Victime d’une nouvelle escalade de la violence des gangs au cours des dernières semaines, Haïti approche maintenant du « point de non-retour » qui risque de plonger le pays dans un « chaos total », a alerté ce lundi le représentant spécial des Nations Unies dans le pays.
Chaos absolu. Pendant des années, Haïti, le pays le plus pauvre des Amériques, a été sous la violence de bandes criminelles, accusées de meurtres, de viols, de pillages et d’enlèvement, dans un contexte d’instabilité politique.
Depuis la mi-février, Port-au-Prince a connu un nouveau renouveau de la violence. Les gangs ont multiplié les attaques dans plusieurs districts qui ont jusqu’à présent échappé à leur contrôle. En dehors de la capitale, ils ont notamment attaqué une prison fin mars et libéré plus de 500 détenus.
Plus de 1 000 personnes ont été tuées en deux mois
« En février et mars, 1 086 personnes ont été tuées et 383 blessées », a déclaré le lundi 21 avril, Maria Isabel Salvador, représentante spéciale des Nations Unies dans le pays, malgré le déploiement partiel de la Mission de sécurité multinationale (MMA) dirigée par le Kenya pour aider la police haïtienne.
« Nous approchons d’un point de retour. Bien que la violence des gangs continue de se propager dans de nouvelles régions du pays, les Haïtiens vivent dans une vulnérabilité de plus en plus importante et sont de plus en plus sceptiques quant à la capacité de l’État à répondre à leurs besoins », a déclaré le Conseil de sécurité de Maria Isabel Salvador.
« La République d’Haïti mourra lentement »
« Sans décisif, concret et à temps, la situation de sécurité en Haïti peut ne pas changer », a-t-elle déclaré, décrivant les attaques coordonnées par des gangs pour augmenter davantage leur contrôle dans Port-au-Prince et d’autres régions.
« Haïti pourrait faire face à un chaos total », a-t-elle ajouté, appelant le Conseil de sécurité à agir rapidement pour « répondre aux besoins urgents du pays et de son peuple ». « La République d’Haïti mourra lentement sous l’action combinée des gangs armés, des trafiquants de drogue et des trafiquants d’armes », ambassadeur haïtien déploré, Ericq Pierre.
La capitale contrôlée à 85% par des gangs
« Pour les grands maux, les grands remèdes: la République d’Haïti est disposée à discuter et à soutenir si nécessaire toute initiative de ses partenaires traditionnels visant à aider à débarrasser le pays des gangs qui terrorisent la population », a-t-il ajouté.
Mais Maria Isabel Salvador était inquiète des lacunes du financement des opérations de l’ONU, sans citer spécifiquement les coupes budgétaires décidées par les États-Unis. Surtout pour des raisons de sécurité, les Nations Unies ont déjà dû réduire leur présence dans la capitale, contrôlée à environ 85% par des gangs.
« Sans un financement suffisant et prévisible, même une présence minimale de l’ONU pourrait devenir intenable (…) sans cette aide vitale, les opérations des Nations Unies pourraient encore être réduites, lorsque le pays a le plus besoin de nous », a plaidé le représentant en Haïti.