À première vue, il s’agit d’un immense bar-restaurant doté d’une terrasse et de tables à rallonges. Mais le nom officiel du lieu est « taproom ». Un endroit où une brasserie vend ses propres bières. Le concept, venu des États-Unis, semble fonctionner à merveille pour Brique House. Installée depuis quatre ans dans un coin d’une ancienne usine abandonnée à Saint-André, dans la métropole lilloise, entourée de briques et enterrée au fond d’un immense parking, la taproom Brique House ne paye pas de mine.
Cependant, à chaque rayon de soleil, il est protégé. Le lieu a rapidement trouvé une clientèle spécifique parmi d’autres lieux branchés comme le Hall u Need qui se concentre sur les jeux d’intérieur. A tel point que la start-up nordiste vient de lever des fonds records pour une brasserie de cette taille : 3,7 millions en dix jours, versés par des particuliers et des investisseurs (entre 750 et 100 000 euros chacun).
Une holding de 1 300 actionnaires
Au total, 1 300 nouveaux actionnaires rejoignent la communauté de cette SAS (société par actions simplifiée) très ambitieuse. «Nous avons créé une holding pour regrouper ces 1 300 actionnaires», explique 20 minutesBaptiste Dufossez qui a cofondé Brique House il y a quatre ans avec Joseph Timmermans.
« Cette levée de fonds devrait permettre d’accélérer le développement de Brique House en augmentant les capacités de production afin de répondre à la forte demande de ces derniers mois et en lançant la franchise afin d’accélérer les ouvertures de taprooms Brique House », précise un communiqué de la démarrer.
En 2021, cette brasserie avait déjà levé des fonds auprès d’investisseurs avant de lancer, un an plus tard, une opération d’investissement participatif pour emprunter plus de deux millions d’euros sur 36 mois. Parallèlement, de nouveaux « taprooms » fleurissent sous des noms différents, dans la métropole de Lille, mais aussi à Paris et Bordeaux. Un sixième devrait voir le jour à Reims fin mai.
De nouvelles bières chaque mois
« Nous allons tous les renommer Brique House pour tout harmoniser », annonce Baptiste Dufossez qui se réjouit de cette success story. « Cela nous prouve une fois de plus que rien n’est impossible même s’il y a quatre ans nous étions encore deux dans un garage »
Le secret ? La création de nouvelles bières chaque mois avec un design inspiré de la société belge Brussels Bier Project dans le but de casser l’image traditionnelle de la brasserie. Mais cet enchaînement frénétique de recettes l’année dernière a porté atteinte à l’image de Brique House sur les réseaux sociaux.
Une campagne « Balance ta start-up » sur Instagram a vu se multiplier les témoignages de certains salariés dénonçant des bières vendues avec des taux d’alcool erronés, voire parfois des bières frelatées. « De purs mensonges », dément Baptiste Dufossez qui reconnaît que « les bières ne répondent pas toujours aux attentes, mais cela fait partie de la recherche et du développement ».
« Une sacrée explosion en interne »
Dans le même temps, Brique House a également dû faire face à une avalanche de critiques sur certaines méthodes managériales : harcèlement, pressions, sexisme… « Une sacrée explosion en interne, mais salvatrice pour nous, reconnaît aujourd’hui Baptiste Dufossez. Je préfère que cela se soit produit il y a six mois plutôt que dans quelques années, lorsque notre entreprise aura pris plus de poids. »
Le manager affirme avoir retenu la leçon. « Il y a eu des problèmes de comportement : deux personnes ont été licenciées », reconnaît-il, avant de certifier qu’« une enquête interne anonyme réalisée depuis a montré la satisfaction de huit salariés sur dix ».
Depuis, il affirme qu’il existe un « lanceur d’alerte avec une ligne externalisée qui garantit l’anonymat des plaintes » et qu’« un comité d’entreprise doit être élu dans quelques jours » pour représenter les 250 salariés de l’entreprise. une entreprise où le chiffre d’affaires est important.
« Un côté marketing qui déplaît aux puristes »
« On est loin du côté artisanal (bière artisanale) revendiqué », souligne un spécialiste de la bière qui préfère rester anonyme. Il y a une volonté d’être partout sur le marché de la bière et un côté marketing qui déplaît aux puristes. »
Pourtant, le leader continue de rêver grand. Pour l’instant, l’alignement des finances, sinon celui des planètes, est bien là et donne raison aux deux fondateurs qui n’oublient pas d’où ils viennent.
Quelques jours après l’ouverture officielle du premier « taproom » à Saint-André, le premier confinement a refroidi les ardeurs. « C’était compliqué », se souvient Baptiste Dufossez. Mais le succès des deux premières semaines d’exploitation, avant le 17 mars 2020, nous a convaincu que le projet était bon. »