Le coaching en tribunes sera définitivement adopté à compter du 1er janvier 2025. Une décision qui ne fait pas l’unanimité parmi les joueurs.
Publié
Temps de lecture : 6min
La mesure n’est pas passée inaperçue sur le circuit. Après plusieurs années d’essais, la Fédération Internationale de Tennis (ITF) a annoncé, jeudi 17 octobre, modifier son règlement et autoriser le « coaching hors terrain à partir du 1er janvier 2025 ». Il sera donc désormais autorisé pour un entraîneur de communiquer verbalement avec son joueur pour lui donner des instructions ou des conseils lors d’un match depuis les tribunes, à condition qu’il soit du même côté que son élève. .
Les indications gestuelles seront autorisées depuis l’autre bout du terrain. Cet encadrement devra cependant être discret et rapide, et ne sera autorisé qu’entre les points ou en fin de jeux et de sets. Fini les points de pénalité et les amendes pouvant aller jusqu’à 5 000 $ pour le coaching. A travers cette modification du règlement, l’ITF estime que cela permettra notamment de « réduire la subjectivité dans l’application de la restriction actuelle au coaching », et de « rendre le tennis plus juste et potentiellement plus divertissant », est-il écrit sur le site Web de l’ITF.
L’ITF assure également que la modification a été approuvée par les principaux membres du circuit. « Les joueurs ont trouvé que cela rendait les tournois plus intéressants ; Les entraîneurs ont déclaré que cela améliorait le développement des joueurs et renforçait la réputation de leur profession, et les arbitres étaient heureux de pouvoir se concentrer sur ce qui se passait sur le terrain plutôt que dans les tribunes. » soutient Stuart Miller, directeur des règles à l’ITF. La réalité est plus nuancée. « Pouvons-nous s’il vous plaît arrêter de ruiner le duel mental et stratégique du sport » l’Américain Taylor Fritz, numéro 6 mondial, s’est énervé sur son compte X (anciennement Twitter).
« Non seulement en tant que joueur de tennis, mais aussi en tant que fan de ce sport, c’est triste de voir cette nouvelle règle d’entraînement hors terrain, avait grandement regretté le Canadien Denis Shapovalov sur le même réseau social. Le tennis est spécial car vous êtes seul sur le court. Pourquoi essayez-vous de changer la beauté de ce jeu ? Le règlement précise toutefois que les organisateurs de chaque tournoi auront le dernier mot sur l’application ou non de cette nouvelle règle, et sous quelle forme.
Dans les coulisses du Rolex Paris Masters, les joueurs ne pouvaient évidemment pas échapper à la question. Pour Richard Gasquet, qui quittera le terrain à Roland-Garros 2025, cette autorisation d’entraîneur permettra d’officialiser une pratique courante. « Tout le monde entraîne depuis longtemps, mes entraîneurs aussi, mais cela ne se voyait pas. Cela ne changera rien. » » décide le 133e joueur mondial, éliminé dès le premier tour du tournoi de Paris. Même son de cloche avec l’Italien Jannik Sinner. « Cela ne changera rien. Les entraîneurs donnent déjà des conseils à leurs joueurs à certains moments. » confirme le numéro un mondial.
« En tant que joueur, vous êtes seul sur le terrain à essayer de comprendre la situation. Mais la connexion avec l’entraîneur vous permet de communiquer avec lui d’un simple regard. Dès que vous regardez l’entraîneur, vous vous comprenez. »
Jannik Sinner, numéro un mondiallors d’une conférence de presse
Le Bulgare Grigor Dimitrov (9e à l’ATP) est plus nuancé. S’il confirme également « les petits signes ici et là pendant les matchs »il regrette cependant la perte d’un élément clé du tennis. « Nous sommes sur le terrain pour trouver une solution pour nous-mêmes, et nous y sommes parvenus depuis tant d’années. J’aime les traditions et les choses telles qu’elles sont. Je n’aime pas vraiment les changements de ce côté-là. Mais bien sûr, Bien entendu, la manière dont ils souhaitent jouer dépend entièrement des joueurs.
Interrogé lors de sa période d’essai, Arnaud Clément, ancien top 10 mondial et consultant pour franceinfo : sport, s’est clairement opposé à cet encadrement hors terrain : « Nous voyons des joueurs qui ont des capacités d’analyse lorsqu’ils changent de camp. Ils leur permettent de trouver des solutions si nécessaire, ce qui est une qualité, alors que d’autres ont beaucoup plus de difficulté. Là, on va avoir un regard extérieur qui va aider les joueurs et enlever à certains le petit plus qu’ils ont par rapport aux autres. Je trouve ça un peu dommage.» a développé l’ancien capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis.
Cette mesure pourrait-elle mettre en danger l’essence même du tennis, où le mental fait partie intégrante du jeu ? « Il y a toujours un risque, mais le tennis, comme les autres sports, doit évoluer. » estime Richard Gasquet, tout en y voyant un autre point positif : celui d’une meilleure visibilité et reconnaissance des coachs. « J’espère que les entraîneurs seront ainsi mis en valeur, pour qu’on puisse voir leur travail. »glisse l’homme de 38 ans.
De son côté, Enzo Couacaud, 208ème joueur mondial, a un avis bien plus tranché. « Aujourd’hui, en payant un coach, parfois très cher car c’est un ancien du top 5 ou du top 10 mondial, il va lui donner les clés, nous a-t-il répondu, alors que la mesure était encore en phase de test. Je vais donc jouer contre l’adversaire et le coach qui était top 5 mondial. C’est plus dur et injuste. Nous n’avons pas tous les mêmes moyens. Ce devrait être tel joueur contre tel autre, et chacun avec ses propres armes pour gagner. Il faudra donc attendre 2025 pour savoir si cette réforme profite aux joueurs au détriment des autres.