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l’ANC perd sa majorité absolue

Un vent de changement en Afrique du Sud ? Après trente ans de règne, l’African National Congress (ANC), au pouvoir depuis l’avènement de la démocratie et l’élection de Nelson Mandela en 1994, a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale. Selon les résultats quasi complets de la Commission électorale samedi 1er juin, à plus de 99,5 % du dépouillement, le parti historique n’a recueilli que 40,2 % des voix et a enregistré un cinglant revers, plongeant nettement sous la barre critique des 50 %.

Le plus grand parti d’opposition (Alliance Démocratique, DA) a recueilli 21,8% des suffrages exprimés. Le parti uMkhonto weSizwe (MK) de l’ex-président Jacob Zuma, né quelques mois seulement avant les élections, a obtenu 14,6%, tandis que les radicaux de gauche des Combattants de la liberté économique (EFF) se sont maintenus à 9,5%.

La fin d’un monopole politique

Jusqu’à présent, le tout-puissant ANC avait remporté toutes les élections nationales avec une large majorité. Mais la désillusion de 62 millions de Sud-Africains a cette fois eu raison d’une loyauté sans faille de longue date envers le mouvement qui a libéré le pays du joug de l’apartheid.

Dans la deuxième puissance industrielle du continent, le chômage touche un tiers des personnes en âge de travailler, notamment les jeunes. La pauvreté s’aggrave et les inégalités se creusent, tandis que la criminalité bat régulièrement ses propres records. Au quotidien, les coupures d’eau et d’électricité à répétition nous rappellent à quel point le rêve d’une nation avec accès pour tous à l’éducation, au logement et aux services de base, promis par l’ANC pour mettre fin à l’apartheid, est toujours hors de portée. .

Pire encore, la confiance a grimpé en flèche alors que de multiples scandales de corruption impliquant de hauts dirigeants de partis ont éclaté ces dernières années et alimenté les gros titres. Appelés aux urnes mercredi, quelque 16 millions d’électeurs se sont rendus au rendez-vous, pour beaucoup avec une colère qui couvait de longue date : l’ANC n’avait déjà recueilli que 57 % des suffrages exprimés lors des dernières élections législatives de 2019, contre 70 %. en 2004. .

Le président Cyril Ramaphosa peut-il rester ?

Après l’annonce des résultats définitifs, prévue dimanche 2 juin, les 400 sièges de députés seront distribués. La nouvelle Assemblée devra ensuite se réunir en juin pour élire le prochain président. L’ANC, qui détient actuellement 230 sièges (58 %), reste le plus grand parti politique. Mais déchu de sa stature de parti dominant, il devra entamer les négociations dans les prochains jours.

A ce stade, les spéculations vont bon train sur la formation du prochain gouvernement, les experts et observateurs pariant sur la formation d’un gouvernement de coalition. Si l’ANC décide de se rapprocher du DA, il devra faire des concessions au mouvement libéral qui prône la privatisation du secteur public et la déréglementation de l’économie.

Un rapprochement avec l’EFF impliquerait des compromis sur les demandes de réformes radicales telles que la redistribution sans compensation des terres aux Noirs et la nationalisation de secteurs économiques clés. « Nous ne sommes pas désespérés et ne ferons aucun compromis sur nos revendications et nos principes »a insisté Julius Malema, président de l’EFF, samedi 1er juin, lors d’une conférence de presse.

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, 71 ans, pourrait tenter une alliance avec MK, devenue la troisième force politique du pays. Cependant, son prédécesseur Jacob Zuma, 82 ans, reste un vieil ennemi politique et une détente des relations entre les deux hommes semble aujourd’hui improbable.

L’idée que l’ANC puisse continuer à gouverner malgré la perte de sa majorité absolue, sur la base d’un accord avec certains partis sur des aspects clés comme le budget ou d’un engagement à ne jamais soutenir une motion de censure, est aussi sa voie. « Un gouvernement minoritaire serait quelque chose de complètement nouveau en Afrique du Sud mais c’est une option parmi d’autres »a confirmé à l’AFP Helen Zille, au sein du comité directeur de la DA. « Les négociations entre les parties n’ont pas encore commencé mais des canaux ont été ouverts, elle a glissé, discussions de personne à personne.

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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