Soulignant que « la Russie doit perdre la guerre », qu’il « ne peut y avoir ni ‘gel’ (du front) » ni « un échange concernant le territoire de l’Ukraine ou sa souveraineté », le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dévoilé un « plan de victoire » comprenant cinq points ainsi que trois annexes secrètes le 16 octobre.
Ainsi, ce plan prévoit notamment la levée des restrictions d’emploi liées aux armes à longue portée fournies par les Occidentaux et une invitation à rejoindre l’OTAN. En outre, il est question de déployer, en Ukraine, un « ensemble complet de mesures de dissuasion stratégique non nucléaire » pour contrer toute menace militaire russe. Enfin, il vise à développer le potentiel économique du pays et propose qu’une fois la guerre terminée, les forces ukrainiennes mettent leur expérience au profit de la défense du flanc oriental de l’Alliance.
« Le plan de victoire peut être réalisé. Cela dépend de nos partenaires », a déclaré M. Zelensky. « J’insiste : de la part de nos partenaires. Pas de Russie. Tout le monde voit que les Russes veulent une paix juste. Poutine est devenu fou et, par conséquent, il ne veut que la guerre. Lui, et lui seul. Il ne changera pas. Cela fait trop partie du passé (…). Mais nous, Ukrainiens, avec nos partenaires, devons veiller à ce que la guerre prenne fin et à ce que la Russie soit contrainte à la paix », a-t-il ajouté.
Toutefois, les forces ukrainiennes traversent actuellement des temps compliqués. L’offensive qu’ils ont lancée en août en direction de Koursk n’a pas donné les résultats espérés. Au point que sa pertinence est désormais remise en question. D’autant que, à moins de prendre le risque d’étendre les lignes logistiques au-delà du raisonnable, sa portée ne pourrait qu’être limitée. Elle n’a d’ailleurs pas contraint la Russie à relâcher ses efforts dans le Donbass, bien au contraire : ses forces continuent d’avancer – quoique lentement et au prix de pertes élevées – dans les secteurs de Louhansk, Donetsk et Zaporizhia.
Par ailleurs, grâce à son industrie d’armement ainsi qu’à ses relations « stratégiques » avec l’Iran et la Corée du Nord, la Russie a les moyens de remplacer rapidement les équipements perdus, de reconstituer ses stocks de munitions (drones Shahed-136 « kamikazes », missiles balistiques et obus d’artillerie en notamment), voire renforcer ses troupes, des informations – non confirmées – ayant fait état du déploiement prochain d’un bataillon nord-coréen dans la zone de combat.
De leur côté, les forces ukrainiennes connaissent des problèmes d’effectifs, avec une forte augmentation du nombre de désertions depuis le début de cette année (plus de 18 000 cas selon le parquet général ukrainien). Aussi, en avril dernier, l’âge de mobilisation a été abaissé à 25 ans et le conseiller du chef du cabinet présidentiel, Serhi Lechchenko, a indiqué que des responsables américains avaient recommandé d’aller plus loin en le portant à 18 ans.
«L’argument de nos partenaires est que, lorsque les Etats-Unis étaient en guerre au Vietnam, les gens étaient enrôlés à partir de 19 ans. C’est pourquoi les Américains suggèrent que les armes occidentales ne suffisent pas et qu’une mobilisation à partir de 18 ans est nécessaire. Le président Zelensky n’a pas cédé et essaie toujours de convaincre les hommes politiques des deux partis de fournir des armes sans modifier l’âge de la conscription », a-t-il expliqué.
Par ailleurs, Kyiv dépend essentiellement du soutien occidental. Ainsi, en adoptant une approche « originale », la France forme 2 500 militaires de la brigade interarmes « Anne de Kiev » sur les matériels qu’ils utiliseront au combat (CAESAr, AMX-10RC, VAB, camion TR1000, etc.) tout en d’autres pays européens ont récemment annoncé de nouvelles aides. La semaine dernière, l’Allemagne a promis 1,4 milliard d’euros pour financer des capacités de défense aérienne et le don de chars Leopard 1A5, dans le cadre d’un partenariat avec la Belgique, le Danemark et la Norvège. Et le 16 octobre, les États-Unis ont annoncé qu’ils débloqueraient 425 millions de dollars supplémentaires pour fournir des munitions blindées et des systèmes anti-aériens aux forces ukrainiennes.
L’Australie a également fait une annonce importante, en promettant de livrer à Kiev 49 chars M1A1 Abrams récemment retirés du service par l’armée australienne, tandis qu’elle va acquérir 75 M1A2 Abrams SEPv3 de conception récente.
« Ces chars apporteront davantage de puissance de feu et de mobilité aux forces armées ukrainiennes et compléteront le soutien apporté par nos partenaires aux unités blindées ukrainiennes. L’Australie a toujours soutenu l’Ukraine (…) dans sa lutte contre l’invasion illégale de la Russie », a soutenu Pat Conroy, le ministre australien de l’Industrie de défense.
« Alors que nous sommes confrontés à un environnement géostratégique difficile, il est important que nous continuions à travailler avec nos partenaires du monde entier pour dissuader les agressions et protéger l’ordre mondial fondé sur des règles », a conclu le responsable australien.
Cette décision, qui doit avoir reçu l’aval de Washington, permettra à l’armée ukrainienne de compenser l’attrition des 31 M1A1 Abrams SA (Situational Awareness) sortis de l’inventaire de l’armée américaine en septembre 2023. Ces chars étant engagés au combat, comme En février, au moins 16 d’entre eux ont été détruits, abandonnés ou capturés.