L’armée israélienne a indiqué mercredi qu’elle préparait « une éventuelle entrée » au Liban pour frapper le Hezbollah, contre lequel son aviation a mené de nouvelles frappes meurtrières, une situation menaçant une « guerre généralisée » au Moyen-Orient selon le président américain Joe Biden.
« Nous attaquons toute la journée (…) pour préparer la zone à une éventuelle entrée de votre part (…) et pour continuer à frapper le Hezbollah », a déclaré le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général Herzi Halevia, à des soldats à la frontière avec le Liban.
Joe Biden a de nouveau mis en garde contre le risque d’une « guerre ouverte » régionale, même si le Pentagone a jugé qu’une offensive terrestre israélienne ne semblait pas « imminente ». Washington est en « discussions actives » pour une trêve, selon un haut responsable américain.
Dans l’immédiat, Israël, qui affirme opérer pour permettre le retour de dizaines de milliers d’habitants déplacés du secteur frontalier par les tirs du Hezbollah, poursuit pour le troisième jour consécutif ses bombardements, concentrés sur le sud et l’est du Liban, deux bastions du mouvement islamiste soutenu par l’Iran.
Dans tout le pays, 51 personnes ont été tuées et plus de 220 blessées, selon les autorités libanaises, les avions israéliens ciblant également des villages situés à l’extérieur des bastions du Hezbollah, notamment Maaysara, au nord de Beyrouth.
Plus de 90.000 Libanais ont été jetés sur les routes, selon l’ONU, fuyant vers Beyrouth ou la Syrie.
L’armée israélienne a indiqué avoir frappé « plus de 2.000 cibles » du Hezbollah depuis lundi, dont « plusieurs centaines » mercredi.
Lundi, ses frappes avaient tué 558 hommes, femmes et enfants, et blessé plus de 1.800, selon les autorités libanaises. Au total, les échanges de tirs entre le Hezbollah et l’armée israélienne ont fait 1.247 morts au Liban depuis octobre, « essentiellement des civils », ont-elles annoncé mercredi.
– Missiles et drones –
« Nous étions avec mes sœurs et mes cousines quand des avions ont soudainement frappé », a raconté Zeinab al-Moussawi, une habitante du quartier blessée la veille, à l’hôpital de Baalbeck. « Il y avait des restes humains, ceux de mes cousines, tout autour de nous, et la maison a été détruite », a-t-elle ajouté.
A Maaysara, les personnes tuées « étaient des civils » évacués du sud, explique Fatima, une habitante.
A Beyrouth, les habitants attendaient pour donner leur sang au siège de la Croix-Rouge, qui a lancé un appel urgent aux dons.
Les écoles et les universités resteront fermées jusqu’à la fin de la semaine, et de nombreuses compagnies aériennes ont suspendu leurs vols vers Beyrouth.
En Israël, les sirènes d’alerte ont retenti à l’aube à Tel-Aviv, à plus de 110 km de la frontière libanaise, lorsque le Hezbollah a tiré un missile sol-sol, qui a été intercepté, selon l’armée, pour qui il s’agissait d’une première.
Il a ensuite publié une vidéo montrant le missile, qui, selon lui, avait une portée de 190 km.
« J’ai vécu dans le nord pendant la majeure partie de ma vie, donc (…) je suis un peu habitué », mais que des tirs « atteignent le centre du pays est définitivement plus effrayant », a déclaré Noam Nadler, un étudiant de 27 ans de Tel-Aviv.
Dans la soirée, la « Résistance islamique en Irak », un groupe nébuleux de factions pro-iraniennes, a revendiqué une attaque de drone contre une « cible stratégique » à Eilat, dans le sud d’Israël, où l’armée a indiqué avoir intercepté un drone lancé depuis l’Est, et localisé un second qui était tombé. Les secouristes ont fait état de deux blessés légers.
Les Brigades irakiennes du Hezbollah, un influent groupe armé pro-iranien, ont appelé à « intensifier » les « opérations » contre Israël.
– « Force » et « astuces » –
Selon le gouvernement israélien, 9.360 roquettes et missiles ont été tirés jusqu’à présent sur Israël depuis que le Hezbollah a ouvert un front contre le pays en soutien au Hamas palestinien au début de la guerre de Gaza.
Israël utilisera la « force » et les « ruses » contre le Hezbollah jusqu’au retour des habitants du nord d’Israël, a martelé mercredi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. « Nous infligeons au Hezbollah des coups qu’il n’aurait pas pu imaginer », a-t-il ajouté.
L’armée israélienne a annoncé le rappel de deux brigades de réserve qui seront déployées dans le nord.
Selon l’agence de presse libanaise ANI (officielle), un drone israélien a survolé mercredi Nabatiyeh (sud), diffusant un message audio anti-Hezbollah.
Le puissant mouvement, allié au Hamas, a juré de continuer à attaquer Israël « jusqu’à la fin de l’agression à Gaza ».
A la tribune de l’ONU, le président français Emmanuel Macron a appelé Israël à stopper « l’escalade au Liban » et le Hezbollah à cesser ses attaques.
Les tirs transfrontaliers se sont intensifiés depuis une vague d’explosions meurtrières d’appareils de communication du Hezbollah, attribuées à Israël, les 17 et 18 septembre au Liban, suivie d’une frappe israélienne le 20 septembre sur la banlieue sud de Beyrouth, qui a décapité l’unité d’élite du mouvement.
– Gaza en arrière-plan –
Dans la bande de Gaza, pilonnée depuis près d’un an par l’armée israélienne, les Palestiniens craignent que l’escalade actuelle n’éclipse leur sort.
« L’attention des médias sur la bande de Gaza est devenue secondaire », déplore Ayman al-Amreiti, 42 ans, pour qui cela encourage Israël « à commettre davantage de crimes ».
L’attaque du Hamas contre Israël a fait 1.205 morts, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des chiffres officiels israéliens incluant les otages tués ou tués à Gaza.
Sur les 251 personnes enlevées, 97 sont toujours détenues à Gaza, dont 33 déclarées mortes par l’armée.
En représailles, Israël a promis de détruire le Hamas, qui dirige Gaza depuis 2007 et qu’il considère comme une organisation terroriste, aux côtés des États-Unis et de l’Union européenne.
Son offensive militaire à Gaza a fait jusqu’à présent 41.495 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l’ONU, et a provoqué une catastrophe humanitaire dans la région.