L’augmentation des cas de leucémie est-elle liée au traitement des vignes à proximité des habitations, selon une étude ?
L’exposition aux pesticides est suspectée d’être un facteur de risque de cancers de l’enfant, notamment de leucémies. L’étude de l’Inserm s’intéresse au lien entre le risque de développer cette maladie et l’utilisation de pesticides à proximité des habitations. L’épidémiologiste Stéphanie Goujon éclaire les conclusions des scientifiques en trois points.
Une étude publiée par l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) en octobre 2023 s’intéresse au lien éventuel entre le développement de leucémies chez les enfants de moins de 15 ans et la densité de vignes à proximité de leur lieu de résidence. Plus les surfaces viticoles sont grandes, plus le nombre de cas de la maladie est élevé.
L’épidémiologiste Stéphanie Goujon, qui a contribué à cette recherche, explique ces résultats, notamment en Occitanie.
Stéphanie Goujon : Nous savions qu’il existait un lien entre la leucémie pédiatrique et le fait qu’une femme enceinte ait des vignes à proximité de son domicile ou dans son milieu professionnel. Nous avons donc voulu savoir quelle était la situation des enfants qui grandissaient à proximité de vignes.
Pour cette étude, le premier type de mesure est la présence de cultures agricoles dans la commune de résidence de l’enfant. Le deuxième type de mesure identifie les vignobles à moins d’un kilomètre du lieu de résidence. L’étude est basée sur 3 711 cas d’enfants de moins de 15 ans diagnostiqués avec une leucémie et plus de 40 000 enfants témoins.
Les résultats montrent qu’il n’y a pas d’impact entre la présence de vigne à proximité de l’habitation et le développement de leucémies.
D’autre part, On observe une augmentation de près de 10 % des leucémies aiguës lymphoblastiques pour chaque augmentation de 10 % de la surface des vignes.
SG: Pour notre étude, le« L’Occitanie est l’une des régions où l’on trouve le plus d’enfants vivant à proximité des vignobles. Cela représente 38% d’entre eux. C’est aussi une région avec une grande diversité de lieux de résidence.
Nous avons utilisé deux sources cartographiques différentes pour compiler ces données. Les résultats obtenus sont quelque peu différents selon les régions. L’Occitanie est l’un des endroits où les chiffres montrent une différence.
SG: Les résultats corroborent notre hypothèse. Le risque de leucémie n’augmente pas avec la seule présence de vigne à moins de 1 000 m de l’adresse résidentielle. Ils mettent cependant en évidence une légère augmentation de ce risque en fonction de la surface totale de vigne présente dans ce périmètre. L’ensemble des résultats est décrit en anglais dans la revue Environmental Health Perspectives.
En revanche, ces résultats sont un signal qui appelle à des études plus approfondies. Nous avons commencé par la viticulture, qui est une culture pérenne plus clairement identifiable que les cultures soumises à rotation par exemple et qui fait l’objet de nombreux traitements phytosanitaires. Des analyses concernant d’autres cultures sont en cours, ainsi que des analyses sur d’autres types de cancer. En parallèle, nous travaillons à évaluer l’exposition aux différents pesticides utilisés sur ces cultures. C’est un travail long et complexe qui repose sur plusieurs collaborations.
