Le budget 2025 prévoit une réforme « technique » de cette aide allouée aux ménages modestes. Mais cela pourrait faire exploser le taux de non-recours, préviennent des voix de gauche.
Une réforme « technique » passée sous les radars, mais qui pourrait toucher de nombreux ménages précaires. L’article 60 du projet de budget 2025, présenté jeudi par le gouvernement, prévoit une nébuleuse réforme du chèque énergie. Un dispositif, créé en 2018, destiné à aider les ménages modestes à payer leurs factures d’énergie (électricité, gaz, chauffage, chauffage au bois ou au fioul, GPL), et certains travaux énergétiques.
Dans l’entourage du ministre du Budget Laurent Saint-Martin, on défend « une réforme technique du mode de paiement en raison de la suppression de la taxe d’habitation ». « Aucun changement en termes de barème et de critères d’éligibilité »ajoutons-nous de la même source. « Son montant ne change pas »» ajoute-t-on au cabinet de la Ministre déléguée chargée de l’Energie Olga Givernet. Toutefois, le changement du mode de paiement pourrait augmenter le taux de non-recours à ces aides dont le montant annuel varie entre 48 euros et 277 euros.
Dans le détail, la réforme vise à « fonder les conditions d’éligibilité des allocataires sur le double critère de leur situation financière et de leur occupation du logement identifié comme leur résidence principale ». « Afin de croiser ces deux informations (revenus et logement), l’éligibilité au chèque énergie se basera sur le croisement du numéro du point de livraison d’électricité du logement (…) et sur les paramètres fiscaux (impôt de référence sur le revenu). et ci-joint) du foyer fiscal »développe l’explication des raisons de la réforme. Jusqu’à présent, les ménages éligibles étaient identifiés via leurs revenus fiscaux et la taxe d’habitation.
Lire aussiBudget 2025 : entreprises, impôts, électricité, transports… Ce qu’il faut savoir sur les mesures présentées
Fini l’envoi automatique pour tout le monde
Conséquence de ce changement, lié à la suppression de la taxe d’habitation, le chèque énergie – dont bénéficiaient 5,6 millions de ménages modestes en 2024 – ne sera plus envoyé automatiquement à tous les ménages éligibles. « Nous sommes en train de reconstruire un autre mécanisme pour avoir cette automaticité »a indiqué la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher ce vendredi lors d’une conférence de presse. Seul « une partie des chèques énergie » peut donc être envoyé automatiquement. Les anciens bénéficiaires en bénéficieront, «dès qu’il est établi qu’ils satisfont toujours à la condition de revenus».
« Pour une autre partie, les ménages devront se déclarer »a précisé le ministre. UN « billetterie » sera donc créée, probablement une plateforme en ligne, sur laquelle les nouveaux bénéficiaires potentiels devront en faire eux-mêmes la demande. Ce choix a été fait, justifie l’exécutif, pour « assurer le caractère unique de la délivrance d’un chèque énergie par logement »en d’autres termes, pour éviter les paiements en double. Mais « l’objectif est de disposer à terme, assez rapidement, d’un système qui permettra de revenir à un contrôle automatique et de minimiser les taux de non-recours », a assuré Agnès Pannier-Runacher ce vendredi.
Dès que l’information révélée par Médiapart Mardi, des voix à gauche se sont élevées contre cette réforme qui, selon le site d’information, pourrait rapporter près d’un milliard d’euros dans les caisses de l’Etat. « Le gouvernement s’apprête à torpiller le chèque énergie. Une nouvelle augmentation déguisée des impôts sur les plus pauvres »a dénoncé le député et coordinateur national de La France Insoumise (LFI) Manuel Bompard sur X.
« Sous couvert d’une réforme « technique », c’est un véritable sale coup, consistant à exploiter le non-recours pour économiser de l’argent, alors que 6 millions de Français sont déjà en précarité énergétique »a de son côté fustigé la députée LFI de l’Essonne Claire Lejeune. Le Réseau Action Climat a également pris cette mesure : « En décidant de mettre fin aux aides automatiques, le gouvernement cherche à garantir que les personnes déjà en dessous du SMIC n’utilisent pas les aides auxquelles elles ont droit !a déploré la fédération des associations de lutte contre le changement climatique.