Laissez vos enfants s’ennuyer, c’est la meilleure façon de les éduquer
À l’ère où la « parentalité consciente » règne en maître, Darby Saxbe, psychologue à l’Université de Californie du Sud, propose une alternative aux méthodes parentales (parfois ridiculement) positives. Sa théorie, la « sous-parentalité consciente », développée dans le New York Times, invite les parents à s’inspirer de nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, qui ne passaient pas leur temps à trouver mille et une façons de divertir leurs petits. Une méthode à découvrir avec attention (et pourquoi pas un peu d’autodérision), sans oublier qu’il ne s’agit que d’une suggestion.
Dans les sociétés rurales d’Afrique centrale, les enfants passent beaucoup de temps avec leurs parents – les accompagnant tout au long de la journée et les aidant souvent dans les tâches ménagères – mais ils sont rarement au centre de leur attention. « Parfois s’ennuyant, parfois occupés, ces enfants passent une grande partie de leur temps à regarder les adultes faire des choses d’adultes. »explique Barry Hewlett, anthropologue spécialisé dans l’enfance.
Dans les sociétés industrialisées contemporaines, c’est tout le contraire : dès que l’enfant pointe le bout de son nez, tout est mis en place pour qu’il ne s’ennuie pas. On l’emmène d’une activité à l’autre : judo, gymnastique puis arts plastiques, persuadé que c’est ce qui est le mieux pour lui. Les enfants sont devenus là priorité absolue, à tel point que certains parents peuvent se sentir coupables de les impliquer dans les tâches d’adultes.
Mais est-ce vraiment nécessaire ? Darby Saxbe suggère que cette attention excessive, aussi bien intentionnée soit-elle, n’aide ni les enfants ni les parents.
L’ennui, un cadeau pour le cerveau ?
Selon sa démarche, l’ennui n’est pas un ennemi, mais plutôt un allié. Les neurosciences ont montré qu’un cerveau au repos continue de fonctionner : il imagine, pense, crée. Laisser un enfant vagabonder l’aide aussi à développer des compétences essentielles comme la patience, l’ingéniosité ou encore l’empathie. Certes, la théorie a de quoi faire sourciller. Mais réfléchissez-y : avez-vous déjà passé des après-midi à écouter des conversations interminables chez papy et mamie ou à faire la queue à la banque avec vos parents lorsque vous étiez jeune ? N’êtes-vous donc pas beaucoup plus patient aujourd’hui ?
Cela dit, personne ne préconise l’idée d’ignorer complètement vos enfants. Lorsqu’ils ont vraiment besoin de vous, vous devez être là pour eux. Mais cette méthode implique également de conserver votre énergie pour ces moments-là, plutôt que de vous épuiser à essayer de tout contrôler tout le temps.
Plus loin encore dans sa démarche, Darby Saxbe évoque idéalement « une société qui traite les enfants comme un bien public, où nous gardons un œil collectif sur tous nos enfants, nous libérant du besoin de surveiller les nôtres »Sans aller jusque-là, peut-être que se défouler et laisser vos enfants gérer leur ennui pourrait être bon pour eux… et pour vous.