Lactalis achètera moins de lait : une « explosion » pour les éleveurs français – 26/09/2024 à 20h58

Le projet du géant laitier Lactalis (Président, Lactel, Galbani) d’acheter moins de lait aux éleveurs français a ravivé jeudi la colère du monde agricole, qui a dénoncé un industriel « sans scrupules ».

Dès jeudi matin, le président de la première organisation agricole FNSEA a donné le ton, parlant d’une « explosion pour le secteur laitier » en France, alors que le monde de l’élevage, déjà fragilisé, est menacé par les maladies animales.

« Pour nous, l’enjeu ce matin est de faire en sorte que les producteurs de lait continuent de trouver quelqu’un qui récupère leur lait », a déclaré Arnaud Rousseau à la radio France Info, jugeant qu’il était « trop ​​tôt » pour évaluer le nombre de vaches qui pourraient disparaître, alors que le troupeau diminue déjà faute de jeunes pour prendre la relève.

La multinationale, qui revendique le titre de premier groupe laitier mondial, a annoncé mercredi soir la réduction « de l’ordre de 450 millions de litres » sur une collecte annuelle « de quelque 5,1 milliards de litres » de lait auprès des éleveurs français. , progressivement, à partir de fin 2024 et jusqu’en 2030. Cela représente près de 9 % de volume en moins.

La Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), section spécialisée de la FNSEA, a dénoncé un industriel « sans scrupules » et un désengagement « inacceptable ».

Lors d’un entretien avec son président, Yohann Barbe, la nouvelle ministre de l’Agriculture Annie Genevard « l’a assuré de son plein soutien et de son engagement aux côtés des producteurs pour maintenir l’activité laitière dans les exploitations concernées », selon un communiqué. du ministère.

– « Dépendance » –

La Confédération paysanne, qui avait repris en février le siège mayennais de Lactalis, déplore dans un communiqué « la dépendance économique structurelle des producteurs vis-à-vis des laiteries ».

« Cette réduction de la collecte sert à Lactalis à éliminer les producteurs et à faire pression sur ceux qui restent. La crainte d’un arrêt de la collecte empêche les demandes légitimes d’amélioration des revenus » des éleveurs, estime l’organisation classée de GAUCHE.

Depuis les différentes lois Egalim, censées protéger les matières premières agricoles, le groupe s’empresse de rémunérer davantage les éleveurs. Mais la France exporte plus de lait qu’elle n’en consomme. La moitié du lait collecté dans le pays par Lactalis est destiné aux marchés internationaux (notamment sous forme de poudre), qui sont très fluctuants.

« Les marchés se sont effondrés. Nous avons payé le lait plus cher que nous ne l’avons vendu » sur ces produits exportés, a déclaré à l’AFP un porte-parole du groupe.

En clair, pour Lactalis, la baisse des volumes est la contrepartie d’un meilleur prix de la tonne de lait.

Le groupe va d’abord réduire sa collecte « dans les zones est et sud des Pays de Loire », épargnant ainsi les grandes régions productrices, la Bretagne et la Normandie.

« Nous ne rompons pas de contrats. Mais nous souhaitons travailler très tôt avec les organisations de producteurs sur les modalités de soutien, une fois les contrats expirés », a précisé le porte-parole.

Une stratégie « regrettable » voire « incompréhensible » pour les éleveurs laitiers contactés par l’AFP en Meurthe-et-Moselle et dans le Bas-Rhin. « Leur objectif doit être d’importer du lait étranger qui finira dans la composition du beurre du Président. Le consommateur ne verra rien», anticipe Daniel Perrin, propriétaire de 80 vaches laitières à Fraimbois (Meurthe-et-Moselle).

Pour la FNPL, « il n’est pas possible que les producteurs n’aient que douze mois devant eux pour se retourner ». La fédération « demande fermement à Lactalis, dans l’intérêt des producteurs, un délai beaucoup plus long pour identifier des alternatives ».

Avec près de 30 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023, Lactalis a détrôné un autre mastodonte, Danone, comme leader français de l’agroalimentaire et est entré dans le top 10 mondial du secteur. Le groupe dispose de 270 sites de production dans 51 pays et emploie 85 000 personnes.