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Le bas-ventre est mon obsession

J’aborde ici un autre trait caractéristique du régime islamique iranien, après son adoration de la mort, son obsession du bas-ventre.

Remontons un peu dans le passé : en 1978, l’ayatollah Khomeiny prépare sa venue en France, qui sera son troisième et dernier exil après la Turquie et l’Irak, un exil qui aura duré près de quinze ans. Khomeiny, que Foucault appelait « le saint homme », a écrit plusieurs livres, dont un qui traite des lois divines régissant la vie quotidienne. J’ai réussi à mettre la main sur ce livre paru en français en 1979. Le titre édifiant du premier chapitre : « En route pour uriner et déféquer ». Suit une série de recommandations sur ce qu’il faut faire avant, pendant et après avoir uriné ou déféqué, le tout avec une description méticuleuse.

Un peu plus loin je lis « Sur la façon de manger et de boire ». On dirait un pastiche raté de Rabelais, sans l’humour ni la dérision propre à l’auteur de « Gargantua » et « Pantagruel ». Un autre chapitre s’intitule « De la femme et de ses règles ». Le futur guide suprême est obsédé par le flux des menstruations, qu’il classe en différentes catégories : faible, moyen, abondant. Il recommande d’introduire un morceau de coton pour analyser le flux. A sa lecture, on a l’impression que la circulation des règles est tout aussi cruciale que celle des capitaux ou des biens. De nombreux paragraphes concernent la question du coït pendant les menstruations, qui semble le préoccuper particulièrement. « Il vaut mieux que l’homme évite le coït » ; sinon il doit payer une somme aux pauvres, calculée selon le débit des règles (on y revient toujours). Plus elle est abondante, plus la somme à payer est élevée. Uriner, déféquer, manger, boire, les menstruations et le coït sont autant de sujets de grande réflexion pour celui qui incarne à merveille, toujours selon Foucault, la « spiritualité politique », concept cher au philosophe.

Une spiritualité du bas-ventre, j’ajouterais.

Moins drôles sont les conséquences de cette obsession et de sa pratique dans la société iranienne.

Une femme vierge condamnée à mort est systématiquement violée. En Iran, il est interdit de tuer une vierge et, si elle meurt, elle ira au paradis. Afin de lui éviter le paradis et d’empêcher ses tortionnaires de commettre un péché, les autorités ont trouvé une solution qui est le viol, pratiqué depuis 1979 sur les opposants.

Je suis tombé sur une vidéo d’un père dont la fille de 19 ans venait d’être arrêtée en octobre 2022. Il dit avoir demandé à sa fille ce qu’elle voulait qu’il lui apporte au parloir. Il avait fini par recevoir une visite. Elle répond : une pilule contraceptive. Et le père fond en larmes.

Elles sont violées parce que le régime iranien a nationalisé le viol depuis quarante-trois ans.

Il y a quelques jours, j’ai appris que les bourreaux du régime tirent sur les parties intimes des femmes, près du vagin, lorsqu’elles manifestent.

De l’obsession des menstruations aux mutilations vaginales. Le mot d’ordre est le même : le sang doit couler.


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Cammile Bussière

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