EXCLUSIF. Olivier Dubois, en otage français au Mali pendant 711 jours entre 2021 et 2023, vient de publier un livre intitulé Prisonnier du désert-711 jours entre les mains d’Al-Qaïda (éd. Michel Lafon). C’est une histoire de sa détention au Sahara malien, entre les mains du secteur principal de la nébuleuse djihadiste al-Qaïda. Il délivre des éléments exclusifs sur les circonstances de la mort de l’otage suisse Béatrice Stöckli, kidnappée en 2016 dans le nord du Mali et exécutée en octobre 2020 par ses ravisseurs. Entretien.
« Le plus long rapport de sa vie. » C’est ainsi qu’Olivier Dubois résume ses près de deux ans de captivité, entre le 8 avril 2021 et le 21 mars 2023. Jeudi, il a publié l’histoire. Il raconte deux ans de détention là-bas, ses relations avec ses ravisseurs, sa compréhension des choses, comment il a résisté. Il dit qu’il n’a jamais cessé d’être journaliste, à la fois pour résister et signaler ce qu’il a vu.
Au cours de sa captivité, Olivier Dubois a réalisé plusieurs interviews avec des dirigeants du groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, JNIM en arabe), ses Ravisseurs, filiale officielle de la nébule du groupe au Moyen-Orient, sa branche principale active dans le monde.
Avec l’un d’eux, il a pu parler de Béatrice Stöckli, membre d’une société évangélique protestante de Bâle, en a kidnappé en 2016 par le même groupe et exécuté en octobre 2020 par ses ravisseurs. Les autorités suisses n’ont jamais communiqué sur les raisons de cette exécution.
Heidi.News. Qu’est-ce que les djihadistes GSIM vous ont parlé de Béatrice Stöckli?
Olivier Dubois. J’étais avec un cadre djihadiste, et il m’a donné une interview. Nous abordons le cas de différents otages. Il y a Serge Lazarevic (otage français entre 2011 et 2014), la sœur Gloria (otage colombien entre 2017 et 2021), Sophie Petronin (Franco-Siss en otage entre 2016 et 2020), puis il y a Béatrice Stöckli. À propos de lui, il y a quelque chose.
Il dit que c’était très compliqué avec elle qu’elle était très dure avec eux. Elle détestait les djihadistes. Il me donne un exemple, une anecdote. À un moment donné, elle a crié: « Je voudrais pouvoir faire comme vos kamikazes, avoir une ceinture explosive et me jeter contre vous pour tout emporter avec nous ». C’était le type de rapport qu’elle avait avec ses geôliers.
Je lui demande comment ça s’est passé (Assassinat par les djihadistes, note de l’éditeur). Et là, il m’explique qu’un jour, en septembre 2020, un mois avant la sortie de Sophie Pétronin, une opération aurait été mise en place par les Français.
Les Français auraient eu des informations leur disant que Sophie Pétronin était dans un tel endroit et qu’elle était avec Béatrice Stöckli, ou pas loin d’elle. Le gouvernement français se serait rapproché du gouvernement suisse, lui aurait demandé l’autorisation de pouvoir essayer une opération visant à libérer Sophie Pétronin, et donc aussi Béatrice Stöckli.
L’opération a eu lieu. Malheureusement, les djihadistes sont alertés. C’est quelque chose que j’ai également vécu lors de ma détention: quand il y a une alerte, vous devez partir très, très, très rapidement. À ce moment-là, ils sont très stressés, très durs. Mais Béatrice Stöckli se rebellera à nouveau. Elle refusera de les suivre.
Il sera attrapé, ce que le cadre djihadiste m’a dit, derrière une dune et a fait une balle dans la tête.