le Carré d’Argent 2024 consacre une station de téléphérique, éloge du contexte, efficace et belle
Pour sa capacité à répondre aux usagers, le jury du 42e prestigieux prix national d’architecture a récompensé, lundi, la réhabilitation du téléphérique du Salève, surplombant le lac Léman. Un lieu qui reprendra vie grâce aux architectes Claudia et David Devaux.
Le Carré d’Argent, récompense décernée à un duo maître d’ouvrage et maître d’œuvre (le mécène et l’architecte) qui ont contribué à la construction d’un immeuble achevé dans l’année sur le sol français, ne date pas d’hier. Ce César de l’architecture en France fête sa 42e annéee édition. S’il remporte le triomphe souvent modeste, le prix décerné par le groupe Moniteur Et AMC (deux revues à la pointe du domaine, à la tête du prix depuis 1983) a le mérite de mettre en lumière des constructions très importantes dans notre vie quotidienne et qui reflètent les préoccupations urbanistiques et environnementales d’aujourd’hui. La tendance de ce Carré d’Argent ces dernières années est de coller à son époque et d’en être le reflet. Priorité à l’utilité et à l’usage.
Il répartit les nominés en six catégories, ce qui est toujours assez fastidieux, et décerne également le Prix pour la première œuvre, tout aussi cruciale, à un bâtiment conçu par un talent prometteur, à un architecte de moins de 35 ans, au moment de la soumission de la construction. On est loin des réalisations des grandes stars de l’architecture. C’est le terrain qui compte, le respect du contexte et la manière de l’appréhender. La véritable vocation de l’architecture qui couronne l’humilité des projets, au service du public, sans toutefois empêcher un grand geste, plein de générosité.
Une œuvre spectaculaire
Après délibération du jury présidé cette année par Iwona Buczkowska, architecte et urbaniste française d’origine polonaise, le prix a été décerné lundi soir à la réhabilitation de la station supérieure du téléphérique du Haut Salev en Haute-Savoie. Une œuvre globalement spectaculaire dominant le lac Léman et la ville de Genève, réalisée par le groupement local de coopération transfrontalière pour l’exploitation du téléphérique et par Devaux & Devaux Architectes, Claudia et David. Son incroyable vue panoramique méritait une rénovation architecturale majeure.
L’objectif était de reprendre cette gare construite par l’architecte suisse Maurice Braillard et mise en service en 1932 (elle est classée Monument Historique) et de restaurer ses parties d’origine, pour mieux les adapter aux nouveaux usages. , avec entre autres, un restaurant (après la destruction de l’ancien, un vilain chalet suisse), une terrasse et une esplanade d’où décollent les parapentistes, sans oublier une tour d’escalier bien intégrée. » Ils ont pris un risque avec ce projet puissant et admirable, soigné jusque dans les détails, qui a permis d’éclairer un site qui ne fut jamais vraiment achevé et massacré dans les années 80. Le tout a un côté esthétique. Il est parfaitement bien implanté dans une forêt qui sera replantée « , » a souligné le jury.
Bordeaux, Bagneux, Laguiole
Parmi les autres prix, saluons celui des Infrastructures et oeuvres d’art, pour le pont Simone-Veil et ses liaisons à Bordeaux (Gironde), large de 44 mètres, bordé de parcelles d’arbres par le paysagiste Michel Desvignes, conçu par Bordeaux Métropole. et l’agence OMA, un projet visiblement évident. Celui de l’Habitat s’élève à 76 logements sociaux et un local associatif à Bagneux (Hauts-de-Seine) par Immobilière 3F et les architectes : Tolila+Gilliland, ouvrage très apprécié pour sa typologie d’habitation, non pas avec des doubles hauteurs mais des hauteurs et un moitié, permettant de spacieuses pièces à vivre, avec de grandes baies vitrées, de larges paliers, des escaliers de circulation et des balcons assez généreux. Sans oublier ses façades structurelles en brique dans l’esprit du quartier.
L’Équerre Jeunesse Culture et Sport revient à Laguiole (royaume des couteaux) par la communauté d’Aubrac, Carladez et Viadène et les architectes Bétillon et Freyermuth, un centre qui regroupe crèche, école de musique, médiathèque et bureaux. Il s’agit d’une simple structure modulaire de bois et de verre, rationnelle et radicale, pure et sincère, avec des patios à l’intérieur, à l’opposé du vernaculaire d’un lieu patrimonial et rural. » Une structure capable, avec son côté mécaniquement astucieux et géométriquement beau, d’évoluer selon le programme, 1850 m2 pour un coût de 2,1 millions d’euros, un lieu de convivialité, c’est ce qu’il faut viser aujourd’hui « , » a fait remarquer le jury.
Le prix Première Œuvre est décerné à l’école Simone-Veil de Lompret (Nord), par la mairie locale et Alt174 Architecture. Il s’agit d’une véritable prise de position sur ce que nous pouvons faire de plus et mieux, au service de la communauté. Il a été développé grâce au travail participatif des enfants. Tout est rouge pour s’harmoniser avec la ville de brique. Une réhabilitation qui a plu au jury. Il montre à quel point les jeunes architectes savent aborder un tel sujet, en le dessinant avec élégance. Un mélange de légèreté et de fragilité, au caractère joyeux pour redonner du tonus à un espace. Tout le défi de demain.