La Suède veut obliger les autorités à signaler les immigrants sans papiers
Le texte, porté par le gouvernement de droite, provoque une vague de protestation au sein de la société civile, où certains appellent à la désobéissance civile.
« Les municipalités et les autorités devraient être tenues d’informer l’Office des migrations et la police lorsqu’elles entrent en contact avec des personnes séjournant en Suède sans autorisation. » Cette proposition du gouvernement suédois, contenue en quelques lignes seulement, a déclenché un tollé au sein des services publics du pays, qui appellent à la désobéissance civile.
Cette mesure, qui fait l’objet d’une mission d’information au Parlement depuis le 29 mai, s’inscrit dans l’accord de coalition du gouvernement, datant d’octobre 2022. « L’accord de Tidö », qui décrit dans le détail les conditions de coopération entre les conservateurs. , les démocrates-chrétiens, les libéraux et le SD, ont inclus une section importante consacrée à un tour de vis drastique dans la lutte contre la criminalité et l’immigration clandestine.
Obligation d’information
L’accès au statut de réfugié, ainsi qu’au regroupement familial et à la citoyenneté, devait être restreint, et le nombre de réfugiés accueillis par le pays était fortement réduit. La Suède n’accueille désormais plus que 900 réfugiés par an, sous quotas obligatoires, contre 6 400 en 2022. L’accord mentionne également l’ouverture de « centres de transit » établis à l’étranger pour les demandeurs d’asile, qui ne seront plus placés dans des logements payés par l’Office des migrations pendant l’examen de leur demande. Par ailleurs, la coalition gouvernementale a prévu de louer des cellules de prison, hors des frontières suédoises, pour accueillir des criminels d’origine étrangère.
Il est donc également évoqué dans les pages de l’accord de Tidö une volonté de coopération accrue entre la police et les autorités. « susceptible d’entrer en contact avec des personnes en situation irrégulière ». Concrètement, ces personnels du secteur public auront donc « la responsabilité de garantir que la personne a le droit de rester en Suède ». En cas de non-respect, ils auront l’obligation d’informer les services de police et l’Office suédois des migrations de l’irrégularité de la situation des personnes concernées. L’accord de Tidö précise cependant que « dispenses à l’obligation d’information » devra être examinée plus en détail, dans le cas d’une situation où la notification à la police serait « contraire aux valeurs de la société, par exemple dans le domaine de la santé ».
Une loi très controversée
Bien que la proposition soit encore à l’étude, elle suscite déjà de vives controverses au sein de la société suédoise. L’ONG de défense des droits des sans-papiers Picum a été entendue par le Parlement suédois le 29 mai pour exprimer son opposition à cette loi. Par ailleurs, plus de 4 000 professionnels de santé (infirmières, sages-femmes, médecins) ont signé en décembre dernier un article dans le quotidien suédois Aftonbladet.
Les signataires s’engagent à utiliser le « désobéissance civile » en refusant de signaler leurs patients si la facture devait être acceptée. La mesure irait à « contrairement à la loi sur l’égalité des soins en santé »critiquer en particulier les auteurs de la tribune, qui mettent en garde contre la propagation potentielle de virus « contagieux » ou « non traité, ce qui deviendra grave ». « Nous ne pourrons jamais contribuer à la guérison de quelqu’un si, en même temps, par le silence ou le vote, nous contribuons à une violence structurelle contre cette même personne. » concluent-ils.
Le Conseil suédois d’éthique professionnelle pour les enseignants, les services sociaux, les bibliothécaires et le personnel administratif des régions et des municipalités ont également exprimé leur opposition à cette mesure. Les sanctions visant les fonctionnaires qui ne respecteraient pas cette loi n’ont pas encore été révélées. Les résultats de la mission d’information parlementaire devraient être rendus publics le 30 septembre 2024.