La circulation méridionale de retournement de l’Atlantique (AMOC) est l’un des systèmes océaniques les plus importants. Souvent comparé à un gigantesque tapis roulant, ce courant distribue chaleur, nutriments et énergie à travers les océans. Depuis plusieurs mois, l’AMOC est au centre de nombreuses inquiétudes. Initié par le changement climatique, son supposé effondrement aurait en effet de graves conséquences pour la planète entière. Cependant, une étude récente a bousculé certaines prédictions pessimistes.
Qu’est-ce que l’AMOC et pourquoi est-il essentiel ?
Les océans ne sont pas de simples étendues d’eau immobiles ; ils sont animés par des courants complexes qui régulent le climat terrestre en redistribuant la chaleur, l’humidité et l’énergie. Présent dans l’Atlantique, l’AMOC fait partie de ces systèmes. Concrètement, l’AMOC transporte les eaux chaudes des tropiques vers les régions du nord où elles se refroidissent, se densifient et plongent dans les profondeurs avant de repartir vers le sud. Ce cycle influence directement les phénomènes météorologiques à travers le monde : des tempêtes hivernales en Europe aux moussons en Afrique de l’Ouest.
Son rôle ne s’arrête pas là. En redistribuant les nutriments et en absorbant une partie du dioxyde de carbone atmosphérique, l’AMOC participe également à la régulation des écosystèmes marins et du cycle du carbone.
Inquiétudes : le spectre de l’effondrement
Depuis plusieurs décennies, les scientifiques alertent sur les risques liés à un ralentissement ou à un effondrement de l’AMOC. Ces craintes sont principalement liées à la fonte accrue des calottes glaciaires au Groenland et en Antarctique qui libère d’importantes quantités d’eau douce dans l’océan Atlantique. Cette eau douce, moins dense que l’eau salée, menace alors de perturber la plongée des eaux froides revenant vers le sud, ce qui pourrait entraîner un ralentissement de tout le système de circulation.
Cependant, un ralentissement de l’AMOC pourrait entraîner des bouleversements majeurs : des hivers plus rigoureux en Europe, une montée du niveau de la mer sur la côte est des Etats-Unis ou encore des sécheresses prolongées en Afrique. Si ce ralentissement se transforme en effondrement, ces conséquences seraient amplifiées, ce qui menacerait directement les équilibres climatiques mondiaux.
Jusqu’à récemment, des études basées sur la température de la surface des océans suggéraient que l’AMOC avait déjà commencé à ralentir. Cependant, bien que largement utilisées, ces méthodes présentent des limites que les chercheurs tentent aujourd’hui de surmonter.
Les nouveaux résultats : une stabilité inattendue
Une équipe de scientifiques de la Woods Hole Oceanographic Institution (WHOI) a décidé de réévaluer l’état de l’AMOC en utilisant des méthodes innovantes. Au lieu de se contenter de données sur la température de surface, ils ont utilisé une autre mesure : les flux thermiques air-mer. Ces flux, qui correspondent aux échanges de chaleur entre l’océan et l’atmosphère, sont directement liés à l’activité de l’AMOC.
En analysant ces données sur plusieurs décennies, de 1963 à 2017, les chercheurs ont découvert que l’AMOC n’avait pas diminué. Ce résultat contraste fortement avec les études précédentes et offre une perspective plus optimiste. Selon les auteurs, l’AMOC apparaît actuellement plus stable que prévuce qui pourrait indiquer que nous ne sommes pas aussi proches d’un point de basculement qu’on le craignait. Cependant, cette étude ne prédit pas l’avenir. Les chercheurs soulignent que malgré cette stabilité, les impacts du changement climatique continuent de s’intensifier, augmentant la pression sur ce système vital.
Ce que cela signifie pour l’avenir
Les résultats de cette étude, publiés dans Nature Communications, offrent un certain répit, mais ne doivent pas être interprétés comme une absence de danger. La stabilité actuelle de l’AMOC nous laisse encore du temps pour agir et limiter les émissions de gaz à effet de serre. Chaque action entreprise aujourd’hui pour réduire le réchauffement climatique contribue à préserver cet équilibre fragile.
Les chercheurs appellent à une surveillance accrue de l’AMOC. Les modèles climatiques, bien que déjà sophistiqués, doivent continuer à être perfectionnés. Les observations directes à long terme sont également essentielles pour confirmer les tendances et mieux prédire les évolutions futures.