la vététiste Pauline Ferrand-Prévot, là-haut sur la colline de la Revanche
Les géographes l’appellent la colline de la revanche. C’est un tertre artificiel de 231 mètres de haut, où s’entassaient, il y a un demi-siècle, les détritus des Yvelines et les décombres des villes nouvelles. Pauline Ferrand-Prévot y a trouvé ce qu’elle était venue chercher : une revanche sur le sort olympique et la médaille d’or.
Sur cette petite montagne boisée d’Ile-de-France, dans la commune d’Elancourt (Yvelines), la Française a évacué dix années de frustration, ponctuellement au rendez-vous qu’elle s’était fixé. Plus qu’une course, une obsession vers laquelle elle pédalait mécaniquement sur sa machine, creusant un gouffre entre elle et ses concurrentes, un joyeux vacarme accompagnant sa balade solitaire. Sa dauphine, l’Américaine Haley Batten, a levé les bras trois minutes plus tard, comme si elle avait gagné. la race des « humains ».
Sur son nuage, Pauline Ferrand-Prévot était déjà enveloppée dans un drapeau français derrière la ligne, serrant dans ses bras famille et entraîneurs, prélude à un flot de larmes. Pendant huit mois, la championne s’était imposée, selon ses propres mots, « une vie monastique » et avait créé une bulle hermétique, mettant en sommeil les sollicitations médiatiques, marketing et sociales. Elle la perçait occasionnellement pour inviter ses parents, comme lors de son dernier stage de haute altitude dans les Alpes en juillet, simplement pour leur faire comprendre l’ampleur des efforts fournis.
« Les gens m’ont dit que j’avais l’air triste, mais j’allais très bien, dit celui qui s’est fait tatouer sur la nuque La vie est une blague (« la vie est une blague »). Ce sera bizarre de vivre à nouveau normalement. Dimanche 28 juillet, la Rémoise élevé avec la certitude de gagner, sauf coup de chance. « Si elle ne gagne pas, ce ne sera pas physique. Elle est à un niveau qu’elle n’a jamais atteint auparavant. »confiait l’entraîneur des vététistes, Yvan Clolus, quarante-huit heures avant la course.
Le premier des sept tours du parcours fut plus qu’un tour de chauffe : un quart d’heure de politesse accordé par Pauline Ferrand-Prévot à ses adversaires. Treize minutes durant lesquelles elle laissa à sa rivale, la Néerlandaise Puck Pieterse, le soin d’ouvrir la route, en compagnie de l’autre favorite française, Loana Lecomte. Ce sera dur pour les deux compagnes précoces de Ferrand-Prévot, chacune poussée hors du podium, Pieterse par une crevaison, Lecomte par une chute consécutive à une erreur de trajectoire dans un éboulis.
Talent brut
Après treize minutes de course, « PFP » se met en selle, contourne Pieterse par l’extérieur, se rassoit dans un virage en épingle et démarre le moteur au pied de la montée. Puck Pieterse courbe le dos, remarque que ses jambes tournent moins vite. La course est terminée. « J’étais comme un robot, je n’entendais personne sur le circuit, décrit le champion olympique. Je me suis juste concentré sur mon rythme. Je ne me souciais pas de ce qui se passait derrière. J’étais égoïste. S’isoler dès le départ était un choix conscient, explique Yvan Clolus : « Pauline a besoin d’espace pour s’exprimer, pour faire du vélo. Il fallait donc faire la différence dès le départ. » Faire du vélo n’est pas toujours compliqué.
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