l’autoroute A13 supprime ses barrières de péage en adoptant la « free flow »
Un automobiliste parcourant les 210 kilomètres d’autoroute séparant Paris de Caen n’est plus obligé de s’arrêter plusieurs fois – ou du moins de réduire sa vitesse s’il dispose d’un badge d’abonnement – pour payer le péage. Lors des longs week-ends et des départs en vacances, cela pouvait souvent entraîner un ralentissement de la circulation à l’approche des barrières successives et une perte de temps pouvant atteindre une demi-heure.
Depuis la nuit du 9 au 10 décembre, le client paie sans avoir à appuyer sur la pédale de frein aux cinq péages situés entre Poissy et Caen – cela représente 80 % des trajets. Les péages pour les entrées et sorties de l’A13 entre Rouen et Caen doivent suivre 24 heures plus tard. C’est ce qu’a annoncé Sanef, filiale du groupe espagnol Abertis, concessionnaire de l’A13 (Paris-Caen) et de l’A14 (Paris-Orgeval). Un projet lancé en mai 2023.
Ce nouveau mode de paiement, basé sur le principe de la libre circulation, consiste ni plus ni moins à supprimer progressivement les barrières de péage et à les remplacer par des portiques qui enjambent les voies et sont équipés de capteurs intelligents pour identifier les véhicules. , sans que les automobilistes n’aient à appuyer sur la pédale de frein.
Après trois jours, un montant augmenté
« Plus de 200 panneaux jalonnent les 210 km de l’axe pour informer les automobilistes des nouveaux moyens de paiement de la libre circulation » souligne Sanef.
Si les conducteurs disposent d’un badge d’abonnement – c’est le cas d’environ 50 % de ceux qui empruntent l’itinéraire Paris-Caen – rien ne change. Les autres reçoivent leur facture à domicile. Ils ont alors la possibilité de payer en ligne et, s’ils le souhaitent, de sauvegarder leurs coordonnées bancaires afin d’éviter toute démarche supplémentaire pour les paiements futurs. Ou bien ils peuvent se rendre physiquement dans l’un des 10 000 points du réseau tabac-presse de Nirio, l’enseigne commerciale de FDJ Services.
A réception de la facture, les non-abonnés ne disposent que de trois jours pour effectuer le paiement. Si le paiement n’est pas effectué à temps, une phase transactionnelle s’engage avec Sanef, qui donne lieu à une majoration de 10 euros en cas de paiement dans les 15 jours suivant l’envoi, puis de 90 € pendant 2 mois maximum.
Si l’utilisateur ne paie toujours pas, le dossier est transmis à l’État qui inflige une amende de 4ème classe, d’un montant de 375 €. Attention : des pénalités sont déclenchées à chaque trajet. Si vous revenez le même jour, vous devez payer deux fois.
28 hectares rendus à la nature
Le projet doit en tout cas donner du trafic « plus de fluidité », souligne Sanef. La suppression des barrières de péage permettra également de rendre 28 hectares à la nature.
Sur le plan social, « tous les salariés concernés se sont vu proposer de nouveaux emplois et ont été formés aux métiers de la relation client, explique l’opérateur. Et 150 emplois ont également été créés dans ces nouveaux métiers.
Libre circulation obligatoire pour toutes les nouvelles autoroutes
Sanef n’est pas la première entreprise à adopter ce principe. Aliaé (Autoroute de la liaison Atlantique Europe, concession détenue par Eiffage) a fait de même, fin 2022, sur la nouvelle autoroute A79, entre Montmarault (Allier) et Digoin (Saône-et-Loire).
Un succès, assurait en novembre 2023, Pierre Méau, directeur péage au sein de ce groupe, qui a notamment salué « grande fluidité de circulation » et donc « diminution des émissions ». Et ce manager cite un chiffre : « Un poids lourd comme ceux qui empruntent massivement cet itinéraire consomme un litre de carburant à chaque redémarrage, à la sortie d’un péage. »
Du côté de la Sanef, on souligne que le péage à flux libre « générera des économies de carburant estimées par l’Autorité de régulation des transports à 9,5 millions de litres par an et une réduction des émissions de CO2 ».
« La libre circulation est le sens de l’histoire », a commenté Pierre Méau, même si les autres concessions Eiffage n’ont pas encore décidé de passer à ce mode. Pour les 88 km de l’A79, la question ne se posait cependant pas. Car, rappelle Pierre Méau, « la loi d’orientation des mobilités, en 2019, prévoyait que toutes les nouvelles autoroutes seraient exemptes de barrières à péage ».
Dans ce domaine, la France est plutôt en retard. Une vingtaine de pays européens utilisent déjà le free flow. Pionnière, la Norvège – qui dispose de nombreuses routes et tunnels à péage – l’a mis en œuvre en 1991.
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Pierre Chasseray, délégué général de l’association 40 Millions d’automobilistes
« La libre circulation mérite d’être étendue à toutes les autoroutes »
« La fluidité n’est que positive : c’est la fin ou presque la fin des bouchons, la fin du stress autour des péages, la fin du « chéri, où a-t-on mis le ticket ? ». Ce principe est source de simplification, sauf peut-être pour ceux, minoritaires, qui refusent de communiquer leurs données bancaires ou même d’utiliser une application, et qui doivent être autorisés par exemple, comme c’est le cas sur l’A79, à payer physiquement. sur une aire de service ou une aire de repos.
La libre circulation mérite d’être étendue à toutes les autoroutes. Mais cette révolution nécessite un vrai soutien, de vraies campagnes d’information de la part des pouvoirs publics. Parce que nous rompons avec des habitudes vieilles de plusieurs décennies. Les automobilistes doivent être pleinement conscients qu’ils s’engagent sur une autoroute à péage, même s’ils ne rencontrent pas de barrière à péage. »