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L’athlète Wilfried Happio accusé de violences conjugales

Wilfried Happio après avoir franchi la ligne d'arrivée dans les séries du 400 m haies hommes aux Championnats du monde d'athlétisme de l'IAAF à Eugene, Oregon, le 16 juillet 2022.

Avant d’accepter la réunion qui Le monde On lui a proposé, elle a hésité, plusieurs semaines. Le temps d’y réfléchir. Elle en a parlé avec certains membres de son entourage proche, et avec le psychologue qu’elle consulte. « Depuis six mois ». La jeune femme nous a alors donné rendez-vous dans un bistrot de la banlieue parisienne.

Sur la terrasse, ce 8 juillet, Maria (son prénom a été changé à sa demande), l’allure soignée et le sourire poli, s’excuse presque : « J’ai beaucoup de trous noirs, liés à beaucoup de traumatismes… Il y a des choses qui sont floues, ce n’est pas que je cherche à cacher quelque chose. » Elle craint d’avoir oublié certaines dates, d’être imprécise. Elle n’a jamais raconté son histoire publiquement auparavant.

Sur la table, à côté d’un paquet de cigarettes et du café qu’elle a commandé, Maria, 26 ans, peut consulter un précieux aide-mémoire : son téléphone. De temps en temps, elle tape sur l’écran. Avec ses ongles longs, elle navigue à travers des milliers de photos. Parmi les paysages de vacances et les bons moments entre amis, il y a ces gros plans de chair meurtrie. Des photos qu’elle garde depuis des années. Au cas où, « à documenter, sinon personne ne me croirait ». Peut-être aussi pour ne pas oublier.  » En fait, explique Maria, C’est quand je les vois que ça me revient, sinon parfois ça me sort de la tête. »

Dans cette photothèque, l’alerte la plus ancienne remonte au 2 mars 2018. Une cuisse couverte d’un hématome. Des souvenirs surgissent : « Pour moi, d’après les photos que j’ai, c’est la première violence. On se dispute à propos de quelque chose, il est à vélo, je suis à pied. (…) Il a fini par me frapper avec le vélo, dans la cuisse, ce qui m’a donné ce bleu. Il y a aussi des images du 2 septembre 2018. Maria commente l’une d’elles : « Voilà son jogging Adidas, avec mon sang dessus. »

L’un des leaders de l’athlétisme français

17 décembre 2018, une mâchoire rougie et gonflée : « C’était dans sa chambre à l’Insep (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance)J’y ai passé du temps. On s’aimait. (…) Il a perdu la boule et m’a frappé à la tête comme une fusée. J’avais un partiel ce jour-là, alors j’y suis allé tout gonflé à bloc. » Un selfie horodaté du 28 janvier 2019 montre la moitié du visage de Maria, un œil rouge à cause des larmes, sa tempe gonflée. « Il était 1h41 du matin (le matin)il m’a giflé violemment avec ses chevalières parce qu’il ne supportait pas que je fume.

L’homme que Maria accuse de violences répétées en 2018 et 2019 s’appelle Wilfried Happio. À 25 ans, il fait partie des cadors de l’athlétisme français. Avec son sourire radieux et ses imposantes lunettes de soleil, qu’il porte parfois lors des compétitions du 400 m haies, sa spécialité, il est devenu l’un des visages de l’équipe de France. L’une de ses figures de proue, aussi. Au printemps, Adidas, son équipementier et celui des Bleus, a lancé une vaste campagne de publicité en vue des Jeux olympiques (JO). Et c’est le hurdler que la marque aux trois bandes a choisi de faire poser sur d’immenses affiches, aux côtés de son ami Sasha Zhoya, pépite de 22 ans du 110 m haies, et de la sauteuse en longueur Hilary Kpatcha.

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Cammile Bussière

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