le choix de la transparence pour les associations
Emmaüs et la Fondation Abbé-Pierre ont opté pour la transparence malgré le choc provoqué par les accusations de violences sexuelles visant l’icône de la lutte contre le mal-logement ; une décision saluée mais non exempte de critiques.
Une première explosion en juillet, suivie d’une autre vendredi. L’abbé Pierre, longtemps l’une des personnalités préférées des Français et figure emblématique de la lutte sociale, est accusé par 24 femmes au total d’avoir commis des violences sexuelles, selon les rapports d’un cabinet spécialisé.
Alertées par une ancienne victime, les associations fondées par le prêtre décédé en 2007, Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre, ont décidé de lancer « travail d’écoute (…) pour établir si d’autres événements similaires auraient pu se produire »Une approche rare.
En juillet, suite à la première vague de révélations, la députée EELV Sandrine Rousseau, connue pour son engagement féministe, avait déjà jugé sur X que la Fondation Abbé-Pierre et Emmaüs étaient « courageux d’avoir mis les choses en transparence ».
« Ce qui se passe est vraiment une exception, au regard des mesures prises par les organisations concernées. »salue la porte-parole d’Osez être féministe, Elsa Labouret, auprès de l’AFP.
Elle regrette cependant que le recueil de la parole des victimes « arrive extrêmement tard ».
« Un tournant »
Les trois structures insistent sur leur « soutien total » aux victimes.
Ils ont confié le recueil des témoignages au cabinet Egaé, présenté comme une référence nationale, un choix qui a pu faire sourciller au vu des controverses qui ont accompagné le parcours de sa cofondatrice, la militante féministe Caroline de Haas.
« La manière dont Emmaüs a décidé d’aborder ce sujet marquera un tournant (…). Jamais une structure n’avait abordé de manière aussi transparente et déterminée la question des violences sexuelles commises par une personne en son sein. »juge Caroline de Haas.
Malgré la souffrance exprimée par les femmes qui ont signalé des violences sexuelles, « Plusieurs personnes expriment leur soulagement que les faits soient enfin publics et reconnus »note le rapport Egaé publié vendredi.
Ancien président d’Emmaüs France et aujourd’hui responsable d’une structure d’insertion au sein du Mouvement, Thierry Kuhn témoigne également « Beaucoup de réactions de personnes qui disent : ‘nous sommes fiers d’appartenir à un mouvement qui a su prendre ce sujet à bras le corps et réagir sainement : nous écoutons les victimes, nous les croyons, nous les soutenons et nous rendons publiques ces révélations’ ».
Mais l’attitude des associations n’empêche pas les réactions colériques, alors que des révélations dans la presse ont fait état de témoignages déjà connus depuis plusieurs décennies.
Adrien Chaboche, délégué général d’Emmaüs international, évoquait ainsi, dans un entretien au journal La Vie en juillet, des faits portés à la connaissance de certains membres du Mouvement « à une époque où Emmaüs, et plus largement la société française, n’avaient pas la même sensibilité à ces violences ».
« Je trouve ça un peu facile »déclare Revoii, responsable de l’association d’aide aux victimes de violences sexuelles Mouv’Enfants, à propos d’une œuvre qui, selon lui, « ne va pas assez loin ».
« Est-il normal qu’une organisation qui n’a pas dénoncé des crimes et des actes de violences sexuelles (…) puisse se faire justice elle-même en engageant un cabinet privé ? »L’activiste a protesté auprès de l’AFP, exigeant que les structures examinent leur responsabilité et que la justice prenne en charge l’affaire.
New Grb1