Épluchez notre cerveau avec une précision sans précédent. C’est ce que promet Iseult, un appareil d’imagerie par résonance magnétique (IRM) conçu par le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), dont les premières images anatomiques du cerveau humain ont été dévoilées mardi 2 avril sur le site de Saclay. En 2021, les 11,7 Tesla de son champ magnétique avaient déjà révélé l’intérieur d’une citrouille, pour marquer son entrée dans une phase opérationnelle après vingt ans de développement. Depuis, les équipes du CEA se sont prudemment tournées vers l’observation de leurs premiers sujets humains.
« Les images sont d’une clarté incomparable ! », se réjouit Nicolas Boulant, responsable du projet Iseult au CEA. Pour obtenir des images anatomiques offrant la résolution de celles fournies par Iseult en quatre minutes d’observation – 0,2 mm dans le plan et 1 mm en profondeur – il faudrait rester deux heures dans un scanner 3 T de qualité hospitalière. Une comparaison tout à fait théorique, puisque les mouvements du patient brouilleraient alors l’image.
Si le passage de la citrouille à l’homme a été si long, c’est qu’avec Iseult nous entrions dans un territoire inconnu d’exploration cérébrale. « Il fallait prouver aux autorités sanitaires qu’une telle intensité de champ magnétique n’a aucun effet sur la santé », explique Nicolas Boulant. Le précédent record était de 10,5 Tesla sur une machine américaine à Minneapolis. Des tests ont donc été réalisés sur 20 volontaires adultes sains pour vérifier équilibre, cognition, température des tissus cérébraux, génotoxicité, etc. Une étude nocébo a même été réalisée, dans laquelle des volontaires ont été soumis, à leur insu, à une séance à zéro Tesla, pour voir si la machine, « ce qui peut être intimidant »note Nicolas Boulant, pourrait induire un biais psychologique. « Nous n’avons absolument rien vuassure le physicien. C’était une étape cruciale pour voir si nous serions réellement capables de le faire un explorateur du cerveau humain. »
« Déchiffrer le code neuronal »
Une nouvelle phase va désormais s’ouvrir, pour continuer à affiner l’acquisition des données selon les différentes modalités d’imagerie proposées par l’IRM : des données anatomiques, mais aussi des données fonctionnelles – c’est-à-dire visualiser les zones cérébrales activées par telle ou telle activité cognitive. Il sera également possible de réaliser une imagerie dite de « diffusion », qui met en évidence les faisceaux neuronaux reliant les différentes zones du cerveau. L’intensité du champ magnétique devrait également permettre de détecter des composés invisibles à des champs plus faibles, comme le lithium, utilisé dans les troubles bipolaires, ou encore le glucose et le glutamate, petites molécules impliquées dans le métabolisme cérébral.
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