L’Autriche, nouveau nid douillet des espions venus de Russie
La ministre autrichienne de la Justice a récemment déclaré vouloir mettre fin à l’image de « havre de paix pour espions » dont souffre son pays. Le gouvernement souhaite désormais durcir les condamnations pour espionnage et donner à la police davantage de moyens pour enquêter.
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Les annonces du gouvernement autrichien interviennent après l’arrestation le 29 mars 2024 d’un ancien agent soupçonné d’avoir vendu des informations à la Russie. Les autorités autrichiennes connaissent bien cet homme. En 2017, Egisto Ott, agent spécialisé dans la surveillance de l’extrémisme au BVT, l’office fédéral pour la protection de la Constitution, avait déjà été suspendu et soupçonné d’avoir vendu des informations confidentielles à la Russie. Mais très vite, et de façon assez miraculeuse, il est blanchi par la justice et réintégré dans un autre service du ministère de l’Intérieur.
C’est sans doute ce qui ébranle le plus la classe politique autrichienne, car en pleine campagne législative en Autriche, tous les partis s’accusent mutuellement d’avoir entretenu des liens avec Egisto Ott. Son arrestation révèle le degré profond de son infiltration dans les institutions et à travers lui, celle des renseignements russes.
Le chancelier autrichien Karl Nehammer a pris cette question très au sérieux lors de sa visite à Paris le 1er avril. « Il s’agit d’une question de sécurité nationale très grave. Les enjeux sont énormes et nous devons évaluer l’impact sur notre politique intérieure », a-t-il déclaré. Comprendre comment les services de renseignement, en l’occurrence ceux de la Fédération de Russie, ont visiblement commencé à infiltrer nos institutions, mais ont également influencé le processus de décision politique de notre pays. Nous devons examiner cela de près, car il s’agit d’une attaque contre notre démocratie et contre nos institutions. »
Un espion innocenté, mais toujours de mèche avec Moscou
Egisto Ott a été suspendu en 2017, puis blanchi, mais il n’a jamais cessé de travailler avec la Russie. Il est soupçonné par exemple d’avoir transmis en 2022 l’adresse de Cristo Grozev, un journaliste du site d’investigation Bellingcat. Ce site est à l’origine des révélations sur les méthodes d’empoisonnement au Novitchok, par les renseignements, d’agents militaires russes agissant à l’étranger. Un autre fait d’armes a été la livraison de trois téléphones portables de hauts responsables autrichiens aux services de renseignement russes via un réseau bulgare. Ces trois téléphones sont tombés à l’eau lors d’une sortie mouvementée sur le Danube et qui avaient été confiés en réparation au BVT, l’ancien service d’Egisto Ott.
Au total, il aurait effectué 380 recherches illégales dans la base de données de la police autrichienne, et tous ces détails proviennent d’un récent rapport (lien en anglais) du British Royal United Services Institute, qui explique comment la Russie cherche à relancer son opérations « non conventionnel » à l’étranger. Selon ce reportage, la diffusion en Allemagne d’une conversation entre deux officiers de l’armée sur la livraison de missiles Taurus à l’Ukraine ou l’assassinat en Espagne du pilote déserteur russe Maxim Kuzminov, confirmeraient que les renseignements ont réactivé leurs réseaux, dans le but de déstabiliser l’Europe.