MG, la marque chinoise qui secoue l’industrie automobile européenne
La menace d’une guerre des prix de la voiture électrique en Europe se précise, mais elle ne vient pas de Tesla. Avec sa spectaculaire valse des étiquettes mi-janvier, la société d’Elon Musk a fait beaucoup parler, mais pour Renault, Stellantis et consorts, le principal danger s’appelle MG.
En à peine deux ans, la marque détenue par l’entreprise parapublique chinoise SAIC a réalisé une percée spectaculaire de ses ventes, en s’appuyant sur des prix qui rendent fous les vendeurs des concurrents.
Les chiffres sont impressionnants : selon les comptes du cabinet Inovev, MG a réalisé 114 000 ventes en Europe en 2022 (+ 113 % sur un an), soit plus que tous les autres constructeurs chinois réunis. Il a gagné 1,1% de part de marché, dépassant Jeep et faisant deux fois mieux que Mitsubishi. En France, Dom-Tom compris, MG a totalisé plus de 13 000 immatriculations l’an dernier, et s’attend à dépasser les 20 000 en 2023.
Déjà un large réseau de revendeurs
Pour son offensive, Shanghai Automotive Industry Corporation profite de la notoriété de la marque MG, qui est née en Angleterre et a connu son heure de gloire dans les années 1960 avec ses petits cabriolets, avant d’être rachetée par les Chinois en 2007. Mais le constructeur contrôlé par les Chinois l’Etat s’est donné les moyens de faire fructifier cet héritage.
Convaincu qu’il avait besoin d’un ancrage local pour gagner la confiance des clients, il a rapidement constitué un réseau de concessionnaires relativement dense, qui ne cesse de s’étendre. A la fin du mois, la marque comptera 150 points de vente en France, là où Toyota en compte environ 260.
Dans les showrooms, la péniche découvre une gamme déjà forte de 6 modèles, alors que MG n’a véritablement attaqué le marché français qu’en 2021. Sur ce total, 4 sont 100% électriques. Mais ce sont surtout les prix qui attirent l’attention, comme celui de la MG4.
Arrivée en France depuis quelques mois seulement, cette berline du segment C offre 350 à 450 kilomètres d’autonomie selon les versions. Elle se pose donc en rivale de la Mégane E-Tech de Renault… Et avec un prix d’entrée de gamme de 29 990 euros avant le bonus écologique, elle vaut 12 000 euros de moins ! L’écart est quasiment le même avec l’ID.3 de Volkswagen.
« Ils perdent de l’argent sur chaque voiture »
« MG a une approche différente des autres marques chinoises, analyse Clément Dupont-Roc, associé chez C-Ways. Côté qualité, ses modèles se défendent, mais surtout ils se démarquent avec des prix inférieurs de 25% à la moyenne du marché. A ce niveau, il semble évident qu’ils perdent de l’argent sur chaque voiture vendue, surtout si l’on ajoute un coût d’environ 1 000 euros par véhicule pour les faire venir de Chine, ainsi que la taxe de 10 %. ‘importer. Un jugement répandu dans le secteur.
Julien Robert, directeur des ventes France, rejette toute vente à perte. « Notre stratégie est agressive pour installer la marque, mais nous n’achetons pas de parts de marché », précise-t-il.
SAIC a des poches profondes
Selon lui, les prix canons s’expliquent par la force industrielle de la maison mère, la réduction des coûts logistiques grâce à une gamme d’options réduite, et une joint-venture avec CATL qui assure un coût « raisonnable » pour les batteries. Mais le chinois BYD, qui connaît un succès fulgurant sur son marché national, utilise les mêmes recettes tout en fabriquant ses propres batteries, et son premier SUV commercialisé en France coûte au moins 43 000 euros.
Avec 5,3 millions de véhicules vendus l’an dernier et un propriétaire (l’Etat chinois) peu avide de retours à court terme, SAIC est en mesure de subventionner son expansion en Europe. Son assaut va alimenter le débat sur le « tapis rouge », selon l’expression du patron de Stellantis Carlos Tavares, que l’Europe déroulerait aux constructeurs de Pékin.
Renault est probablement sur la même longueur d’onde. La Mégane E-Tech, son nouveau standard électrique, se retrouve dans une position très inconfortable face à la MG 4. Va-t-elle réagir ? « Nous préférons perdre des volumes que tuer nos prix », assurait mi-février le patron Luca de Meo. Oliver Blume, son homologue chez Volkswagen, a fait preuve de la même fermeté… avant d’annoncer cette semaine une baisse de 3 000 euros sur l’ID.3.