire, au détriment de celle du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.
« Atos travaillera avec le consortium Onepoint pour parvenir à un accord définitif de restructuration financière qui sera ensuite mis en œuvre via une procédure accélérée dédiée d’ici juillet 2024. »a déclaré le groupe informatique dans un communiqué de presse.
Partenaire informatique mondial du Comité International Olympique (CIO) depuis 2002, Atos sera l’un des piliers technologiques des Jeux Olympiques de Paris 2024 à travers la gestion des accréditations, la diffusion instantanée des résultats et les problématiques de cybersécurité.
Englué dans une crise financière depuis près de trois ans, Atos a engagé en février une procédure de restructuration.
L’entreprise avait annoncé avoir besoin de 1,1 milliard d’euros de liquidités pour 2024-2025 et souhaitait réduire sa dette brute de 3,2 milliards d’euros, qui atteint 4,8 milliards d’euros, pour sauvegarder son activité.
En concurrence avec celle de l’EPEI, de l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky, allié au fonds Attestor, l’offre menée par David Layani, patron de Onepoint, allié à l’homme d’affaires Walter Butler, à la société Econocom et aux créanciers, a finalement remporté son bras de fer après un intense bataille en coulisses.
Son offre prévoit notamment une annulation de dette de 2,9 milliards d’euros, à convertir en fonds propres.
Chute en bourse
A la Bourse de Paris, Atos a chuté de plus de 15%, son titre clôturant à 0,97 euro, suite à cette annonce. L’opération entraînera «dilution massive» pour les actionnaires existants, qui détiendraient « moins de 0,1 % du capital social »a prévenu l’entreprise.
Après avoir échoué à racheter les activités stratégiques du groupe en 2022 et être devenu le premier actionnaire d’Atos, David Layani a réussi à reprendre le géant de l’informatique aux 100 000 salariés.
« Pleinement mobilisé pour qu’Atos redevienne un acteur majeur de la souveraineté numérique française et européenne sur la scène internationale »David Layani a déclaré dans un communiqué.
Implantée dans 16 pays, la société Onepoint, qui compte 3.300 salariés et revendique un chiffre d’affaires de 500 millions d’euros, apparaît pourtant comme un petit poucet comparé à Daniel Kretinsky, à la tête d’un empire de l’énergie, de la distribution et des médias, et d’une fortune de 8,6 milliards d’euros, selon Forbes.
Le milliardaire tchèque, qui était en discussion depuis longtemps pour racheter une partie d’Atos avant l’échec des négociations en février, a révisé son offre à deux reprises, sans succès.
Il s’agit d’un premier échec dans l’ascension du milliardaire, qui devrait reprendre le groupe postal britannique en difficulté Royal Mail, après avoir récemment acquis 20% des activités sidérurgiques du sidérurgiste allemand Thyssenkrupp ou pris le contrôle du distributeur français Casino.
« Pas épuisé »
Avant la dissolution de l’Assemblée nationale annoncée dimanche, l’État français a répété à plusieurs reprises sa volonté d’acquérir les activités d’Atos jugées « stratégique » (supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire, contrats avec l’armée française et produits de cybersécurité), pour qu’ils ne tombent pas entre les mains d’acteurs étrangers.
Le cabinet du ministre de l’Économie Bruno Le Maire a indiqué mardi à l’AFP qu’un « offre plus précise » serait remis « dans les jours à venir ». Le travail continue « avec les partenaires pour finaliser le consortium et la reprise des sous-éléments » avec « courant juillet » comme objectif.
« Nous ferons tout pour protéger la partie des actifs dits ultrasensibles, mais nous serons très vigilants pour qu’ils ne soient pas bradés »a déclaré David Layani dans un entretien aux Echos.
Dans la soirée, Atos a annoncé des négociations exclusives avec le groupe d’ingénierie français Alten pour céder sa filiale stratégique Worldgrid, qui conçoit des systèmes de contrôle pour les centrales nucléaires, notamment pour EDF.
L’émission d’une offre en vue d’acquérir 100% des succursales « Informatique avancée », « Systèmes critiques pour la mission » (MCS) et activités de cybersécurité, pour une valeur estimée « entre 700 millions et 1 milliard d’euros »était attendu pour la mi-juin, a également indiqué Atos.
Le ministère français de l’Économie a également accordé un prêt de 50 millions d’euros à l’entreprise et acquis un « action de préférence » lui permettant d’opposer son veto à certaines opérations au niveau de Bull, la filiale qui construit ses supercalculateurs.