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L’attaque d’Israël contre les Houthis au Yémen, une étincelle qui pourrait déclencher un nouveau front ?

Samedi 20 juillet, Israël a frappé le port de Hodeida au Yémen, en réponse à une attaque des rebelles houthis sur son sol. Une stratégie risquée de la part de l'Etat hébreu.
– / AFP Samedi 20 juillet, Israël a frappé le port de Hodeida au Yémen, en réponse à une attaque des rebelles houthis sur son sol. Une stratégie risquée de la part de l’Etat hébreu.

– / AFP

Samedi 20 juillet, Israël a frappé le port de Hodeida au Yémen, en réponse à une attaque des rebelles houthis sur son sol. Une stratégie risquée de la part de l’Etat hébreu.

MOYEN-ORIENT – L’armée israélienne a-t-elle mené une frappe aussi spectaculaire que contreproductive ? La première attaque israélienne contre les Houthis, les rebelles yéménites soutenus par l’Iran, ennemi juré d’Israël, pourrait renforcer cette organisation militaro-religieuse, et ainsi favoriser une menace supplémentaire contre l’Etat hébreu.

Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas en octobre, les Houthis se sont positionnés comme un membre clé du réseau régional d’alliés de Téhéran, qui comprend des groupes au Liban, en Syrie et en Irak, dont le Hezbollah et le Hamas, pour ne citer que les plus connus. Prétendant agir en soutien aux Palestiniens de Gaza et défiant les frappes des parrains d’Israël, menés par les États-Unis et le Royaume-Uni, ils ont lancé près de 90 attaques contre des navires marchands dans la mer Rouge et le golfe d’Aden depuis novembre.

Et le vendredi 19 juillet, lors d’une attaque sans précédent, l’un de leurs drones militaires a échappé au système de défense israélien, tuant une personne à Tel-Aviv.

Être perçus comme des soutiens indéfectibles des Gazaouis

En réponse, les frappes israéliennes du lendemain sur le port de Hodeidah ont fait six morts et des dizaines de blessés, selon les Houthis. Et en effet, ils  » légitimer les affirmations des Houthis selon lesquelles ils mènent une guerre contre Israël « , ce qui pourrait accroître le capital sympathie des rebelles, a expliqué à l’Agence France Presse Maged Al-Madhaji, du Centre d’études stratégiques de Sanaa.

De plus, cela accroît encore la pression exercée par l’Iran et ses mandataires sur l’État d’Israël, qui multiplie déjà les escarmouches à la frontière avec le Liban, en plus du front à Gaza. Après les raids de samedi contre une centrale électrique et des installations de stockage de carburant dans le port de Hodeida, les Houthis ont en effet promis une riposte  » massif « Et alors qu’un missile a depuis été intercepté par le système de défense israélien, le même jour, des centaines de Yéménites brandissant des drapeaux palestiniens sont descendus dans les rues de la capitale Sanaa en scandant » Mort à l’Amérique, mort à Israël « .

 » Pour les rebelles, ces attaques constituent un puissant outil de propagande. Ils peuvent rallier leurs partisans en se présentant comme des défenseurs contre un nouvel agresseur extérieur. « Les attaques contre les navires de la coalition internationale sont une menace pour la sécurité de Gaza », note Afrah Nasser, du think tank Arab Center à Washington DC, à nouveau interrogé par l’AFP. A l’image de la stratégie de frappes contre des navires qu’ils considèrent comme alliés d’Israël, attaques qu’ils poursuivent malgré la réponse américaine et britannique, jouant toujours la carte du soutien à Gaza.

À cet égard, Gregory Johnsen, de l’Institute for Future Conflict, a soutenu sur les réseaux sociaux que les Houthis « Je ne veux rien d’autre que d’être vu en train de combattre l’alliance « américano-sioniste » « . Que  » étouffe également les dissensions internes (…) ce qui rend le groupe plus fort et facilite le recrutement « .

Les civils souffriront à nouveau

Pour rappel, les Houthis s’étaient emparés de la capitale yéménite Sanaa en 2014. Une coalition menée par l’Arabie saoudite était intervenue l’année suivante pour soutenir le gouvernement internationalement reconnu. Mais près d’une décennie de guerre n’a pas réussi à affaiblir les rebelles qui contrôlent de larges pans du Yémen. Au contraire,  » La dernière décennie de guerre civile internationalisée au Yémen démontre que les dirigeants houthis ne sont pas dissuadés par les frappes militaires « , a déclaré à l’AFP Elizabeth Kendall, directrice du Girton College de l’université de Cambridge. Ainsi, pour l’experte, après les raids israéliens, «  Les Houthis (…) renforceront leur statut de défenseurs de la Palestine « .

D’autant que les frappes israéliennes n’auront qu’un impact limité sur la capacité de nuisance des Houthis. Si le port de Hodeida est un point d’entrée vital pour les importations de carburant et l’entrée de l’aide internationale, Andreas Kreig, du King’s College de Londres, estime que l’attaque israélienne  » Cela n’affectera pas de manière significative la chaîne d’approvisionnement en armes des Houthis « , surtout quand on sait que c’est Téhéran qui livre. Il explique :  » Les composants de missiles peuvent être livrés par différentes voies et ne nécessitent pas d’installations portuaires majeures. »

Ce sont donc les populations civiles et non les groupes armés qui risquent de subir les effets des frappes. Car elles pourraient entraver les futures importations de carburant et font déjà craindre des pénuries dans un contexte de grave crise financière. Les raids qui ont détruit les réservoirs de stockage  » entraînera de graves pénuries de carburant dans le nord du Yémen, affectant les services essentiels tels que les générateurs pour les hôpitaux « , a noté Mohammed Albasha, analyste du groupe de réflexion américain Navanti. En outre, les dommages causés à la centrale électrique de Hodeida (…) aggraveront considérablement les souffrances de la population locale.  » a-t-il souligné.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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