La propriétaire d’un bistro populaire du Vieux-Longueuil, qui s’est occupée de tout après le décès de son mari d’un cancer à l’âge de 50 ans, ferme maintenant ses portes après 32 ans parce que ses clients ne dépensent plus autant d’argent qu’avant.
« Ça a été très difficile. Je suis entrée dans le projet avec un deuil et avec trois enfants aussi en deuil », se souvient Josée Latendresse, 60 ans, en pensant au moment où elle a repris le flambeau lorsque son mari a été emporté par le cancer en 2006.
Josée Latendresse refuse de perdre son sourire même si elle a le coeur lourd de fermer son restaurant.
Photographie Francis Halin
Après avoir décidé de garder le restaurant ouvert pour honorer sa mémoire, les affaires marchèrent bien. L’adresse devint une véritable institution dans le quartier. Des mariages et de nombreux conseils d’administration d’entreprises québécoises y ont eu lieu.
« Ça a extrêmement bien fonctionné », soupire le candidat défait par une centaine de voix à l’élection municipale de Longueuil en 2017.
Denis Lizotte, défunt époux de Josée Latendresse, en compagnie de sa serveuse Nathalie.
Photo fournie par Josée Latendresse
« Un jour, une dame de 84 ans est venue manger et m’a raconté qu’elle venait ici chercher ses chapeaux quand elle était petite », raconte Josée Latendresse. Car avant le restaurant L’Incrédule, c’était un notaire et un chapelier qui occupaient l’immeuble.
Yoyo pandémique
Pendant des années, L’Incrédule a réussi à attirer les clients… jusqu’au douloureux et interminable yo-yo des fermetures et ouvertures dues à la crise sanitaire.
« Pendant la COVID-19, cela coûtait 60 000 $ par année pour garder un établissement comme celui-ci fermé », dit-elle.
Une ancienne carte de visite de L’Incrédule.
Photo fournie par Josée Latendresse
Alors qu’elle commençait à atteindre son quota, Josée Latendresse a relancé son restaurant sous l’impulsion de quelques employés motivés et prêts à travailler deux fois plus fort.
Mais le mal est fait. Les clients reviennent, mais ils dépensent moins qu’avant. Les séquelles de la pandémie se font sentir. L’inflation achève le travail.
« Le budget du restaurant est plus limité. Ça se sent. Les habitués viennent une fois par mois plutôt que deux ou trois fois », poursuit-elle.
« À la fin du mois, quand on fait l’équation, ça ne colle pas. Je finance mon restaurant depuis janvier pour le maintenir ouvert. C’est épouvantable », constate l’entrepreneure, refusant de perdre son sourire.
« J’ai un autre travail, mais il ne peut pas servir à soutenir un restaurant », résume-t-elle.
« Un peu de liberté»
Pour couronner le tout, la grande chaleur de l’été dernier a enfoncé le clou. La pression financière s’est accentuée. Les gens évitaient les terrasses car l’air lourd était étouffant. Les mois passaient et se ressemblaient tous. Ils étaient toujours écrits à l’encre rouge.
Il y a deux semaines, Josée Latendresse n’a donc pas eu d’autre choix. Elle a annoncé la triste nouvelle à ses huit employés. C’était la fin.
«Je vais chercher un peu de liberté. Je n’ai jamais passé Pâques avec ma famille. Je l’ai passé ici», conclut l’arrière-petite-fille du propriétaire du Capitole de Québec, qui avait été contraint de fermer après le krach boursier de 1929.
Napoléon Gauvin, arrière-grand-père de Josée Latendresse, dans la Capitole de Québec.
Photo fournie par Josée Latendresse
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Points forts
Selon Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales à l’Association Restauration Québec (ARQ), « on constate qu’il y a une légère baisse d’achalandage depuis le début de 2024 en raison de la situation économique plus difficile ».
Photo fournie par ARQ
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