Le compte à rebours pour le premier vol d’Ariane 6 commence – 09/07/2024 à 17h15
La fusée Ariane 6 sur son pas de tir au centre spatial de Kourou, le 9 juillet 2024 en Guyane française (AFP / jody amiet)
Le compte à rebours final a commencé : avec quatre ans de retard, la fusée Ariane 6 doit décoller pour la première fois mardi au-dessus de la jungle guyanaise, emportant avec elle les espoirs de l’Europe de retrouver un accès indépendant à l’espace.
Le lancement n’est finalement pas prévu avant 16h00 (19h00 GMT) au lieu de 15h00, en raison d’un problème mineur d’installations au sol, qui a été résolu, a indiqué l’Agence spatiale européenne (ESA) sur X.
Aux premières lueurs du jour au Centre spatial guyanais (CSG) de Kourou, le portique mobile, vaste cathédrale de 90 mètres de haut qui abrite la fusée, a été lentement retiré sous une pluie fine, dévoilant la fusée de 56 mètres, a constaté un journaliste de l’AFP.
Fiche de présentation du lanceur européen Ariane 6 (AFP / Gal ROMA)
Un nouveau bulletin météo à 10h00 a donné le « GO pour le remplissage », a annoncé l’ESA.
L’opération, qui dure une heure et demie, consiste à remplir les réservoirs de la fusée avec des propulseurs cryogéniques – l’oxygène et l’hydrogène liquides qui alimentent le moteur Vulcain.
Toute anomalie nécessitant une intervention physique nécessiterait désormais de vider les réservoirs, entraînant automatiquement un report de 48 heures du lancement, selon Jean-Michel Rizzi, patron de la base de lancement Ariane 6 à l’ESA.
Des ingénieurs et des cadres surveillent les paramètres du lanceur Ariane 6 dans la salle Jupiter du Centre spatial de Kourou, le 9 juillet 2024 en Guyane française (AFP / jody amiet)
Enfermés dans le bunker du centre de lancement, une sorte de cockpit de fusée, plus de 200 experts surveillent le lanceur jusqu’à ce qu’il quitte le sol, prêts à interrompre le compte à rebours et à résoudre d’éventuels problèmes, a-t-il précisé.
Le centre de lancement est en contact permanent avec la salle Jupiter, la tour de contrôle où sont centralisées toutes les données de télémétrie (données envoyées à tout moment par la fusée), les informations de suivi radar et de communication, ainsi que la liaison avec les forces armées déployées en grand nombre pour assurer la sécurité du lancement.
Trois avions de chasse Rafale ont été déployés pour dissuader tout aéronef trop curieux.
– « Une part de risque » –
Décidé en 2014, Ariane 6 pourra placer des satellites en orbite géostationnaire, à 36 000 kilomètres d’altitude, comme son prédécesseur Ariane 5, ainsi que mettre en orbite des constellations à quelques centaines de kilomètres de la Terre.
La fusée a été « qualifiée » au sol après de multiples répétitions. « On a fait tellement de chronologies (de lancement) qu’on pense que c’est de la routine, sauf que cette fois c’est la vraie, elle va décoller », s’enthousiasme Franck Saingou, directeur adjoint du vol inaugural.
Historiquement, près de la moitié des premiers lancements de fusées ont été des échecs, comme en 1996 pour la première Ariane 5, qui n’a pourtant connu que deux échecs en 117 lancements.
« C’est un premier vol, il y a une part de risque, nous avons essayé de la réduire au maximum, nous sommes confiants », explique Philippe Baptiste, le PDG du CNES, l’agence spatiale française.
Une partie du noyau central du lanceur européen Ariane 6 à Kourou, en Guyane, le 26 mars 2024 (AFP / Ludovic MARIN)
« Nous pourrons pousser un premier soupir de soulagement quand nous aurons largué les premiers satellites », une heure et six minutes après le décollage, calcule Tony Dos Santos, chef de mission à l’ESA.
Le succès sera total avec la chute réussie dans le Pacifique de l’étage supérieur en fin de mission, suite à un troisième rallumage du moteur Vinci, principale innovation de la fusée.
Ce vol réussi marquera le « retour » de l’Europe sur la scène spatiale, selon Toni Tolker-Nielsen, responsable du transport spatial à l’ESA.
L’assemblage de la fusée Ariane 6 (AFP / Valentin RAKOVSKY)
Depuis le dernier vol d’Ariane 5 il y a un an, les Européens ne parviennent plus à mettre seuls un satellite en orbite : depuis l’invasion de l’Ukraine, ils n’ont plus accès au lanceur moyen russe Soyouz, et la fusée Vega-C est clouée au sol depuis fin 2022 après un accident.
Mais selon lui, il faudra ensuite réussir à augmenter la cadence des vols, avec un autre en fin d’année, six prévus en 2025 et huit l’année suivante.
Pour son premier vol, Ariane 6 emportera à son bord 17 « passagers » : 11 micro-satellites universitaires, diverses expériences et deux capsules de rentrée atmosphérique, qui doivent préparer le cargo spatial voulu par les Européens pour ravitailler les stations spatiales.