l’armée israélienne aurait visé délibérément le convoi de l’ONG – Libération
Selon un article du journal « Haaretz », l’armée israélienne savait que les véhicules, touchés par une frappe meurtrière lundi 1er avril dans l’enclave palestinienne, appartenaient à World Central Kitchen. Ils les ont pris pour cible parce qu’ils pensaient qu’un individu armé se trouvait parmi les passagers.
« C’était une erreur qui faisait suite à une mauvaise identification de nuit, pendant une guerre, dans des conditions très complexes. Cela n’aurait pas dû arriver.» Ce mercredi, par la voix du général Herzi Halevi, chef d’état-major de son armée, Israël a reconnu avoir commis une erreur en frappant lundi soir un convoi de l’ONG américaine World Central Kitchen (WCK), tuant sept travailleurs humanitaires. Le chef de l’État hébreu, Isaac Herzog, avait annoncé quelques heures plus tôt que «sa profonde tristesse et ses sincères excuses« . Mais un article publié ce mardi par le journal israélien Haaretz » jette le doute sur les circonstances dans lesquelles le drame s’est produit, remettant en cause la possibilité d’une simple « bavure ». Selon le quotidien, qui cite des sources sécuritaires israéliennes, les militaires ont délibérément pris pour cible les véhicules de l’ONG car ils avaient repéré, dans un camion qui les accompagnait un peu plus tôt, un homme armé qu’ils soupçonnaient d’être un terroriste.
Au moment où il a été pris pour cible, le convoi de la WCK se dirigeait vers un centre logistique à Rafah, à la frontière avec l’Egypte, en provenance d’un entrepôt de Deir Al-Balah, où l’ONG organisait le déchargement de vivres par la route. maritime. Ses trois véhicules sont clairement identifiables comme appartenant à l’organisation humanitaire et l’itinéraire qu’ils empruntent a été préalablement approuvé par les autorités israéliennes. Hélas : dans une salle de commandement israélienne, des soldats ordonnent de tirer sur le convoi. A trois reprises, contre chacun des véhicules, tandis que les victimes tentaient tant bien que mal de transférer les blessés d’une voiture à l’autre pour les mettre hors de danger. Bilan de cet acharnement : sept morts, soit l’ensemble des passagers du convoi. Un Palestinien, trois Britanniques, un Australien, un Polonais, un Américano-Canadien, âgés entre 25 et 57 ans. »Je suis consterné que nous, World Central Kitchen et le monde, ayons perdu de belles vies aujourd’hui à cause d’une attaque ciblée des forces israéliennes.», a déclaré la présidente de l’ONG, Erin Gore.
« Le résultat inévitable de la manière dont la guerre est menée »
Quant à l’homme armé identifié par Tsahal, il est resté avec son camion dans l’entrepôt de Deir Al-Balah, et n’a donc pas été touché par les frappes. « C’est frustrant. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour frapper les terroristes avec précision et, au final, les unités sur le terrain décident de lancer des attaques sans aucune préparation, dans des cas qui n’ont rien à voir avec la protection de nos forces armées.», déplore une source sécuritaire citée par Haaretz, dans une tentative de confiner le drame à une erreur individuelle. Le quotidien israélien de gauche indique que Tsahal considère cet événement comme «un incident grave qui risque d’avoir des effets considérables sur la poursuite des combats à Gaza, en raison de la détérioration de la légitimité internationale» de l’opération israélienne dans l’enclave palestinienne, où près de 33 000 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre, selon le ministère de la Santé à Gaza, contrôlé par le Hamas.
« C’est inadmissible. Mais c’est le résultat inévitable de la façon dont la guerre est menée», dénonce le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. L’armée israélienne a promis une enquête sur les circonstances de l’attaque pour «limiter le risque (que) ça arrive encore» Une telle tragédie, alors que plusieurs dizaines d’humanitaires ont déjà été tués depuis le début de la guerre, dont au moins 150 membres de l’UNRWA, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens. Selon Haaretz, des émissaires de l’État hébreu seront envoyés auprès des gouvernements britannique, australien, polonais, américain et canadien pour leur présenter personnellement les conclusions de cette enquête sur la mort de leurs ressortissants. Entre-temps, WCK a annoncé la suspension de ses activités dans la bande de Gaza. L’ONG était l’une des rares encore à opérer dans le territoire palestinien, menacé par la famine.