Le changement climatique augmente la fréquence et l’intensité des turbulences des avions
Une expérience terrifiante et mortelle. Le 21 mai, un Britannique de 73 ans perdait la vie et une centaine de personnes étaient blessées lors d’un vol de la Singapore Airlines reliant Londres à Singapour. En cause : d’importantes turbulences, qui ont fait plonger l’avion de 1 800 mètres en quelques minutes, poussant le Boeing 777 à effectuer un atterrissage d’urgence à Bangkok. Dimanche, douze personnes ont également été légèrement blessées dans un avion reliant Doha à Dublin en raison des turbulences sur la Turquie. Les deux événements, pour lesquels des investigations sont en cours, ont ravivé les questions autour de l’impact du changement climatique sur ces phénomènes météorologiques instables.
La turbulence est un mouvement soudain et irrégulier de l’air, qui se produit le plus souvent dans trois situations : lors d’orages et de tempêtes ; au-dessus des montagnes ; dans un ciel sans nuages, ce que nous appelons « l’air clair ». Les deux premiers types sont facilement détectés par les pilotes, à l’œil nu et à l’aide d’un radar. A l’inverse, ces dernières sont considérées comme les plus dangereuses, car elles s’avèrent invisibles et surviennent donc de manière inattendue.
Cette turbulence d’air clair est provoquée par des phénomènes de cisaillement vertical du vent, lorsque deux masses d’air se chevauchent et se déplacent à des vitesses différentes ou dans des directions différentes. « Un avion porté vers le haut sur une certaine distance peut ne plus être appuyé un peu plus loin, et donc chuter de quelques dizaines de mètres », explique Nicolas Bellouin, modélisateur du climat à l’université de Reading (Royaume-Uni) et chercheur à la chaire aviation et climat de Sorbonne Université. Les cisaillements se produisent le plus souvent près des courants-jets (courants-jets en anglais), de puissants courants d’air qui se déplacent autour du globe à une altitude de 8 kilomètres à 12 kilomètres, là où volent les avions.
Augmentation des turbulences modérées et sévères
C’est pourquoi la plupart des vols subissent des turbulences, qu’elles soient légères, modérées, sévères ou extrêmes, un degré d’intensité défini en fonction de la vitesse verticale du vent. Il n’est pas possible à ce stade de déterminer quels types de turbulences ont rencontré le Boeing de Singapore Airlines. « Il y a eu quelques orages assez violents à proximité, mais les conditions étaient également favorables à des turbulences d’air clair »indique Nicolas Bellouin.
Quelle que soit la cause de cet accident, le changement climatique – lié à la combustion des énergies fossiles et donc, en partie, à l’aviation – va aggraver ce type de situation. Les turbulences en air clair sont déjà devenues plus fréquentes au cours des quarante dernières années, selon une étude britannique de premier plan, publiée en juin 2023 dans la revue Lettres de recherche géophysique. Les plus graves d’entre elles ont augmenté de 55 % au-dessus de l’Atlantique Nord, passant de 17,7 heures par an en 1979 à 27,4 heures en 2020. Il s’agit de l’une des liaisons aériennes les plus fréquentées au monde, avec près de 2 000 vols par jour entre l’Europe et le Nord. Amérique. Les turbulences modérées ont augmenté de 37 % (pour atteindre 96 heures par an) et les turbulences légères de 17 % (547 heures). Les résultats de l’étude montrent des augmentations similaires aux États-Unis.
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